Article rédigé par Pierre-Olivier Arduin, le 05 mai 2014
Sous couvert de “santé sexuelle et reproductive”, les institutions internationales et la nébuleuse d’organisations non-gouvernementales (ONG) qui gravitent autour ne relâchent pas la pression sur les États en matière de contrôle des naissances et de réduction de la fécondité.
Pour parvenir à leurs fins, les agents de la planification familiale veulent opérer un « changement de paradigme », selon leur propre terminologie, afin de promouvoir l’avènement d’une nouvelle ère contraceptive. La révolution reproductive qu’ils préparent est un Diktat mondial qui vise aussi bien les pays émergents que les pays occidentaux.
Cette révolution silencieuse repose sur un cocktail de techniques redoutablement efficaces relevant du concept de « stérilisation temporaire ». Nom de code de ce nouveau programme « contraceptif » à l’échelle planétaire : LARC ou long-acting reversible contraceptives.
Derrière cet acronyme se cachent des produits présentés comme des contraceptifs à longue durée d’action mais réversibles, contrairement à la stérilisation définitive souvent mal acceptée par les femmes. La triade des LARC comprend le stérilet au cuivre, le stérilet hormonal au lévonorgestrel et l’implant sous-cutané libérant lui aussi du lévonorgestrel, principe actif de la pilule du lendemain.
L’avortement précoce
Méthodiquement passé sous silence, le mode d’action de ces trois dispositifs est en réalité interceptif ou contragestif, c’est-à-dire qu’il contrecarre la nidation d’un embryon et réalise donc l’avortement précoce d’un être humain dans la phase initiale de sa vie. C’est évidemment le cas des dispositifs intra-utérins, qu’ils soient au cuivre ou hormonaux, lesquels provoquent artificiellement l’inflammation de la muqueuse utérine et la rendent inapte à l’accueil de l’embryon humain.
Mais c’est également ainsi qu’agit l’implant inséré sous la peau du bras de la femme où le rôle anticonceptionnel (contre la fécondation), pas toujours fiable, est compensé par sa fonction contragestive. L’« avantage » de ces méthodes est leur caractère « non utilisatrices-dépendant » (une fois inséré, la femme n’a plus à y penser), le stérilet ayant une durée de vie de dix ans et l’implant de cinq ans.
L’accès universel aux LARC est au cœur d’une stratégie mondiale préparée par des ONG en pointe dans le combat anti-nataliste. Premiers visés, les pays pauvres ou émergents. C’est ainsi qu’en mai 2012, le Population Council et la Fédération internationale de gynécologie et d’obstétrique ont réuni des experts internationaux à Bellagio en Italie pour accélérer la diffusion des LARC dans ces pays et réaliser l’Objectif du Millénaire relatif à la couverture universelle des services de santé reproductive. Le Groupe Bellagio a obtenu que ce projet soit au menu de la Conférence internationale sur la planification familiale d’Addis-Abeba (Ethiopie) qui s’est tenue en novembre dernier.
Explosion des ventes de stérilets
Les chercheurs et médecins du Population Council sont par ailleurs sur le point d’élaborer un nouveau stérilet qui serait efficace pendant 13 cycles menstruels et permettrait d’éduquer – ou plutôt rééduquer – plus aisément les femmes des pays en développement en les obligeant à rencontrer annuellement une sage-femme ou un médecin.
Il ne faudrait toutefois pas croire que ce nouveau programme touche seulement les États pauvres de la planète. En raison des échecs contraceptifs à répétition enregistrés avec la pilule hormonale classique dans les pays occidentaux, on y observe déjà le même type de pression.
En France, la Haute autorité de santé recommande ainsi dans son dernier rapport une large utilisation des LARC, tandis que des professeurs universitaires de gynécologie veulent en faire une cause nationale. La crise sanitaire de l’année dernière, qui a touché les pilules de 3e et 4e générations en raison des risques d’accidents vasculaires qui leur sont associés, a d’ailleurs donné un formidable coup d’accélérateur à la nouvelle révolution « contraceptive » : selon l’Agence nationale de sécurité du médicament, les ventes de stérilet ont explosé en France de près de 47 % en un an et celles de l’implant se sont envolées de 30 %.
Ecologie anti-nataliste
Pour légitimer l’emploi des LARC à grande échelle, les multiples agents du contrôle mondialisé des naissances ont forgé un discours néomalthusien qui ne se contente plus, comme dans les années soixante et soixante-dix, de dénoncer la croissance démographique des pays pauvres, ennemie d’une planète qui ne peut plus nourrir ses enfants. Ils justifient aujourd’hui l’extension des techniques contragestives de planification familiale au nom du développement durable selon le nouvel adage : « Un monde toujours plus peuplé est un monde toujours plus pollué. »
L’écologie antinataliste est en passe de devenir le principal vecteur idéologique du birth control tant dans les pays du Nord que du Sud. Le but poursuivi de concert par les différents acteurs non gouvernementaux et les agences onusiennes est d’amener la communauté mondiale, d’abord à prendre conscience que la natalité est le principal facteur de désordre écologique, pour ensuite garantir politiquement et financièrement une disponibilité universelle des LARC au sein de tous les systèmes de santé nationaux de la planète.
Dès lors, on peut s’attendre à ce que la prochaine Conférence internationale Caire + 20 qui aura lieu en septembre, deux décennies après celle de 1994 sur la population, constitue l’occasion rêvée pour ses organisateurs de promouvoir massivement la contragestion pour toutes.
Pierre-Olivier Arduin est responsable de la commission bioéthique de l’Observatoire socio-politique du diocèse de Fréjus-Toulon.
Article à paraître également dans le mensuel La Nef N° 259 de mai 2014.
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