Après s'être attaqué aux pêcheurs, le commissaire autrichien Franz Fischler s'en prend aux agriculteurs. La réforme radicale de la PAC qu'il a présentée à Bruxelles le 10 juillet, sous le nom de " révision à mi-parcours de l'agenda 2002 " est inacceptable dans sa méthode, son contenu et sa stratégie.
Sur la méthode, rappelons que le Sommet de Berlin avait arrêté en 1999 les règles du jeu de la PAC pour six ans. C'était un engagement pris par les États membres vis-à-vis de leurs agriculteurs. Mais le commissaire Fischler entend transformer l'évaluation à mi-parcours (2003) en nouvelle réforme. Or les agriculteurs ont besoin de visibilité dans la durée. Il est inadmissible que l'on manipule à chaque instant les règles du jeu, alors que les exploitations ont des investissements, des emprunts, et que les jeunes qui s'installent ont besoin d'un environnement sûr et stable.
Sur le contenu, ce n'est pas la bonne réforme qui est entreprise. Sous prétexte de " découplage ", la proposition Fischler accentue le divorce entre l'acte de production et le revenu de l'agriculteur. Au lieu d'être rémunéré pour son produit par le consommateur, l'agriculteur sera encore plus dépendant du contribuable, ce qui n'est pas tenable à long terme. En outre, la réforme Fischler va dresser les États contributeurs contre les États bénéficiaires. Elle enferme les agriculteurs dans une impasse. La réforme à entreprendre, c'est d'imaginer une autre préférence communautaire permettant de répondre aux exigences de qualité, de sécurité et de traçabilité du consommateur européen.
Sur la stratégie, le commissaire Fischler commet la même erreur que Leon Brittan en 1992. Il justifie la réforme par les échéances 2004 des négociations de l'OMC. L'Europe désarme avant la bataille, alors que les États-Unis font le contraire : ils procèdent, avec le Farm Bill au recouplage des aides et des prix.
Il est à noter que seuls les Verts et les libéraux ont soutenu le projet Fischler lors de sa présentation devant le Parlement européen.