COMMENT REFORMER ? (VI) L'intégration de la gendarmerie au sein du ministère de l'Intérieur

Fin de notre réflexion sur la réforme : après les questions posées par l’amélioration de l’hôpital public, l’exemple plutôt réussi de l’intégration de la gendarmerie au sein du ministère de l'Intérieur.

Parmi toutes les réformes entreprises par l’État depuis les trente dernières années, on peut citer la réforme plutôt réussie de la gendarmerie.

L’idée que la gendarmerie, tout en conservant son statut militaire, puisse passer du ministère de la Défense à celui de l’Intérieur s’explique d’abord par une évolution de la menace après 1991 et la transformation profonde de la situation internationale. La sécurité intérieure repasse au premier plan, cependant que la menace extérieure elle-même, caractérisée comme « terrorisme », se fait redouter aussi, voire d’abord, à l’intérieur.

Mutualisation et coopération 

Le rapprochement a conduit à une utile mutualisation des moyens, notamment dans le domaine des services supports, des systèmes d’information et de communication et du renseignement judiciaire. Il a amélioré la coopération sur le territoire et la coopération internationale contre une pègre souvent sans frontières.

L’expérience montre que les policiers ne demandent pas à devenir gendarmes, ni réciproquement. Les formations initiales sont restées séparées, comme les unités opérationnelles, et chaque corps, en dépit d’une collaboration quotidienne avec l’autre, a gardé son esprit, son identité et sa personnalité. Nous sommes là en présence d’une réforme qui n’est pas allée dans le sens de l’indifférenciation kafkaïenne.

Émulation et gradation

Sans doute y a-t-il eu là des raisons financières, la fusion des corps aurait en effet probablement conduit l’État, pour diverses raisons techniques, à payer plus cher le même service. Ce rapprochement a permis aussi de faciliter la réfection des logements et le remplacement des véhicules, mettant ainsi un terme à une grogne qui devenait inquiétante dans la gendarmerie.

L’État peut maintenir la qualité du service en faisant jouer l’émulation entre les deux corps. Il bénéficie en outre d’une précieuse gradation dans la réaction en cas de crise intérieure grave nécessitant un durcissement bien calibré du maintien de l’ordre.

Après tant de considérations objectives mais déprimantes, il était bon de pouvoir se réjouir de transformations menées avec sagesse et prudence.

 

Henri Hude est philosophe, ancien élève de l’ENS, directeur du Pôle Éthique des Écoles de Saint-Cyr Coëtquidan. Sur ce sujet, lire l'Ethique des décideurs (Économica, 2004). 

 

Articles précédents :
Comment réformer ? (I) Réflexions préalables sur l’idée de réforme
Comment réformer ? (II) L’extension indéfinie d’un pouvoir judiciaire sans contre-pouvoir
Comment réformer ? (III) Idées sur la réforme territoriale  
Comment réformer ? (IV) Les contradictions de la modernisation de l’État-providence
Comment réformer ? (V) L’hôpital public

 

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http://www.henrihude.fr/

 

 

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