Trump, ... tous contre un !

[Source : Magistro]

Le "système" existe, Donald Trump l’a rencontré ! Ce fameux "système" n’était pas seulement une élucubration paranoïaque et "complotiste" de populiste en manque d’ennemi. Les premiers pas chaotiques du Président américain révèlent des forces de résistance multiples et puissantes qui font bien "système" pour résister à tout changement voulu par l’élu du peuple. Les mêmes qui nous serinaient depuis des années la nécessité impérieuse de "réforme" sont soudain passés dans le camp du statu quo. Les mêmes qui, en France, n’ont pas de mots assez durs pour tancer le "conservatisme" indécrottable des Français louent et admirent ceux qui, en Amérique, "conservent" tout ce qu’ils peuvent.

La bataille américaine est édifiante et révélatrice. Face à Trump se sont levés successivement les médias, les juges, les défenseurs des minorités ethniques et sexuelles. Les politiciens démocrates mais aussi républicains. Au sein de l’Administration elle-même, des hauts fonctionnaires n’hésitent pas à saboter les ordres reçus en les faisant "fuiter" dans la presse. On retrouve les pratiques du temps de Nixon, qui fut le dernier Président à oser affronter l’idéologie des campus des années 60 au nom de "la majorité silencieuse". Il est amusant de lire sous la plume de journalistes de gauche que la CIA tant honnie lorsqu’elle renversait Allende et les gouvernements progressistes d’Amérique latine est devenue désormais la noble "communauté du renseignement". La CIA et l’establishment de Washington refusent en effet la réconciliation avec la Russie de Poutine, comme ils protègent une OTAN qui pourtant n’a plus lieu d’être depuis la disparition de l’Union soviétique.
 
L’autre pôle de résistance est constitué par les multinationales qui se sont enrichies comme jamais avec la mondialisation. Toute remise en cause du libre-échange déstabiliserait leurs chaînes de production et réduirait leurs profits colossaux. Ils ont reçu dans la bataille le soutien de la Chine, dont la classe moyenne est sortie de la misère grâce aux délocalisations des grands groupes occidentaux. Le prix Nobel d’économie Paul Krugman, homme de gauche, avait défini la mondialisation comme l’alliance des dirigeants du Parti communiste chinois et des actionnaires de Walmart (Carrefour puissance cent !). Le pacte fonctionne toujours.
 
L’immigration est l’autre versant du système. En Californie, cette immigration massive (37 % de la population de l’Etat !) a permis à la fois de drainer les cerveaux du monde entier, de la France aux pays d’Asie, et de disposer d’une vaste domesticité corvéable à merci. Les seigneurs de notre époque, les fameux Gafa (Google, Apple, Facebook et Amazon), ne sont pas prêts à renoncer à leur statut. Ils se battent eux aussi pour défendre leurs privilèges. Comme les médias, comme les juges, comme la haute administration, comme les sénateurs corrompus de Washington, ils le font au nom de l’Etat de droit, des droits de l’homme, de la prospérité.
Depuis le mot de Madame Roland montant à l’échafaud, sous la Terreur, on connaît la chanson : "Ô Liberté, que de crimes on commet en ton nom !"
Paru dans Le Figaro Magazine, 24 février 2017