La diplomatie russe d’hier pour servir aux temps présents

Source [Revue Conflits] La Russie est redevenue un acteur incontournable dans les équilibres mondiaux. Si des régimes politiques profondément différents s’y sont succédés au XXe siècle, la conception russe de la géopolitique revêt une incontestable permanence depuis les Czars. Deux ouvrages récents permettent de comprendre cette conception géopolitique et sa traduction dans le gouvernement.

En 2014, sous l’auspice des troubles en Ukraine, Vladimir Poutine permit le retour de la Crimée à la Russie. L’événement pris le monde de court. Pourtant, déjà en 1783, grâce à Catherine II, la Crimée était intégrée à cette même Russie. Sergeï Lavrov, perpétuel ministre des Affaires étrangères de Vladimir Poutine déclarait alors : « La Crimée a beaucoup plus d’importance pour la Russie que n’en ont les Malouines pour le Royaume-Uni ». 

Celui qui ignore l’histoire est bel et bien condamné à la subir de nouveau. Le professeur Anna Gnedina-Moretti, d’origine russe, par son ouvrage Catherine II, nous en met à l’abri. Comprendre l’histoire sur le temps long, à travers la vie et l’œuvre de l’une des plus célèbres impératrices est chose fondamentale, passionnante même, grâce au présent ouvrage. Pourquoi Catherine II entre-t-elle en contact avec Pasquale Paoli, Corse des Lumières, si ce n’est pour résoudre le problème qui s’est imposé à tous les dirigeants russes, aujourd’hui encore : Comment donner à la Russie un accès et des ports dans les mers chaudes ?

Alors que les relations entre Russie et la Turquie connaissent des tensions notables aujourd’hui, il est, là encore, difficile de ne pas voir l’ombre de l’impératrice sur le Kremlin. Si les aspects diplomatique et géopolitique nous intéressent pour des raisons évidentes, la politique intérieure de l’impératrice n’est pas oubliée, bien au contraire. Dans cet ouvrage érudit, mais accessible à tous, Anna Gnedina-Moretti, nous dévoile une Catherine II réformatrice et législatrice, dont le dessein est de moderniser un empire féodal, et par nombre d’aspects encore archaïque. Ça sera le grand projet du Nakaz, code de lois dont un quart est rédigé par Catherine en personne, et destinée à révolutionner l’empire des Czars. C’est le triomphe des Lumières, qui louent son action. Mais réformer un si vaste empire est peut-être plus compliqué que d’en triompher d’un autre. L’histoire, encore une fois, se répète. Qu’il s’agisse de l’Empire russe, de l’URSS, ou de la Fédération de Russie, réformer a toujours été à la fois une impérieuse nécessité mais aussi un danger potentiellement fatal. Les réformes de la Grande Catherine se heurtent à la réalité du terrain et n’aboutèrent pas aux résultats espérés. Pour vaincre les défis intérieurs comme extérieurs, il faut s’entourer de gens de valeur. Si Anna Gnedina-Moretti a quitté sa Russie natale, au moment de ses études, pour s’installer en Corse, à l’inverse, des Corses ont quitté l’ile pour servir la Russie. C’est le cas de Carlo Andrea Pozzo di Borgo. Cousin de Napoléon, noble, quoique pauvre, il fut élevé dans la Casa Bonaparte par Laetizia. Si son cousin ressuscita l’empire romain sous les plis du drapeau tricolore, lui, deviendra selon Marx « le plus grand diplomate russe de tous les temps ». 

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