[Source: Boulevard Voltaire]
La compassion ne devrait pas avoir de frontière, pas de couleur de peau, pas d’origine cultuelle ni culturelle, elle ne devrait jamais être au service d’une idéologie partisane, d’intérêts économiques ou s’inscrire dans un plan de communication.
Et pourtant …
Depuis huit années, dans l’indifférence médiatique quasi générale, en l’absence d’intervention humanitaire, hormis celle de quelques organismes comme l’UNICEF, à 600 kilomètres au nord de Bogota, dans la province de La Guajira, à la frontière du Venezuela, de jeunes enfants de la communauté Wayúu sont morts faute d’accès à l’eau potable et à cause d’une sévère malnutrition. Plus de 5.000 à ce jour… Certains évoquent même un chiffre encore plus important.
La péninsule de La Guajira est une région colombienne quasi désertique, traversée en partie par le fleuve Ranchería et qui possède des réserves de charbon considérables dans la zone dite El Cerrejón. Exploitées par un consortium de plusieurs sociétés multinationales : Anglo American (Grande Bretagne et Afrique du Sud), BHP Billiton (Grande-Bretagne et Australie) et Glencore Xsastra (Suisse). Ce site constitue la plus gigantesque mine de charbon du monde à ciel ouvert.
L’extraction minière nécessite, dans cette région aride, des milliers de litres d’eau par jour, prélevés en grande partie du Ranchería et de ses affluents, avec des conséquences sur son écoulement et sur l’ensemble de l’écosystème de cette zone. Cette péninsule abrite depuis des millénaires un peuple aborigène, les Wayúu, 300.000 personnes environ, qui a su résister à toutes les colonisations. Une société matriarcale, traditionnelle, semi-nomade pour qui l’eau est vitale, pour leur consommation comme pour leur mode de vie (pêche, chasse) ou leurs activités, entre autres l’agriculture et l’élevage.
D’autant qu’avec l’intensité du phénomène El Niño, le volume de précipitations a considérablement diminué, les puits se sont asséchés et l’eau disponible est devenue insalubre. Des conditions sanitaires dégradées qui ont un impact terrible sur cette population.
La CIDH, la Commission interaméricaine des droits de l’homme, est intervenue pour alerter les pouvoirs publics sur la situation de cette communauté « en danger en raison du manque d’accès à l’eau potable ».
Par ailleurs, en 2015, l’Institut colombien du bien-être familial (ICBF) enregistrait 898 enfants souffrant de malnutrition : « Les enfants survivent avec une bouillie ou deux par jour. Voilà tout ce qu’ils mangent », déplore Roberto Palmar, conseiller municipal d’Uribia, une petite ville au cœur de la péninsule désertique de La Guajira, majoritairement habitée par les Wayúu.
La Colombie est un pays de 48 millions d’habitants qui compte 17 millions de personnes considérées comme pauvres ou très pauvres et doit faire face à des défis multiples (crise économique, cartels de la drogue, corruption) et il ne peut être question de lui reprocher d’exploiter ou faire exploiter ses nombreuses ressources naturelles.
Quant aux bonnes consciences politiques, écologiques, mondialistes si promptes à donner le la de ce qu’il faut penser, dire et faire, en paraphrasant le poète Rutebeuf, que sont-elles devenues ?
Le charbon qui est extrait de cette région est, pour l’essentiel, destiné à l’Europe et, pour une grande majorité, à l’Allemagne de madame Merkel …
Pas un mot, non plus, sur cette tragédie humaine de la part du pape François – argentin, rappelons-le – qui s’est rendu en 2015 en Équateur, en Bolivie, au Paraguay et, en 2016, au Mexique… Faut-il donc la présence des médias, des caméras du monde entier, des photographes postés jour et nuit pour déclencher compassion et intervention ?
Jean-Marie Beuzelin
Ecrivain
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