Article rédigé par Bruno de Seguin Pazzis, le 09 mai 2017
O’Hare, petite ville côtière de la côte californienne en 1944. Pepper Busbee est un petit garçon de 8 ans qui ne grandit plus. Il est alors surnommé « Little Boy ». Il entretient une relation très proche avec son père qui l’encourage malgré sa petite taille. Lorsque la seconde guerre mondiale éclate, son grand frère London est réformé à cause de ses pieds plats. Son père va alors le replacer pour partir au front. Pepper est effondré par cette séparation. Lorsqu’il entend un jour le verset 17:20 de l’Evangile selon St Mathieu (« En vérité, je vous le dis, si vous avez la foi aussi petite qu'une graine de moutarde, vous pouvez dire à cette montagne: Et elle se déplacera »), il décide d’acquérir tout ce qu’il faut de foi pour obtenir le retour de son père. Cette quête de « Little Boy » va le faire passer par un chemin initiatique au cours duquel il devra se soumettre aux conseils du Père Oliver, mais aussi se défendre contre les garçons de son âge qui le moquent, affronter Hashimoto, un vieux japonais qui symbolise l’ennemi des américains, surmonter la nouvelle de la mort de son père, avant de trouver tout au bout la sérénité, la paix et l’amour. Avec: Jakob Salvati (Pepper Flynt Busbee, “Littele Boy”), Emily Watson (Emma Busbee, la mère de Pepper), David Henrie (London Busbee, le frère de Pepper), Cary-Hiroyuki Tagawa (Hashimoto), Michael Rapaport (James Busbee, le père de Pepper), Ben Chaplin (Ben Eagle), Ted Levine (Sam), Ali Landry (Ava), Kevin James (Dr. Fox), Tom Wilkinson (Père Oliver), Toby Huss (Colonel Bob), Abraham Benrubi (Teacup), Kelly Greyson (Tyra), Sam Kindseth (Ronnie), Eduardo Verástegui (Père Crispin), James DuMont (Harvey), Candice Azzara (Bertha), Lukas Behnken (Leonard Rice), Mary Stein (Martha), Eijiro Ozaki (Masao Kume), Winston James Francis (Bukha), Masami Kosaka (Commandantr Tokyo Joe), Theodora Greece (Eliza). Scenario : Stephan Altman, Mark Foster. Directeur de la photographie: Andrew Cadelago. Musique: Stephan Altman et Mark Forster.
Crois-tu en être capable ?... Cela commence comme un conte. Il était une fois, dans une petite ville de la côte Ouest des Etats-Unis, O’Hare, un jeune garçon prénommé Pepper. Il était un peu plus petit que les autres et on le surnommait « Little Boy » parce qu’il ne grandissait plus. Les garçons de son âge ne cessaient pas de se moquer de lui. Son meilleur ami était son papa qu’il adorait, et cela était réciproque. Il vivait avec lui les plus grandes aventures comme celles de son héros préféré qui faisait la une des « cartoons » pour enfants, Ben Eagle. Cela continue comme un conte fantastique, Pepper se prenant avec son père tour à tour comme les héros d’un western, de superman où autre célébrité de l’époque. Mais lorsque la guerre arriva jusqu’à O’Hare et que son grand-frère London fut réformé de l'armée, son compagnon de jeu préféré dû partir combattre et le jeune garçon se retrouva seul. Alors le conte bascule du fantastique dans le drame, surtout vu de la hauteur de « Little Boy », pour devenir une belle parabole chrétienne. Ainsi, si le film est remarquablement scénarisé pour en faire un film visible par le plus grand nombre, mêlant très adroitement les genres, film de guerre, drame historique, comédie, fantastique (avec des séquences oniriques faisant appel à l’imaginaire de chacun en représentant les jeux du père et du fils sur le mode de films de l’époque) et mélodrame, le cœur du film est cette parabole chrétienne.
