Harcèlement, violence, lâcheté et morgue administrative: la chaîne fatale

Source [Causeur] : Nicolas N*** est donc mort, pendu à une taie de traversin. Les courriers échangés entre ses parents et le rectorat de Versailles sont éloquents sur bien des points, dit notre chroniqueur : refus d’entendre, refus de voir, refus de dire, enseignants et administratifs sont le parfait exemple de la sagesse orientale et du déni français.

L’affaire commence au mois de mars. Charline Avenel, amie personnelle d’Emmanuel Macron (elle appartient à cette cuvée « Léopold Sedar Senghor » de l’ENA qui est l’équivalent en macronie de ce que fut la promotion Voltaire en hollandie) était encore rectrice de Versailles —, elle n’est partie que l’été dernier pantoufler dans un organisme lucratif. Mais les faits remontent encore plus loin : depuis des mois Nicolas N***, jeune Guadeloupéen scolarisé dans un lycée professionnel de Poissy, dans les Yvelines, était harcelé par deux petites racailles. Du genre sans doute qui n’aime pas les Noirs, même si Nicolas avait le teint fort clair. Un gentil garçon, assidu, attentif, et qui croyait, a expliqué sa mère, en la justice des adultes.
Eh bien il a vu ce qu’étaient les enfants — « cet âge et sans pitié », disait fort bien La Fontaine — et ce que sont les adultes. Et il ne l’a pas supporté. Il avait changé d’établissement début septembre (alors même qu’Attal souhaitait que ce soient les harceleurs qui soient déplacés), il était retombé du haut de ses illusions, il n’est pas allé au bout de la première semaine de la rentrée. Même s’il avait d’autres soucis, ce fut sans doute la goutte d’eau qui, au dernier moment, pousse l’esprit à parier sur la mort, comme dit Camus.

La culpabilité change de camp

Du côté des copains, rien que de très ordinaire. « T’es nul, t’es moche, ta mère est une pute, ta sœur aussi, … » — on connaît le refrain. C’est du côté des adultes que les dysfonctionnements les plus criants ont vu le jour. Entre les profs qui n’ont pas voulu voir (le prof principal arguant que les altercations avaient eu lieu hors établissement, désolé, faites-vous péter la gueule dans l’enceinte du bahut, et une autre témoin des invectives mais qui a prudemment choisi de ne pas intervenir), le proviseur qui a émis un doute préalable (il évoque « une situation ressentie comme harcelante » afin d’éviter le mot harcèlement, qui est un délit punissable, depuis mars 2022, de dix années de prison, ne dramatisons pas…) et le rectorat enfin qui pour défendre ses agents, comme la loi lui en fait l’obligation, menace carrément de porter plainte pour plainte abusive (la famille avait déposé une main courante), précisant que le tarif d’une telle médisance est de cinq ans de prison et 45 000€ d’amende, les parents de Nicolas ont eu l’embarras du choix, entre couardise, morgue, et violence de l’appareil d’État. Même soutenu par ses parents, que vouliez-vous que fasse un jeune homme qui a dû se sentir méprisé et abandonné par ceux-là mêmes sur lesquels il comptait ? La culpabilité avait changé de camp (voir le courrier reproduit en bas de page).

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