"Votre fille." Conte de Noël vietnamien

Lisez cette histoire tout à fait extraordinaire. Elle s’est passée au Nord-Vietnam dans les années soixante-dix. Un président du comité populaire — l’équivalent d’un préfet — avait décidé d’interdire toute manifestation religieuse sur les lieux publics.

Les chrétiens vietnamiens dont la foi est l’héritage du sang des martyrs avaient décidé fermement de maintenir une charmante tradition pour la nuit de Noël. Celle-ci consistait à accompagner la Sainte Famille dans les rues jusqu’au chœur de la cathédrale, à 10 km de la ville ! Quelques dizaines de milliers de paysans chantaient joyeusement Minuit chrétien

Le président du comité populaire voulait mettre fin à cette démonstration provocatrice de « l’opium du peuple » et mit sa police en travers du chemin menant à l’Église. Les matraques que ces derniers frappaient en cadence sur leurs boucliers pour effrayer les fidèles… rythmaient les chants.

Le chef de la police exaspéré avait bien l’intention de ne pas faire de quartier. Il était fermement décidé à enfoncer la foule à coups de barre de fer et de nerfs de bœuf, quelque soit l’âge et le sexe de ses victimes. Il voulait plier cette masse humaine pourtant paisible mais déterminée. Ses hommes qui, comme toutes les polices du monde obéissent aux ordres,

Sur un grand buffle

La tension montait de minute en minute. La Sainte Famille parut en tête du cortège. Marie, si belle, si jeune et si menue en Hao Dzai, assise en amazone sur un grand buffle qui marchait pesamment, lentement, solennellement, fermement face aux Can Bo de plus en plus nerveux.

Elle était couverte d’un immense tulle bleu. Dans son voile, un adorable bébé vagissait. Face à Marie, le commissaire tituba. Il se ressaisit et hurla au trio qu’il allait charger…

Le temps passa… et la foule se retrouva chantant Noël dans la cathédrale illuminée de mille flambeaux.

Le soir même dans le bureau du comité populaire, le président vociférait contre son commissaire et les quelques officiers pétrifiés. Il les menaçait des pires punitions et de la prison : « Mais qu’est-ce qui vous a pris de céder devant trois vieillards et trois moufflets ?

— Votre fille.

— Comment ma fille ?

—    Oui c’était votre fille et votre petit-fils qui étaient Marie et Jésus ! »

 

 

Yves Meaudre est directeur général des Enfants du Mékong.

 

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Enfnats du Mékong.