Article rédigé par La Fondation de service politique, le 11 avril 2003
Passent les semaines, et l'ampleur de notre mission m'apparaît chaque jour davantage. J'ai pris mon rythme de croisière au MYRC, ballotté par les sautes d'humeur de l'administration. La mission médicale avance, malheureusement sans notre infirmière qui a contracté une forme une violente de la gale sans parvenir à s'en débarrasser.
Nous avançons donc à petit pas, ne pouvant donner que les soins de base, mais c'est déjà énorme pour les enfants qui n'ont pour la plupart jamais su désinfecté une plaie. Surtout, ils se sentent rassurés par notre présence et notre pharmacie.
Les sautes d'humeur de l'administration... Nous en profitons ou les subissons chaque jour. Les gardes nous ouvrent les grilles ou nous laissent patienter dix, vingt, trente minutes selon qu'ils veulent paraître sympathiques ou bien nous montrer qu'ils sont les maîtres.
Les " house-parents " nous félicitent pour notre travail ou bien nous ignorent... Rien n'est jamais gagné avec eux. Un jour ils vous demandent pourquoi vous n'êtes pas venu la veille puis vous refusent l'entrée le lendemain. Nous n'arrivons pas encore à savoir comment ils perçoivent notre action... Si des assistants sociaux nous remercient avec beaucoup d'émotion, nous expliquant que sans nous rien ne se ferait, les portes mettent encore beaucoup de temps a s'ouvrir, les visages restent sévères et suspicieux, nos remarques sont ignorées, nos demandes rejetées, les enfants toujours autant méprisés.
La nouvelle directrice est souriante, pleine de bonne volonté, décidée à changer le système, mais elle est tombée malade il y a trois semaines et n'est pas venue à la prison. Elle a craqué psychologiquement.
Mais nous ne perdons pas courage, sûrs d'arriver un jour à faire évoluer les mentalités. Chaque petit geste de bonne volonté est comme une source d'espoir sur la voie de la fin du mépris. Ces gestes, ils existent de plus en plus, et nous prouvent que notre action missionnaire est sans exclusive : nous somems au service de tous.
Nous avons mis un frein à nos efforts pour le nettoyage des cellules pour plusieurs raisons, hélas révélatrices :
Notre matériel disparaît d'une semaine sur l'autre... eau de javel, produit nettoyant, brosses, serpillières... se volatilisent régulièrement!
Ensuite, nous nous sommes aperçus que les House parents, normalement responsables de la supervision du nettoyage des cellules, sont profondément vexés que des " blancs " venus d'Europe se mettent à quatre pattes dans les cellules pour faire le nettoyage. Au lieu de réagir positivement, de reprendre les choses en main, ils font de l'aimable obstruction...
Enfin, l'efficacité de notre nettoyage reste encore assez relative. Nous manquons de technique... cela peut vous paraître ridicule, mais nettoyer une cellule au carrelage poreux, aux murs de béton imprégnés, infestés, de toutes les maladies et vermines possibles, sans bouche d'évacuation pour l'eau ni aération, et avec un matériel qui défie toute concurrence en matière de simplicité... sans technique ? Impossible ! Comment décrasser et désinfecter les cellules du sol au plafond en un minimum de temps, sans laisser les cellules humides ? En outre, mon vocabulaire tagalog dans le domaine du nettoyage reste assez limité, ce qui ne facilite pas la coopération avec mes petits prisonniers !
Mais surtout, le point essentiel et élémentaire, trop malheureusement oublié par de nombreuses œuvres humanitaires, cette activité de nettoyage restera inefficace et sans lendemain si nous ne prenons pas le temps de former les enfants et le personnel afin qu'ils se prennent en main rapidement et si nous n'incluons pas ce programme de salubrité dans un plan plus complet d'hygiène quotidienne, de lavage des vêtements, la peinture des cellules, etc.
Tout cela se met en place, lentement... mais solidement.
La peinture des cellules ? Grâce a un don reçu de Denver il y a deux semaines, nous avons pu repeindre avec l'aide d'étudiants français, mais surtout des enfants détenus, une troisième cellule. Les enfants sont heureux, cela faisaient des semaines qu'ils nous demandaient quand nous viendrions repeindre leur cellule. À nous maintenant de les responsabiliser, pour qu'ils en prennent soin et qu'ils aient à cœur de garder leur cellule propre.
Mabuhay ! Magkita tayo namaya.
À la semaine prochaine,
Charles
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