Les dernières élections législatives de juillet ont consacré la présence de trois blocs dans le paysage politique français. Une répartition des forces parlementaires assez inédite dans un pays habitué au bipartisme qui avait déjà été bouleversé par l’arrivée du parti centriste En Marche en 2017.
C’est un des changements majeurs que l’on retiendra des élections législatives du mois de juillet. Le paysage politique français est désormais coupé en trois blocs : central, de gauche et de droite. Une réorganisation de l’hémicycle déjà entamée en 2022 mais qui semble se confirmer et s’inscrire dans la durée.
Une difficile répartition des rôles
Qui est dans l’opposition, qui est la majorité ? Les cartes semblent avoir été brouillées au cours de l’été. La France Insoumise et son Nouveau Front Populaire réclamaient d’être placés à la tête d’un gouvernement faisant valoir leur victoire aux législatives. C’est juste, mais même victorieux, le « NFP » ne concentre pas un tiers des sièges que compte le Palais Bourbon et le Premier ministre de ce bloc de gauche aurait été aussitôt placé aussitôt éjecté. L’injonction des élus de gauche à la majorité de nommer un Premier ministre de chez eux et de ne pas le censurer, relève, elle, du délire et bafoue le concept même d’opposition.
Partis pour gouverner, les gauches seront finalement dans l’opposition puisque le président a décidé de confier les clefs du pays à la droite LR, probablement au pire des moments en plein marasme budgétaire et en pleine crise institutionnelle. Macronistes et élus de droite seront donc une majorité très faible avec environ 200 députés… qui doivent compter sur le Rassemblement national pour ne pas être renversés. Le RN, lui, se voit dans l’opposition mais n’entend pas censurer Michel Barnier pour éviter le blocage institutionnel du pays, estimant probablement qu’il est moins pire que n’importe quel candidat NFP ou affidé. Son rôle d’opposant lui est naturellement contesté par la gauche, qui veut en faire un supplétif de la nouvelle majorité. Un reproche qui ne manque pas de toupet venant d’une coalition qui a pactisé avec les macronistes lors des élections législatives et appelé à deux reprises à faire élire Emmanuel Macron contre Marine Le Pen.
Que tout change pour que rien ne change
Si le changement est majeur au niveau parlementaire, le pays demeure bel et bien dirigé localement par un dispositif bipartiste avec le Parti socialiste et Les Républicains qui se partagent les régions et les départements ainsi que les grandes et moyennes agglomérations.
Au Sénat, logiquement, faute d’implantation locale des nouvelles forces parlementaires (macronistes, Insoumis et RN), le bipartisme demeure dans la mesure où le bloc centriste au Palais du Luxembourg est beaucoup plus proche de la droite que de la gauche socialiste et ses alliés.
Au-delà des résistances fortes du « vieux monde », le tripartisme ne semble pas pouvoir déboucher sur des politiques de « rupture ». En effet, aucun parti en mesure d’être majoritaire en France ne propose de claquer la porte de l’UE ou tout au moins de jouer des coudes avec Bruxelles ; aucun ne propose non plus un programme radical. Par ailleurs, aucune formation ne semble aujourd’hui en mesure d’être majoritaire. Le morcellement électoral semble rendre illusoire l’obtention de 289 députés, en tout cas pour le moment. Les partis sont ainsi condamnés à composer avec des alliances plus ou moins contre-nature qui déboucheront sur des réformes de centre-gauche ou de centre-droit jusqu’à ce qu’un grand rassemblement de droite ou de gauche l’emporte. Une nouvelle démonstration faite que le clivage entre gauche et droite, s’il est en mutation, n’est pas fini comme a pu l’expliquer le professeur de droit Jean-Louis Harouel dans son ouvrage Droite-Gauche : ce n'est pas fini.
Olivier Frèrejacques
Président de Liberté politique
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