Source [L'Homme Nouveau] La bataille juridique autour de la possibilité de la reprise du culte public suscite autant d'âpres discussions à l'extérieur qu'à l'intérieur même de l'Église. En témoigne un récent texte publié par La Croix qui met en cause les fidèles qui réclament la possibilité d'assister à la messe. Un texte problématique à plusieurs égards, comme le montre le Frère Laurent-Marie Poquet du Haut-Jussé.
La page Débats du site du quotidien La Croix nous propose une réflexion de Monique Baujard, doctorante (sic) et de d’Anne-Marie Pelletier, bibliste, intitulée « Hors de la messe, pas de salut[1] ? ». Pour les auteurs de cette tribune, les catholiques qui réclament le droit à la messe seraient mieux inspirés (c’est le cas de le dire) de se joindre aux pouvoirs publics et à leurs concitoyens pour défendre « une juste laïcité », au lieu de concourir à une « trumpisation des esprits » par des revendications frileusement identitaires. Les auteurs reconnaissent que le Christ est bien à la source de l’engagement des chrétiens et du témoignage d’Espérance qu’ils doivent apporter en cette période troublée, à des populations traumatisées par la crise sanitaire et le terrorisme, « à condition cependant de ne pas laisser contaminer cette vérité par les étroitesses, qui voudraient qu’il n’y ait de vie chrétienne qu’à fréquenter les églises selon les protocoles du temps ordinaire. Et qui prétendrait en particulier assigner la relation au Christ à une participation dévote à la messe célébrée par des prêtres en présentiel ou en virtuel… ». La crise actuelle, avec l’interdiction de la célébration publique du culte, devrait être l’occasion de redécouvrir la place centrale de la Parole de Dieu et du service fraternel, lieux de la présence du Christ. La solidarité affirmée et vécue avec ceux qui souffrent et avec la société en général nous donnent d’être des fidèles du Christ, « la véritable fidélité aujourd’hui n’[étant] pas dans la défense crispée de pratiques auxquelles nous tenons légitimement mais qui, dans leurs formes traditionnelles, sont en train de s’effondrer ».
Auraient-elles oublié l'enseignement du Concile ?
Le ton employé, les arguments utilisés, les faux dilemmes exposés, manifestent de fait une étonnant alignement sur la pensée faible dominante. S’il est bien vrai que la grâce salvatrice peut atteindre chacun par des canaux détournés lorsque les moyens ordinaires de sa communication sont empêchés, il n’empêche que la mission de l’Église a toujours été de lutter pour établir ou rétablir ces moyens. Le réalisme pastoral, comme d’ailleurs la grande loi de l’Incarnation, nous rappellent qu’il ne peut y avoir d’engagement chrétien fécond ni de rayonnement apostolique sans un véritable enracinement dans la vie sacramentelle.
De façon d’ailleurs étonnante nos deux auteurs semblent faire bon marché de deux enseignements fondamentaux et incontestables du dernier Concile. D’une part toute l’activité de l’Église, son engagement social et missionnaire, n’a pour but que de permettre à ses enfants et à ceux qu’Elle évangélise, de participer à la liturgie, et singulièrement au sacrifice eucharistique, qui rend présent le mystère pascal du Christ, en dehors duquel il n’y a pas de salut (cf. Sacrosanctum Concilium, 5-9) ; d’autre part, le témoignage unanime de la Révélation biblique, dans la grande diversité des auteurs, des genres littéraires, des histoires et des récits, affirme la souveraineté de Dieu et la centralité du Salut en Jésus-Christ. Les auteurs invoquent l’exemple du Prophète Jérémie, envoyé par Dieu pour avertir le peuple qu’il ne peut se fier au seul culte célébré au Temple de Jérusalem, mais qu’il doit aussi se convertir, en obéissant à la Loi du Seigneur, singulièrement en refusant tout culte idolâtrique (cf. Jérémie, chap. 7). Cette instrumentalisation du texte révélé, au détriment de la signification plénière de la Révélation biblique, montre aussi qu’est passée sous silence la différence spécifique entre le culte vétéro-testamentaire et le sacrifice existentiel du Christ, le Verbe divin fait homme, qui nous obtient le salut et le don de la vie divine, sacrifice rendu présent chaque fois que la messe est célébrée, pour le bénéfice de ceux qui y participent et de ceux pour qui la messe est célébrée.
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