Article rédigé par Michel Janva, le 06 avril 2017
[Source : Le Salon Beige]
De très nombreux fidèles ont été profondément troublés par des célébrations marquées par un subjectivisme superficiel et dévastateur
Du 29 mars au 1er avril se tiennent à Herzogenrath, au nord d'Aix-la-Chapelle, les 18èmes rencontres liturgiques de Cologne, intitulé : « La source de l’avenir », à l’occasion du 10e anniversaire du motu proprio Summorum Pontificum. Ne pouvant être présent lors de cette rencontre, le cardinal Robert Sarah, préfet de la Congrégation pour le Culte divin, a adressé aux organisateurs un message reproduit par le site de L'Homme nouveau. Extrait :
''[...] La liturgie doit nous placer face à face avec Dieu dans une relation personnelle et d’intense intimité. Elle doit nous plonger dans l’intimité de la Très Sainte Trinité. Parlant de l’usus antiquior dans sa Lettre d’accompagnement de Summorum Pontificum, le pape Benoît XVI disait que « aussitôt après le Concile Vatican II, on pouvait supposer que la demande de l’usage du Missel de 1962 aurait été limité à la génération plus âgée, celle qui avait grandi avec lui, mais entre-temps, il est apparu clairement que des personnes jeunes découvraient également cette forme liturgique, se sentaient attirées par elle et y trouvaient une forme de rencontre avec le mystère de la Très Sainte Eucharistie qui leur convenait particulièrement ». Il s’agit d’une réalité incontournable, un vrai signe de notre temps. Quand les jeunes sont absents de la sainte liturgie, nous devons nous demander : pourquoi ? Nous devons veiller à ce que les célébrations selon l’usus recentior facilitent aussi cette rencontre, qu'elles conduisent les gens sur le chemin de la via pulchritudinis qui mène au Christ vivant et à l’œuvre dans son Église aujourd’hui à travers ses rites sacrés. En effet, l’Eucharistie n’est pas une sorte de « dîner entre amis », un repas convivial de la communauté, mais un Mystère sacré, le grand Mystère de notre foi, la célébration de la Rédemption accomplie par Notre Seigneur Jésus-Christ, la commémoration de la mort de Jésus sur la Croix pour nous libérer de nos péchés. Il convient donc de célébrer la sainte messe avec la beauté et la ferveur d’un saint Curé d’Ars, d’un Padre Pio ou d’un Josemaria, et c’est la condition sine qua non pour qu’on parvienne « par le haut », si je puis dire, à une réconciliation liturgique (cf. Entretien au site internet catholique Aleteia, du 4 mars 2015). Je refuse donc avec vigueur que nous occupions notre temps en opposant une liturgie à une autre, ou le Missel de saint Pie V à celui du bienheureux Paul VI. Il s'agit plutôt d'entrer dans le grand silence de la liturgie, en se laissant enrichir par toutes les formes liturgiques, qu’elles soient d’ailleurs latines ou orientales. En effet, sans cette dimension mystique du silence et sans un esprit contemplatif, la liturgie demeurera une occasion de déchirements haineux, d'affrontements idéologiques et d’humiliations publiques des faibles par ceux qui prétendent détenir une autorité, au lieu d'être le lieu de notre unité et de notre communion dans le Seigneur. Ainsi, au lieu de nous affronter et de nous détester, la liturgie devrait nous faire parvenir tous ensemble à l’unité dans la foi et à la vraie connaissance du Fils de Dieu, à l’état de l’Homme parfait, à la plénitude de la stature du Christ… et, en vivant dans la vérité de l’amour, nous grandirons dans le Christ pour nous élever en tout jusqu’à Lui, qui est la Tête (cf. Ep 4, 13-15) [cf. Entretien à La Nef, octobre 2016, q. 9].
Comme vous le savez, le grand liturgiste allemand Mgr Klaus Gamber (1919–1989) désignait par le mot : « Heimat »cette maison commune ou « petite patrie » qui est celle des catholiques réunis autour de l’autel du Saint Sacrifice. Le sens du sacré, qui imprègne et irrigue les rites de l’Eglise est corrélatif, indissociable de la liturgie. Or, ces dernières décennies, de très nombreux fidèles ont été malmenés, voire profondément troublés par des célébrations marquées par un subjectivisme superficiel et dévastateur, au point de ne pas reconnaître leur « Heimat », leur maison commune, et pour les plus jeunes, de ne l’avoir jamais connue ! Combien sont partis sur la pointe des pieds, en particulier les plus petits et les plus pauvres d’entre eux ! Ils sont devenus en quelque sorte des « apatrides liturgiques ». Le « mouvement liturgique », auquel les deux formes sont associées, vise donc à leur rendre leur« Heimat », et, ainsi, à les réintroduire dans leur maison commune, car nous savons bien que, dans son œuvre de théologie sacramentaire, le cardinal Joseph Ratzinger, bien avant la publication de Summorum Pontificum, avait mis en évidence que la crise de l’Eglise et donc la crise et l’affadissement de la foi, provient en grande partie de la manière dont nous traitons la liturgie, selon le vieil adage : lex orandi, lex credendi. [...]"