Article rédigé par Jacques Bainville, le 10 novembre 2014
DOCUMENT | Plus qu’un autre, Jacques Bainville a montré les défaillances de l’État français dans la préparation de la guerre de 1914, ses faiblesses, ses illusions. « Les Républiques ont toujours tendance à vivre en vase clos »… et à se préoccuper avant tout de la redistribution des richesses, de créer « un chimérique Eden » sans s’inquiéter des loups. Mais la France survécut à la menace grâce à la volonté de son peuple, un peuple plus puissant que les faiblesses structurelles de son régime.
L'IRREDUCTIBLE IDEE DE SON INDEPENDANCE
« L’honneur de la nation française, à travers ses distractions et ses faiblesses, est d’avoir toujours gardé irréductible l’idée de son indépendance et le sentiment de ses devoirs. Nous avons montré […] les erreurs et les responsabilités des régimes d’opinion. Mais ce qu’il faut proclamer très haut, c’est que jamais peut-être dans l’histoire on n’aura vu un peuple en démocratie fournir autant de résistance que le nôtre aux principes de dissolution que ses institutions lui apportaient. Une démocratie qui, pendant quarante-quatre années [depuis 1870, Ndlr] a su accepter le lourd fardeau du service obligatoire et universel, c’est un des phénomènes les plus rares qu’il y ait dans les annales de l’humanité. « Elle n’a pas renoncé » La France, et elle s’en est aperçue cruellement, aurait dû s’armer, se préparer davantage pour résister à l’agression de l’Allemagne. Son grand titre de gloire, c’est qu’elle n’aura pas renoncé. Elle a assumé les sacrifices nécessaires. En 1914, elle a relevé le défi de l’Allemagne. Elle a fourni un effort, montré une persévérance qu’admirera l’histoire, une énergie qui fait honneur aux ressources de la race. Nous pouvons le dire hautement : aucun autre pays que la France n’était capable de cela. Quel n’eût pas été notre destin si, chez nous, la prévoyance eût été égale au courage, si le cerveau de l’État eût été aussi bon que le cœur des citoyens ? »
Jacques Bainville, Histoire de deux peuples, chap. VI, « La catastrophe ». |
Photo : Exposition du Musée des lettres et manuscrits,
"Entre les lignes et les tranchées", Centenaire.org
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