pornographie

« L’enfant a le droit de s’épanouir » nous dit Christian Vanneste. C’est pourquoi avec 12 de ses collègues [1], le député a déposé le 13 juillet 2011 une proposition de loi visant à lutter contre la pornographie, proposition n° 3687, relative à l’accès des mineurs aux sites pornographiques. Celle-ci ayant été renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, Christian Vanneste a convoqué la société civile mardi 19 octobre 2011 pour décider des moyens à mettre en œuvre pour que les mineurs ne puissent plus accéder aux sites pornographiques d’internet, comme c’est le cas actuellement en cliquant sur « j’ai dix-huit ans ».

Etat des lieux de la pornographie

La pornographie touche environ 800 000 les jeunes qui souffrent de carences affectives, souvent les plus fragiles. Ces jeunes auront des troubles quasi-similaires à ceux liés à des abus sexuels (actes et paroles) et souffriront de la perte du sentiment d’exister, d’ambivalence et de mort intérieure. « La pornographie est nocive pour la société et l’enfant en particulier » nous dit le Pasteur Daniel Rivaud, délégué général du CPDH. Il suffit de lire Regards croisés sur l’adolescence de Marie Choquet pour se rendre compte des conséquences catastrophiques pour la maturation de l’enfant. En 2010, dans une famille sur deux, on ne parle jamais de sexualité. Les jeunes font leur éducation sexuelle par le biais de films pornos, et ce de plus en plus tôt : 1/3 des enfants de 10 ans ont eu accès à des images pornographiques et 80% des adolescents ont déjà visionné des films pornos selon l’émission de télévision « Le sexe dans tous ses états » du 18 février 2010 sur TF1.

De cela, l’enfant est marqué : il éprouvera un dégoût de soi et sera victime de déséquilibres. D’après une étude de l’INSERM menée par Marie Choquet en 2004, la propension de filles, plus fragiles, à faire des tentatives de suicide est multipliée par deux si elles regardent assidûment des images X. Comme Daniel Rivaud, Philippe Auzenet, pasteur et fondateur de l’association Oser en parler, traite des effets de la pornographie sur les enfants et adolescents dont les plus courants sont la dépendance sexuelle, une homosexualité désagrégée et un mal-être psycho-sexuel. Le jeune s’attache, s’habitue et intègre comme norme les images pornographiques reçues ; le problème majeur est qu’il reproduit ce qu’il a vu (tournantes, sodomie, viols, attouchements sexuels voire même des meurtres). Il y a là un gros travail d’information, de prévention et d’écoute à faire pour protéger nos jeunes car la pornographie est devenue un modèle sexuel et relationnel de référence, mais avec non-intégration des limites sexuelles. L’amour sexué est déconnecté de toute sentimentalité.

La solution anglaise du MP Claire Perry

La pornographie est ni un sujet marginal ni un sujet léger, c’est pourquoi il faut réagir. Pour protéger l’innocence des enfants, le député britannique Claire Perry a lancé la campagne Opt In au Royaume-Uni qui a fortement attiré l’attention des médias et de l’opinion publique. James cartwright, un de ses collaborateurs, a exposé la solution.

Au Royaume-Uni, 99% des enfants de 12-15 ans et 75% des 5-7 ans utilisent régulièrement l’internet dont plus de la moitié y accède dans leurs chambres ou sans surveillance des adultes. Presqu’un quart des adolescents aurait visualisé des images sexuelles en ligne. Les logiciels de contrôle parental, qui pourraient aider à réduire considérablement  ces chiffres, ne sont pas installés par environ la moitié des parents britanniques. En novembre 2010, Claire Perry propose aux fournisseurs d’accès à internet (FAI) de travailler ensemble pour fournir un service interne « propre » de filtrage pour accéder à la pornographie sur l’internet avec la technologie de vérification d’âge. Les FAI du Royaume-Uni se sont réunis et ont créé le système Clean Feed  bloquant l’accès aux sites qui affichent des images illégales. Cependant, il semble qu’il y a toujours une réticence à bloquer ou à limiter l’accès à des contenus réservés aux adultes.

Au niveau politique, des tables rondes ont été organisées en février et en mai 2011 entre l’industrie des FAI, un groupe inter-partis de députés, des représentants d’organisations pour la protection de l’enfant et de la famille, et le ministre de la Culture, des Communications et des industries créatives. Les réunions avaient pour but de persuader les FAI de s’autoréguler et de permettre le modèle de l’Opt In supprimant ainsi la nécessité de légiférer. Une première victoire a lieu en mai 2011 avec TalkTalk qui a introduit HomeSafe, le premier filtre au niveau du réseau qui donne à ses clients la possibilité de sélectionner le contenu internet qu’ils souhaitent filtrer (c’est le cas pour 4 millions d’utilisateurs aujourd’hui). Ce n’est toujours pas un système Opt In mais c’est une étape technologique importante. En août 2011, plus de 60 parlementaires ont lancé une enquête parlementaire sur la protection des enfants en ligne [2]. La deuxième victoire date du 11 octobre dernier puisque quatre des principaux FAI ont annoncé qu’ils allaient offrir à leurs clients signant un nouveau contrat la possibilité d’opter ou non pour télécharger un logiciel de contrôle parental. Le même jour, le Premier ministre avait annoncé la création du site ParentPort sur lequel les parents pourront déposer leurs plaintes. Il a aussi indiqué que les mesures offertes par les FAI ne sont qu’un début et qu’il en attend plus.

Quant aux objections faites par les opposants, elles sont au nombre de trois :

  • Une restriction à la liberté d’expression mais la solution Opt In ne bloquera aucun site web quelque soit son contenu.
  • La non faisabilité et le coût
  • Des questions de légalité vis-à-vis : 
    • d’une directive européenne (2002/58/CE) et sa transposition dans le droit britannique RIPA 2000 créée une infraction pénale pour l’interception des communications même électroniques [3]
    • du respect de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’Homme

Comment la France peut-elle réagir à ce mal ?

Le député Vanneste lance un appel à la société civile pour réagir au mal de la pornographie. Aujourd’hui, la position des FAI devient de plus en plus intenable, c’est pourquoi la solution anglaise peut servir d’exemple pour la France. Tout en tenant compte de la spécificité culturelle française, pourquoi ne pas faire pression sur les FAI pour commencer au lieu de légiférer de manière automatique…ce qui pourrait apparaître comme de la censure par l’Etat ? L’autorégulation par les FAI est certainement un des meilleurs moyens. Cette opération doit être pensée en amont. Afin de mobiliser l’opinion publique, il est impératif de s’appuyer sur les bons journalistes ainsi que sur des rapports. Pourquoi ne pas rédiger un manifeste qui pointerait du doigt les dangers objectifs de la pornographie ?

 

 

[1] Dont Marcel Bonnot et Louis Cosyns

[2] Connaître l’étendue de l’accès à la pornographie en ligne par les enfants, déterminer ce que les FAI britanniques ont fait à ce jour, déterminer de quels outils supplémentaires les parents auraient besoin pour protéger leurs enfants contre ces sites, établir les arguments pour et contre le filtrage au niveau du réseau, recommander au gouvernement une réglementation des FAI si nécessaire

[3] L’équivalent pour la France est la Loi n°2004-669 du 9 juillet 2004 dans le Code des Postes et des communications électroniques