Ne boudons pas notre plaisir. Une campagne officielle de prévention sur le cannabis, relayée à la télévision (six films), à la radio (huit spots) et dans la presse écrite, débute mardi 8 février et ose enfin la vérité, toute la vérité, enfin presque.

 

Le cannabis est une drogue pas si anodine que cela. Pire, c'est une drogue dangereuse, désocialisante, hautement cancérigène, susceptible d'entraîner des psychoses, et des troubles cérébraux irréversibles. La liste n'est pas close de ses méfaits qui vont du suicide en passant par la hausse de la criminalité routière. D'autres sont encore à découvrir.

Depuis cinq ans, le collectif Drogue-Danger-Débat réclamait cette campagne, sans jamais trouver d'échos auprès des instances publiques. "Vous êtes des idéologues", "fumer, n'est pas si grave", "vous diabolisez le cannabis", pouvait-on entendre dire quand nous avancions à nos contradicteurs des études scientifiques qui montraient la dangerosité de cette drogue.

Il aura fallu attendre cinq ans – davantage s'il l'on tient compte que depuis des années et avant nous et des médecins cancérologues, pharmacologues, des chercheurs courageux, le Pr. Nahas, le Pr. Trouvé, le Dr Hovnanian en tête, des thérapeutes, à l'image de Jean-Luc Maxence, tiraient la sonnette d'alarme quand d'autres, plus inconscients, ou conscients de la bataille idéologique qui se jouait autour du cannabis , n'avaient de cesse d'encenser cette drogue festive – pour que cette campagne voit enfin le jour. Cinq ans de perdu peut-être. Il sera toujours temps de demander des comptes au pouvoir public pour son inaction, sa léthargie. Cinq ans qui ont vu la France devenir le premier pays consommateur de cannabis en Europe, la consommation y ayant doublé entre les années 1990 et 2000 si bien que l'on considère aujourd'hui que plus de 50 % des jeunes de 18 ans ont expérimenté le cannabis et que 20 % d'entre eux sont des fumeurs réguliers.

Aujourd'hui, cette campagne d'envergure marque une prise de conscience politique et sanitaire de l'enjeu qui se présente à nous. 450 000 consommateurs en fument quotidiennement, 850 000 régulièrement. Le cannabis est devenu un problème de santé public qu'on ne peut plus taire. C'est tout le mérite de cette campagne de faire parler de jeunes consommateurs, trompés, abusés par des marchands de morts qui leur promettaient le bonheur. Le résultat des courses est accablant pour eux. Il suffit de les entendre pour comprendre. Le cannabis fait la grimace devant ces témoignages. Bad trip pour le cannabis.

Pourtant, aussi louable que soit cette campagne, on ne peut s'empêcher de se poser des questions. 10 millions d'euros ont été engagés dans cette action conjointe du Ministère des Solidarités, de la Santé et de la Famille, la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) et l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) (campagne publicitaire, mise en place d'un numéro spécifique " Ecoute cannabis ", brochures...).

Bien.

Mais qu'en est-il des subventions qu'accorde la Mildt à des associations comme Techno-plus qui continuent d'encourager (ou d'accompagner) la consommation des drogues ? S'il revient toujours aux mêmes personnes d'assurer, avec la bénédiction de la Mildt, la prise en charge, en aval, des consommateurs, il y a fort à parier que ceux-ci n'arrêtent jamais parce que leur discours n'a pas changé. Pour eux, la cannabis est une drogue douce. C'est à peine s'ils reconnaissent parfois que l'on peut se droguer durement avec une drogue douce ! Qu'en est-il, enfin, d'une véritable politique européenne de lutte contre le cannabis quand il est possible de se rendre librement à Amsterdam pour fumer son petit joint, quand la Pologne annonce cette semaine qu'elle compte dépénaliser prochainement la consommation du cannabis.

Le débat reste plus que jamais ouvert. C'est pourquoi le collectif Drogue-Danger-Débat n'en restera que plus vigilant.

*Raphaël Stainville est le directeur du collectif Drogue-Danger-Débat, webmestre de www.drogue-danger-debat, partenaire de Libertépolitique.com.

> D'accord, pas d'accord ? Envoyez votre avis à Décryptage

>