Source [Atlantico] : L’interview fleuve de Nicolas Sarkozy dans le JDD a provoqué beaucoup de remous à droite. Mais la culture politique française est-elle compatible avec une logique de véritable coalition ?
Atlantico : Le président Emmanuel Macron devrait se tourner vers la droite « de façon plus franche », a exhorté dimanche son prédécesseur Nicolas Sarkozy, en lui suggérant de conclure « un accord politique » pour pallier son absence de majorité absolue à l’Assemblée. Comment imaginer que cela puisse se faire par un simple accord de gouvernement alors que ces sujets ont largement été laissés de côté pendant la campagne ?
Christophe Boutin : En dehors d’autres considérations, si l’on tente de faire une analyse politique des récentes déclarations de l’ancien Président, on trouve un bilan, celui qu’il fait des attentes des Français, et les conséquences de ce bilan en termes de positionnement politique.
Un bilan portant sur les attentes des Français, puisque, selon Nicolas Sarkozy, « la France est aujourd'hui majoritairement du côté du parti de l'autorité, de la fermeté, de la liberté ». On aura rarement enfoncé avec une telle violence les portes ouvertes, car il suffit à un étudiant de première année de compiler les résultats des différents sondages de ces derniers mois pour constater qu'il y a effectivement une attente très forte autour de ces trois éléments. Une attente d'autorité, c'est-à-dire d'un pouvoir qui ait clairement défini ses objectifs et qui ose ensuite les réaliser. Une attente de fermeté, à l'encontre bien sûr de ceux qui ont transformé le trop fameux « sentiment d'insécurité » en une sinistre réalité quotidienne, mais aussi de ceux qui abusent de leur pouvoir de blocage pour perturber de manière excessive la vie de la nation tout entière. Une attente de liberté enfin, très claire elle aussi, et d'autant plus forte que les atteintes aux libertés et les restrictions dans tous les domaines sont devenus monnaie courante depuis le début du premier quinquennat d'Emmanuel Macron.
Une fois posé cette approche, dont on constatera donc l’aspect résolument novateur, de « la matrice du pays telle qu’[il] la ressen[t] », l’ancien président de la République cherche à nommer la composante politique française qui représenterait le mieux cette triple demande d’autorité, de fermeté et de liberté. Pour lui, cet « axe stratégique du pays » est celui que l’on peut appeler « centre droit, centre, droite républicaine, peu importe ». Que dire ? On en retire d’abord la preuve que l’ajout de l’adjectif « républicaine » au terme « droite » ne vise qu’à faire passer cette dernière sous les fourches caudines du centre – l’autorisant tout au plus à être un centre-droit. Ce n’est pas non plus une surprise majeure, au vu de ce qu’a été l’UMP puis les Républicains, mais cela a le mérite de la clarté. Quant à l’adéquation ensuite entre les projets centristes et les trois valeurs évoquées, il faut bien dire que Nicolas Sarkozy n’est guère convaincant. Parce que la demande de liberté de la part du centre-droit vise essentiellement les libertés économiques, beaucoup plus que les libertés politiques ou même publiques ; ou parce que le centre-droit n’a guère brillé, dans les décennies précédentes, par sa recherche d’autorité, et moins encore par sa fermeté.
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