Euthanasie : mettre fin aux souffrances, mais de qui ?

[Mis à jour, 17/12/13] — En Belgique, le Sénat a adopté ce 12 décembre une proposition de loi étendant le champ légal de l’euthanasie aux mineurs de plus de 12 ans atteints d’une maladie déclarée « incurable ». En France, une conférence de [18] citoyens [représentatifs (sic)] préconisent la légalisation du suicide assisté et l'exception d'euthanasie.

Le texte belge — qui doit être encore confirmé par les parlementaires — prévoit qu’un mineur peut demander à être mis à mort s’il est exposé à des souffrances physiques insupportables et inapaisables en phase terminale : il doit pour cela être conseillé par une équipe médicale et recevoir l’accord de ses parents…

 À Bruxelles, les représentants des religions chrétienne, juive et musulmane ont exprimé leur « vive inquiétude face au risque de banalisation » de l’euthanasie. Si ce projet de loi était adopté définitivement, la Belgique suivrait l’exemple des Pays-Bas.

Bonne mort, pour qui ?

Revoici donc posé, toujours dans sa redoutable ambiguïté, le problème de l’euthanasie, terme dont la signification étymologique est « bonne mort »… Mettre fin à des souffrances « insupportables », qui n’applaudirait pas de prime abord à une intention si bonne ?

Mais ici deux questions se posent : d’abord, la mise au point des médicaments « analgésiques » modernes contre la douleur n’a-t-elle pas progressé et ne progresse-t-elle pas encore, de façon à supprimer ou à endiguer la douleur physique dans des proportions grandissantes jusqu’au seuil du tolérable ? La réponse appartient probablement ici à l’ensemble du corps médical.

Deuxième question, qui concerne la société tout entière, et qui doit exclure tout faux semblant et… toute hypocrisie : mettre fin à la souffrance, certes, mais à la souffrance de qui, au fait ? Souvent, c’est le spectacle des malades réputés – à tort ou à raison – « incurables », et exposés à la douleur et à la dégradation physique, qui devient très difficile à supporter… pour leur entourage.

Qu’il s’agisse de leur famille, de leurs proches, ou même parfois… de certains membres du personnel soignant, dont c’est pourtant la mission de surmonter l’épreuve de cette confrontation.

Le drame de Chambéry

À Chambéry, une aide-soignante qui avait empoisonné six personnes âgées dans une maison de retraite vient d’être arrêtée et mise en examen par la justice. Elle leur avait administré un « cocktail » de très forts médicaments psychotropes destinés aux troubles mentaux… Elle-même devenue fragile, cette auxiliaire du personnel médical avait été récemment traumatisée par la mort pénible de sa vieille mère. Son geste répété n’en est pas moins terrifiant : il a enlevé… le droit de vivre à des vieillards encore capables de vivre sans trop souffrir, en l’occurrence… 

Mais le plus affreux, c’est cette banalisation de la mise à mort des vieillards et des grands malades, fussent-ils désormais demain, peut-être, des enfants. Tuer, au lieu de soigner, c’est régler le compte des malades, mais cela ne relève plus de la médecine.

Désormais, en Europe, on risque de se donner l’âpre liberté de tuer les personnes dont la douleur est jugée « insupportable ». Insupportable ou encombrante ? Dans une société qui, comme le dit le pape François, transforme trop d’êtres humains en « déchets », rejetés comme tels, ne serait-ce que sur le plan socio-économique…

D.L.

 

 

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