Les sénateurs ont voté en deuxième lecture le projet de loi relatif à la bioéthique, plus proche du vote des députés et notamment des amendements introduits par les députés le 8 avril dernier, comme le demandait d'Elizabeth Montfort, Porte-parole de la Fondation de Service politique, dans sa lettre du 7 juin. La Fondation de Service politique note que, grâce à plusieurs parlementaires courageux qui ont su faire évoluer le texte, la prise en compte des dérives eugéniques du DPN a été rappelée et le principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon a été maintenu par les sénateurs. Une nouvelle orientation vers un plus grand respect de nos principes juridiques fondateurs se dessine-t-elle, alors que plusieurs dispositions restent encore à améliorer ?
Les dérives eugéniques du DPN n'ont pas disparu :
L'un des enjeux cruciaux de la révision de la loi de bioéthique est l'article 9 relatif au diagnostic prénatal (DPN). La prise de conscience par certains parlementaires des dérives eugéniques du DPN a été réelle, notamment grâce à l'alerte donnée par de nombreuses associations de parents d'enfants porteurs d'un handicap ou de gynécologues qui contestent l'obligation du tout dépistage. En seconde lecture, les députés ont ainsi adopté un amendement du rapporteur Jean Leonetti disposant que toute femme enceinte reçoit (...) une information loyale, claire, et appropriée sur la possibilité de recourir, à sa demande, à des examens de biologie médicale et d'imagerie permettant d'évaluer le risque que l'embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de la grossesse , marquant leur souci de redonner une liberté de décision à la patiente. Toujours pour tenter de rééquilibrer la relation entre la femme enceinte et le médecin, la sénatrice Anne-Marie Payet a fait adopter mercredi 7 juin avec sa collègue Marie-Thérèse Hermange un amendement qui substitue au terme appropriée celui d' adaptée à sa situation .
De même, le texte voté par les députés en première lecture, préconisait qu' en cas de risque avéré, la femme enceinte (...) reçoive, sauf opposition (...), des informations sur les caractéristiques de l'affection suspectée, les moyens de la détecter et les possibilités de prévention, de soin ou de prise en charge adaptée du fœtus ou de l'enfant né. Une liste des associations spécialisées et agréées dans l'accompagnement des patients atteints de l'affection suspectée et de leur famille leur est proposée.
Les députés ont également mentionné le caractère non obligatoire de ces examens . Car la tentation actuelle observée chez certains professionnels de la grossesse est l'insistance déplacée qu'ils déploient à l'encontre des femmes pour leur faire subir des examens contre leur volonté précise Pierre-Olivier Arduin, expert de la Fondation de Service politique.
Ces mesures seront-elles suffisantes pour mettre fin aux dérives eugéniques ? Même si le diagnostic n'est pas en lui-même eugénique comme le souligne Francis Jubert, président de la Fondation de Service politique lors de son interview au 13h de France 2 vendredi 10 juin 2011, l'eugénisme est dans la décision prise après la connaissance d'une affection grave. Dans un contexte où les pressions eugéniques sont objectivement très fortes, c'est à ce stade que se pose la question éthique. Non à l'eugénisme, oui à l'information pour plus d'accompagnement des parents à l'accueil du nouveau-né atteint d'une affection grave.
Le maintien du principe d'interdiction de la recherche sur l'embryon est-il satisfaisant ?
La recherche sur l'embryon est le deuxième sujet très délicat. La Fondation de Service politique tient à saluer l'intervention du sénateur Jean-Claude Gaudin qui a repris la position des députés tout en ajoutant que si le principe d'interdiction est réaffirmé, celui-ci ne doit pas être seulement symbolique, il doit donner un sens à la recherche. La loi doit privilégier toute alternative dans le domaine de la thérapie, la modélisation des maladies, les essais de médicaments à partir de cellules souches adultes, issues du sang de cordon ou iPS. Pour l'amélioration des techniques de l'AMP la loi doit continuer les expériences sur les embryons ou les cellules souches embryonnaires des animaux. Comme le souligne Eric Berdoati, député des Hauts-de-Seine, il était important de réaffirmer les principes éthiques qui forment le socle de notre législation actuelle et notamment l'interdiction des manipulations génétiques. Les lois de bioéthique servent les progrès des techniques biomédicales, en conciliant éthique et progrès scientifique. La Fondation rappelle que l'utilisation des embryons et des cellules souches embryonnaires humaines sont devenues inutiles puisque, pour chaque programme de recherche, il existe des alternatives éthiques.
Afin de demeurer en cohérence avec nos principes juridiques fondateurs, la Fondation de Service politique lance un appel solennel à la Commission Mixte Paritaire (CMP) chargée de valider définitivement la rédaction de la loi relative à la Bioéthique, à partir du 15 juin, lui demandant de modifier le projet ainsi :
Sur le DPN, (article 9, al 4):
Une information relative à des examens de biologie médicale et/ou d'imagerie, loyale, claire et adaptée à sa situation, peut être proposée, dans le respect des articles R. 4127-8 et R. 4127-35 du code de la santé publique, à la femme enceinte au cours d'une consultation médicale dans le but de rechercher si l'embryon ou le fœtus présente une affection d'une particulière gravité.
Nous attendons de nos parlementaires :
un signal fort qui traduise le changement de regard de la société sur les enfants à naître porteurs d'un handicap et le respect inviolable de la dignité de tout être humain, notamment l'embryon. L'enjeu est bien celui d'un surcroît de conscience morale à chaque fois qu'un progrès scientifique ou technique ouvre de nouvelles perspectives.
CONTACT : Astrid Cœurderoy
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