Comment la France est devenue une puissance spatiale

Source [Conflits] : Le 26 novembre 1965, la France devient la troisième nation à placer sur orbite par ses propres moyens un satellite (A1 ou Astérix), après l’URSS (1957) et les États-Unis (1958). Les années 1950 sont cruciales pour comprendre le succès de 1965 et l’influence française dans la construction de l’Europe spatiale.

Par Philippe Varnoteaux, docteur en histoire et spécialiste de l’histoire de la conquête spatiale française, membre de l’Institut français d’histoire de l’espace et chargé de cours à Sciences-Po Reims. Il est l’auteur ou coauteur de plusieurs ouvrages dont le dernier intitulé : Hammaguir, première base spatiale française (Ginkgo éditeur, 2024).

Les photographies présentes à l’intérieur de l’article ont été fournies par Philippe Varnoteaux.

La Seconde Guerre mondiale voit l’émergence d’armes nouvelles, dont les missiles. Lors de la défaite de l’Allemagne, les Alliés découvrent l’extraordinaire avance que celle-ci a dans ce domaine. Américains et Soviétiques saisissent matériels et spécialistes allemands à travers respectivement les opérations Paperclip et Osoaviakhim.

L’héritage allemand

Les Français adoptent la même démarche avec leurs « missions scientifiques ». Ainsi, les armées françaises s’intéressent aux missiles, mais selon des démarches différentes : l’armée de terre via le Centre d’études des projectiles autopropulsés (CEPA) de la DEFA souhaite reconstruire des V2 ; l’armée de l’air via le service technique de l’aéronautique de la DTI engage un vaste programme visant à développer de nouveaux engins-fusées classés en air-air, air-sol, sol-air, sol-sol, cible télécommandée ; quant à la marine, elle construit des engins visant à couvrir tous les domaines (air-mer, mer-air, surface-surface). Concernant les spécialistes allemands récupérés, certains sont installés au Laboratoire de recherches balistiques et aérodynamiques (LRBA) de Vernon (armée de terre) pour reconstituer des V2, comme Karl Heinz Bringer, spécialiste de la propulsion, qui a contribué à élaborer les moteurs des Véronique, Diamant et même Ariane 1.

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