Les gauches bougent, elles voient rouge !

Jean-Luc Mélenchon a probablement sauvé électoralement la gauche deux fois avec la Nupes puis le Nouveau Front Populaire : il devrait à l’avenir faire sans coalition. Les forces social-démocrate et atlantistes pourraient désormais jouer leur carte et se séparer des Insoumis jugés de plus en plus infréquentables.

Véritable vaisseau amiral de la gauche, le navire mélenchoniste a sauvé électoralement une gauche moribonde. Malmenés par le quinquennat Hollande et mis en déroute par l’avènement du macronisme, les socialistes ont préservé leurs baronnies mais ont vu leur contingent de députés et leur présence médiatique réduite.
Après le chaos de 2017 et une législature avec seulement 28 députés, le Parti Socialiste a bénéficié du soutien de la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale (Nupes) en 2022 pour préserver ses sièges et en gagner trois en dépit du score dérisoire de sa candidate à la présidentielle Anne Hidalgo et ses 1,74 % de suffrages. En juillet 2024, après une très honorable troisième place de la liste PS-Place Publique menée par Raphaël Glucksmann les socialistes ont doublé leur nombre de députés à la faveur de la dissolution et en usant une nouvelle fois du marchepied d’une coalition de gauche, le Nouveau Front Populaire (NFP). Encore une fois, c’est grâce au discours radical de La France Insoumise mais aussi grâce aux désistements – notamment le fameux « barrage républicain » – que les socialistes sont revenus au cœur du jeu politique.
 
Les sociaux-démocrates à l’assaut des Insoumis
 
Les Insoumis sont provocateurs, omniprésents sur les réseaux sociaux et dans les médias et serrent les rangs, ne reculant devant aucune polémique. Leur force réside autant dans leur solidarité interne (dans la limite du soutien indéfectible au fondateur) que dans leur clientélisme communautaire.
Des frictions ont rapidement vu le jour avec l’aile centrale du PS qui n’admet pas l’alliance du Premier secrétaire Olivier Faure avec des éléments radicaux tant sur le programme qui inquiète les marchés que sur les relations internationales. Très concrètement, de nombreux cadres socialistes ne veulent pas la remise en cause du capitalisme que défendent les mélenchonistes et des personnalités du mouvement remettent en cause les options tiers-mondistes de LFI qu'il s'agisse de la défense de la Palestine ou de la paix en Ukraine.
La mise en orbite de Raphaël Glucksmann lors des élections européennes et plus récemment l’ascension médiatique de Karim Bouamrane, maire PS de Saint-Ouen qui a lancé son mouvement « La France humaine et forte » en présence du député Hollande témoignent d’une agitation dans le camp « social-démocrate ». Avec le ticket Glucksmann/Bouamrane et le soutien de barons locaux, les socialistes peuvent peser électoralement. Il s’agira aussi de jouer sur l’animosité entre communistes et Insoumis mais aussi sur la présence de dissidents insoumis dans les rangs des écologistes pour évincer les encombrants mélenchonistes. Enfin par son propre fonctionnement, les « lfistes » risquent de se disqualifier. En plaçant des individus instables à des postes exposés (petits chefs de bande, père de famille abandonnant ses enfants, ancien dealer) et des incontinents des réseaux sociaux, le parti crée les conditions du scandale et pourrait voir certaines de ses têtes d’affiche dévisser à la manière de l’étoile (filante) Adrien Quatennens, LFI première génération, autrement plus malin que ses successeurs mais coupable d’avoir taquiné la truffe de madame…
A la manière du FN il y a quelques décennies, les Insoumis connaissent un plafond de verre électoral ; sans alliances, ils sont condamnés à n’être qu’une force secondaire sur l’échiquier politique français.
 
Idéologiquement, la gauche dure aura, quoiqu’il advienne, gagné du terrain avec LFI. Les Insoumis, par leurs outrances et grâce au blanc-seing socialiste et centriste - le parti du président ayant participé au « barrage républicain » - ont largement diffusé et banalisé leurs idées les plus radicales déplaçant le curseur toujours plus à gauche.
 
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique