Source [Politique Magazine] La politique est bien sûr une affaire de graves principes. Imagine-t-on, par exemple, diriger la France ou le monde sans veiller avec un soin jaloux sur les droits de l’homme et la manière dont ils sont bafoués en Hongrie ? Et sans trop s’inquiéter de la manière dont ils sont bafoués en Arabie saoudite ? C’est que la politique est aussi affaire de circonstances. Les grands hommes savent regarder les grands principes et s’adapter aux circonstances. Prenons, au hasard, deux grands hommes : François et Joe Biden.
L’unité du rite romain (mais pas de tous les rites catholiques) est ainsi devenue, cet été, une cause primordiale. On a peu remarqué qu’au-delà de la fine sélection de grands principes mobilisés il y a une circonstance particulière que le pape a forcément envisagée : celle de l’âge des évêques consacrés en 1988 par Mgr Lefebvre (et dont l’excommunication a été levée en 2009). Mgr Williamson et Mgr Tissier de Mallerais ont un âge vénérable. La question de leur remplacement est posée. En travaillant à la disparition de la forme extraordinaire du rite romain dans les diocèses, en privant les séminaristes qui ont choisi cette voie de toute réelle possibilité d’exercer un ministère, le pape François, qui sait que l’âge commande (au point sans doute que ce motu proprio arrive circonstanciellement un peu trop tôt), incite la Fraternité Saint Pie X à renouveler les sacres schismatiques de 1988 pour assurer sa pérennité. Ce serait évidemment la pire solution, par rapport aux vrais grands principes, mais, les circonstances commandant… Espérons que la nasse ainsi préparée paraîtra trop étroite et que ceux qui défendent d’excellents principes sauront attendre que les circonstances leur redonnent un champ d’action.
Joe Biden, de son côté, a lui aussi profité des circonstances. Tout d’abord, une décision amorcée par son prédécesseur honni, qui pourra être chargé à loisir de toutes les fautes de toutes les administrations. Ensuite, la lassitude des Américains, qui n’en peuvent plus de ces “héros” et autres “vétérans”. Enfin, l’opportunité de trouver facilement des ressources immenses pour financer sa politique de relance économique : en expliquant combien l’Afghanistan a coûté, Joe Biden explique en fait, lui aussi, comment cet argent aurait pu être dépensé au profit direct des Américains. Tout en affirmant le maintien de la présence universelle des États-Unis comme gardiens des droits de l’homme, avec les accents ronflants propres aux grands principes, il poursuit la politique circonstancielle de relatif isolationnisme amorcée par Barack Obama (que d’amorçages, quelle continuité !) : les États-Unis Démocrates, illuminés et éveillés, pensent être un role model et se satisfont désormais de l’exemple admirable qu’ils donnent. Espérons que le colosse aux pieds d’argile, surendetté et avide, ne s’écroulera pas d’abord sur ses “partenaires”, qu’il ignore chaque fois que ses intérêts circonstanciels commandent.
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