Article rédigé par Nicolas Bagory, le 23 février 2012
A l'orée de l'élection présidentielle, libertepolitique.com a recensé pour vous les propositions des différents partis sur l'Europe, cette sorte de machine un peu bizarre (sui generis, dit-on) qui suscite incompréhension, méfiance et vergogne dans les chaumières. Presque tous les candidats se font le relai de cette colère sourde.
Front National
Marine Le Pen se veut l'avocate d'un peuple oublié par une Europe qui se construit « sans [lui]» voire « contre [lui] », et en particulier du peuple français, lequel serait le plus pénalisé par l'Europe actuelle.
Selon elle, « il convient [donc] d’initier une renégociation des traités afin de rompre avec la construction européenne dogmatique, en total échec. Il faut désormais jeter les bases d’une Europe respectueuse des souverainetés populaires, des identités nationales, des langues et des cultures, et qui soit réellement au service des peuples par des actions concrètes.
Un ministère des Souverainetés coordonnera la renégociation des Traités et la restauration de notre souveraineté nationale dans l’ensemble des domaines où elle a disparu. »
A terme, la France doit :
- retrouver la maîtrise de ses frontières au sein d'une association libre d'Etats européens ;
- rétablir la primauté de son droit national sur le droit européen ;
- retrouver la maîtrise de sa monnaie et de sa politique monétaire ;
- conduire de vrais projets innovants, avec les autres pays, au service des peuples (comme le furent Ariane ou Airbus) ;
- avoir une contribution nette nulle au budget européen.
Debout La République
Comme son homologue du Front National, Nicolas Dupont-Aignan est souverainiste. Il commence par « dénoncer les traités et bâtir une Europe des Etats et des coopérations ».
Le candidat de Debout La République souhaite donc négocier un nouveau traité confédéral «qui rende aux États-nations leur liberté d’action en délimitant strictement les compétences de la Coopération des Etats Européens (CEE) », par la création de nouvelles institutions.
Ce traité se fonderait sur quatre principes :
- l'adhésion d'un État à la Confédération est révocable unilatéralement par le pays qui le souhaite ;
- la Confédération est une association d'États qui respecte la primauté des peuples ;
- toute décision de la Confédération mettant en cause les orientations de caractère fondamental ou portant atteinte à la personnalité ou aux intérêts primordiaux des nations doit être prise à l'unanimité ;
- afin d'assurer l'efficacité de l'action commune, des délégations de souveraineté révocables et sectorielles sont accordées par les États à la Confédération.
L'Europe serait ainsi mieux délimitée (géographiquement comme juridiquement) laissant la France libre de poursuivre d'autres partenariats (notamment autour de la Méditerranée).
Union pour la Majorité Populaire
Le projet européen de l’UMP pour l’élection de 2012 n’a pas encore été officiellement présenté. Cependant, l'action de Nicolas Sarkozy pendant son premier mandat, ainsi que le travail avancé par l'UMP nous permettent de deviner quelle en serait la dynamique :
- une Europe qui s'organise autour du couple franco-allemand. En 2007, le Président avait rencontré le jour même de son investiture la chancelière allemande, Angela Merkel. Aujourd'hui, c'est avec elle qu'il cherche à sauver l'euro.
- bien plus même, Nicolas Sarkozy veut que la France soit moteur du mouvement européen. Il l'a prouvé à de maintes reprises (présidence française en 2008, mise en place du traité de Lisbonne en 2009, plan de sauvetage de la Grèce...)
- une harmonisation des traités et des institutions. Très critiqué en France, parce que fédéraliste, le traité de Lisbonne présente l'avantage de simplifier le fonctionnement des institutions européennes. Les efforts de Nicolas Sarkozy et de son parti vont dans ce sens.
Le Président a également relancé le processus de Barcelone avec la création de l’Union pour la Méditerranée en juillet 2008. Ce projet serait mené avec encore plus d'ambitions.
Mouvement Démocrate
François Bayrou dénonce l'illisibilité du projet européen depuis le traité de Nice. « C'est pourquoi il faudra des changements institutionnels et surtout des pratiques institutionnelles.»
Il plaide pour une Europe plus démocratique et condamne le « condominium franco-allemand à la tête de l’Europe », « erreur que nous paierons très cher ! » Plutôt que d'installer des dirigeants « sans notoriété » à la tête des institutions européennes, il vaudrait mieux donner à l'Europe un vrai président, élu au suffrage universel, « qui donnera à l'Europe un visage et une vision de l'avenir, et auprès de qui les citoyens puissent se faire entendre. »
« L'Europe ne s'en sortira qu'avec les peuples » : moins de techocratie, plus d'élections.
Parti Socialiste
François Hollande veut réorienter la construction européenne en trois propositions :
- « Je proposerai à nos partenaires un pacte de responsabilité, de gouvernance et de croissance pour sortir de la crise et de la spirale d’austérité qui l’aggrave. Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre 2011 en privilégiant la croissance et l’emploi, et en réorientant le rôle de la Banque centrale européenne dans cette direction. Je proposerai de créer des euro-obligations. Je défendrai une association pleine et entière des parlements nationaux et européen à ces décisions. Cinquante ans après le traité de l’Élysée, je proposerai à notre partenaire l’élaboration d’un nouveau traité franco-allemand. »
- « Je défendrai un budget européen (2014-2020) au service des grands projets d’avenir.[...]»
- « Je proposerai également une nouvelle politique commerciale pour faire obstacle à toute forme de concurrence déloyale et pour fixer des règles strictes de réciprocité en matière sociale et environnementale.[...]»
Europe Ecologie Les Verts
Les écologistes, c'est bien connu, sont de «doux» rêveurs. Et pour eux, «relancer le rêve européen» c'est arrêter les demi-mesures et se diriger ouvertement vers le fédéralisme.
Ils ont fait trois rêves :
- une Europe engagée sur la voie de la transformation écologique et sociale ;
- une Europe fédérale, démocratique et citoyenne ;
- une europe solidaire.
Eva Joly a su redescendre les pieds sur terre pour proposer un programme conséquent par ses propositions et pas si oniriques par ses implications.
Le Parti de Gauche
En bref, le programme de Jean-Luc Mélenchon se réduit à un leitmotiv : la sortie du traité de Lisbonne. C'est l'urgence, ainsi que la remise en cause du « Pacte pour l’Euro+ » et la création d’un Fonds de développement social, écologique et solidaire européen.
Cela fait, il sera temps de se battre pour présenter un nouveau traité européen et refondre les statuts et missions de la BCE.
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