Blessé grave à Tolbiac: un témoin avoue avoir menti, le site «Reporterre» rétropédale

Source [Libération] «Libération» a enquêté sur la rumeur d'un blessé grave lors de l'évacuation du campus parisien. Aucun élément ne vient l'accréditer. Mercredi, «Reporterre», qui citait trois témoins directs du «drame», va publier une enquête pour revenir sur ses premiers articles.

La rumeur finit de se dégonfler. Elle courait depuis l'évacuation de Tolbiac: un étudiant aurait chuté et serait tombé dans le coma. Malgré les démentis (de la préfecture, des hôpitaux) ce week-end, l'affirmation a continué à circuler, se nourrissant même des démentis officiels pour instiller le soupçon d'un mensonge d'Etat... Libération a enquêté. Plusieurs riverains, dont les fenêtres donnent directement sur l'endroit de la chute supposée, confirment formellement n’avoir vu ni ambulance, ni pompiers, ni chute. Nous n'avons retrouvé aucun témoin direct ayant vu la scène. Au contraire, Leïla, l'une des trois témoins principaux cités par les médias ayant accrédité cette rumeur, nous a avoué avoir menti. Le magazine en ligne Reporterre, qui a le premier relayé des témoignages faisant état d'une chute grave, nous a confirmé «après enquête» que ces témoignages ne sont pas fiables. Ils révèlent à Libération qu'ils publieront un article (publié depuis) revenant sur leur premier article. Récit d'une rumeur. 

Comme nous l'expliquions dans une réponse CheckNews, des rumeurs faisant état d'un étudiant mort, puis dans le coma et gravement blessé ont commencé à circuler vendredi après-midi. Plusieurs heures déjà après l'évacuation. Tout s'emballe en milieu d'après-midi, quand le journal en ligne Reporterre publie plusieurs témoignages affirmant qu'un étudiant aurait chuté en tentant de s'enfuir: «Un baqueux lui a chopé la cheville. Ça l'a déséquilibré, et le camarade est tombé du haut du toit, en plein sur le nez. On a voulu le réanimer. Il ne bougeait pas. Du sang sortait de ses oreilles…» Un deuxième témoin aurait assisté à la scène. Et un troisième aurait vu le corps et les flaques de sang. Car, selon les étudiants, des policiers ou équipes de nettoyage de la Ville de Paris (selon les versions) auraient nettoyé des traces de sang. Problème: on ignore l'identité de la victime présumée, son état, et l'hôpital où elle aurait été transférée.

Plusieurs médias reprennent ces informations: Politis relaie les témoignages de deux témoins; le Média diffuse le témoignage d'une jeune fille, Leïla, qui raconte avoir vu du sang lui sortir par les oreilles; et Marianne reprend le récit d'une reponsable de l'Unef affirmant qu'un étudiant est dans le coma, avant de se corriger pour écrire «gravement blessé», puis de finalement reprendre le démenti de la préfecture.

Car au fur et à mesure de la journée, la préfecture dément à deux reprises qu'un étudiant ait été gravement blessé. L'université dit se fier au communiqué de la préfecture et affirme que ses équipes de sécurité n'ont vu aucune scène de ce genre. Le ministère de l'Intérieur confirme le démenti, mais la rumeur continue de persister. Vendredi soir, en assemblée générale sur le site de Censier à Paris-III, des étudiants affirment que la victime serait un migrant, ce qui expliquerait notamment qu'aucun proche ne se soit manifesté...

Samedi matin, Reporterre maintient son information et publie trois témoignages. Il y aurait deux témoins directs et une troisième personne ayant vu le corps à terre. Dans la foulée, SUD Santé, qui a cherché sans succès où la personne blessée aurait pu être hospitalisée, s'interroge dans un communiqué sur une «rumeur ou [un] mensonge d'Etat». «Nous savons qu’un patient a été proposé à la grande garde de neurochirurgie mais refusé parce que ne relevant pas de la chirurgie et transféré dans un autre établissement, note le syndicat sans qu'aucun lien direct ne soit établi avec Tolbiac. Les faits sont pour pour le moins troublants», conclut-il en demandant à l'APHP de «lever le voile sur cette affaire».

Samedi après-midi, c'est au tour des hopitaux de Paris de communiquer... en démentant la rumeur. 

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