Une parabole chrétienne
Si le héros de « cartoons », le magicien Ben Eagle, est le premier point qui met en mouvement l’imaginaire de « Little Boy » au point qu’il croit dur comme fer être parvenu avec l’aide du magicien à déplacer par la force de son esprit une bouteille posée sur une table, c’est le grain de moutarde de l’Evangile selon Saint Mathieu (verset 17 :20 « En vérité, je vous le dis, si vous avez la foi aussi petite qu'une graine de moutarde, vous pouvez dire à cette montagne: Et elle se déplacera ») dont le Père Crispin parle dans son sermon du dimanche qui est le déclencheur de la parabole. Une parabole qui se développe au fur et à mesure du chemin spirituel que « Little Boy » va suivre sous la direction du Père Oliver et qui aborde de nombreux thèmes avant que « Little Boy » ne devienne un « Little big man ». Au sommet, les thèmes de la Foi, de l’Espérance et de la Charité mais aussi ceux de la différence, du racisme, la façon dont il convient de traiter ses ennemis, la tolérance ou d’autre thèmes plus larges comme l’apprentissage de la vie. Little Boy revendique clairement faire partie du mouvement des « Faith Based Movies » (« Films basés sur la Foi »), mouvement qui a pris naissance aux Etats-Unis avec la sortie en 2004 du film de Mel Gibson, La Passion du Christ et qui depuis ne cesse de se développer. C’est sans doute ce label chrétien qui est à l’origine d’une critique sévère lorsque le film sort sur les écrans aux Etats-Unis en 2015. Ainsi, le grand journal d’information et culturel américain, The Village Voice, écrit à propos de Little Boy sous la plume d’Alan Scherstuhl : « (…) cynique, toxique, profondément stupide (…) ». Le site web Rotten Tomatoes spécialisé dans le cinéma et la télévision résume les 50 critiques comme suit : « Bien intentionné, mais manipulateur à une échelle horriblement erronée, Little Boy est un des rares films basés sur la foi que beaucoup de téléspectateurs peuvent trouver légitimement offensant ». Il est loin d’être sûr que ce jugement rejoigne celui du grand public. En effet, en premier lieu Little Boy évite intelligement l’écueil religieux en présentant un équilibre adroit dans son propos entre la thématique religieuse et des éléments profanes, le personnage de Ben Eagle, mais surtout celui du japonais Hashimoto qui n’est pas croyant et qui en contrepoint de celui du Père Oliver, va faire connaître à Pepper l’histoire des samouraïs et lui enseigner le courage et la confiance en soi. Ensuite, il est difficile de voir du cynisme ou de la stupidité, encore moins une offense, dans cette brillante accumulation d’ellipses et d’allégories. Citons les parallèles qui sont faits entre les combats du père contre l’ennemi japonais et ceux du fils contre ses camarades qui l’humilient ou lorsqu’Hashimoto est entre la vie et la mort à l’hôpital, le défi que lance « Little Boy » au gros Freddy Fox, comme le combat de David contre Goliath, la montagne qui tremble, le petit grain de moutarde, le petit Pepper et la bombe atomique « Little Boy » qui est largué sur Hiroshima le 6 août 1945, la petite guerre de « Little Boy » en face de la grande guerre mondiale. Alejandro Gomez Monteverde ose presque tout, jusqu’à cette séquence onirique de « Little Boy » en couleur au milieu des décombres de la bombe d’Hiroshima en noir & blanc.
Un film qui convertit…
Mais tout ceci, le cinéaste le fait à la fois avec dureté et finesse, violence et douceur, le ton qu’il faut pour ne jamais avoir l’air de donner une leçon de morale mais une leçon d’amour, montrant les choses de la vie, même celles qui sont les plus tragiques avec ce qu’il convient de tact, même si certains pourront y trouver un accent mélodramatique un peu forcé. Jusque dans les contrastes créés par les changements de genre cinématographique et les incrustations filmiques, jusque dans le traitement de la photographie aux couleurs très chaudes, et dans la mise en scène qui est coulée, douce, au-delà de la violence nécessaire mais mesurée de quelques scènes. Cette mise en scène enveloppe d’une tendresse parfois déchirante les personnages, captant tout aussi bien la beauté que les difficultés de la vie comme au travers des yeux de « Little Boy » et instillant toujours l’espoir. En cela elle est aussi remarquablement soutenue par une bande originale d’une grande justesse mélodique ainsi que par une distribution des rôles de qualité. S’il faut en premier lieu citer le jeune Jakob Salvati dont il faut admettre qu’il porte une grande partie du film avec une justesse qui coupe le souffle alors qu’il a tout juste sept ans lors du tournage, il faut remarquer la présence d’Emily Watson (Breaking the Waves de Lars von Trier en 1996, The Boxer de Jim Sheridan en 1997, Gosford Park de Robert Altman et Punch-Drunk Love de Paul Thomas Anderson en 2002), formidable dans le rôle de la mère, de Tom Wilkinson (Au nom du père de Jim Sheridan en 1993, Raisons et sentiments d’Ang Lee en 1995, Shakespeare in Love de John Madden en 1998, Le Rêve de Cassandre de Woody Allen en 2007, The Ghost Writer de Roman Polanski en 2010) dans celui du Père Oliver. A propos du jeune David Henrie dans le rôle du grand frère London, il est intéressant de signaler qu’il a déclaré (BreatheCast.com) que sa participation au film a contribué à sa conversion : « (…) Je serai toujours reconnaissant envers Little Boy parce que c'est le film qui m'a sauvé la vie (…) Le thème a vraiment parlé à mon coeur très intensément (…) mettez-vous votre foi en vous-même pour trouver votre propre existence ou mettez-vous votre foi dans quelque chose de plus grand que vous ? (…)» David Henrie n’est pas le premier comédien a connaître ce genre d’expérience à l’occasion d’une participation à un tournage de film qui traite des thématiques chrétiennes et cela atteste que si les « Faith Based Movies » peuvent faire du bien aux spectateurs, ils en font aussi à ceux qui les réalisent. Précisons enfin qu’Alejandro Gomez Monteverde a réalisé en 2006, Bella, un film sur le sujet de l’avortement, film également coproduit et interprété par Eduardo Verastegui, catholique et militant pro-vie, avant de signer Little Boy que l’on peut définir comme une parabole cinématographique subtile et lumineuse.