Autonomie stratégique et souveraineté économique européenne : les dangereuses illusions d’Emmanuel Macron

Source [Atlantico] : Lors de son vol retour de Chine, le chef de l’Etat a insisté sur le fait que les Européens ne devraient pas se penser en suiveurs des États-Unis. Soit. Mais nous donnons-nous les moyens de nos ambitions ?

Atlantico : A La Haye, Emmanuel Macron a présenté sa vision de la souveraineté économique et industrielle de l'Europe, ainsi que sa "sécurité économique". Que retenir de cette vision économique et industrielle ? Qu’est-ce que cette souveraineté économique proposée par Emmanuel Macron ?

Sébastien Laye : Depuis 2020 et la crise du Covid, la France, sous l'égide d'Emmanuel Macron, a paru renouer avec un discours d'indépendance industrielle. Suscité par nos échecs en termes de médicaments et de masques lors de la crise sanitaire, ce débat était en fait sous tendu par l'effondrement, ancien, de la part de l'industrie dans notre PIB (vers 11% contre 16-18% en moyenne pour des pays comparables). A la Haye, Emmanuel Macron a réitéré l'ambition affichée de 2020, avec plusieurs limites qui sautent aux yeux. En premier lieu, les progrès de relocalisation industrielle sont lents et il nous faut donner des preuves de notre succès à nos partenaires avant de pouvoir définir une doctrine européenne. Par ailleurs, son message sur l'industrie et l'économie fut brouillé par la séquence géopolitique, où en Chine en particulier, il a évoqué la dimension géopolitique du logiciel souverainiste; de manière inattendue, il se retrouve à front renversé: lui qui n'a jamais été politiquement souverainiste, tient soudainement un discours qui se veut d'équilibre mais le rapproche des extremes politiques, au moment où nous devons surtout défendre un pivot sur notre indépendance industrielle et économique. 

Dans quelle mesure ce discours de souveraineté économique est-il, à l’heure actuelle, inaudible et illusoire ?

Sébastien Laye :Je pense au contraire qu"il peut etre entendu, surtout s'il est pragmatique et se destine à défendre nos emplois et nos talents, comme dans le cas par exemple de l'entreprise Segault, dans la robinetterie nucléaire, qui ne saurait etre reprise par une multinationale américaine. Mais pour etre entendu et entériner ce pivot, Emmanuel Macron devrait s'entourer de personnalités qui s'intéressent à ces sujets de défense stratégique de l'innovation. Aujourd'hui, peu de membres de sa majorité ont cette culture de l'indépendance industrielle et économique et ont trop souvent fait de la France la passoire de l'Europe au cours des dernières années. Les 5% du PIB en valeur industrielle dont nous manquons, ce sont les 2 points de chomage en plus par rapport à la moyenne européenne que nous traînons depuis deux décennies.

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