Article rédigé par Roland Hureaux, le 07 décembre 2020
Source [Roland Hureaux] Comment peut-on prétendre que la défaite supposée de Trump à l’élection présidentielle américaine est une grande victoire de la gauche, de la démocratie et pourquoi pas du peuple ? C’est pourtant ce qui fait aujourd’hui consensus dans la gauche française et européenne.
Comment ne pas voir qu’une telle affirmation est stupéfiante d’absurdité si l’on se réfère aux fondamentaux la gauche historique : la paix contre la guerre, les petits contre les gros, l’égalité conte l’inégalité, la démocratie contre tout ce qui peut en réduire le champ.
Commençons par quelques rappels de sociologie électorale. Aux Etats-Unis où le phénomène bobo (bourgeoisie bohême soi-disant libérale) a plus d’ampleur que chez nous, les présidentielles ont montré un vote de classe particulièrement tranché. Sur l’échelle des revenus, la moitié supérieure vote Biden, la moitié inférieure vote Trump. Les noirs faisaient exception : républicains après Lincoln, ils étaient devenus démocrates sous Kennedy, et encore plus sous Obama. Ils ont été sensiblement plus nombreux, cette fois, comme les hispaniques, à voter Trump, cela pour des raisons essentiellement économiques : en bloquant les frontières, Trump a multiplié et revalorisé les emplois peu qualifiés. Personne dans l‘histoire des Etats-Unis n’avait fait autant que lui pour l’emploi des gens de couleur ! Preuve que classe prime la race. Sur le plan géographique, c’est la même chose : les grandes métropoles (New York, Chicago, Los Angeles, San Francisco etc.) ont voté Biden, et l’Amérique périphérique pour reprendre la formule du géographe Christophe Guilluy, soit les petites villes du Middle West, les régions industrielles en déclin, les campagnes, a voté Trump.
Les cinquante plus grands milliardaires des Etats-Unis dont Bill Gates, George Soros, les patrons des Gafa comme Zuckerberg et Bezos, ont presque tous soutenu Biden.
Parlons maintenait guerre et paix. Les imbéciles voient Trump comme un homme de guerre, une réincarnation des dictateurs des années trente. Rappelons qu’il est le premier président américain depuis trente ans à ne pas avoir entrepris de guerre ! Son prédécesseur démocrate, très engagé auprès de Biden, Obama, prix Nobel de la Paix en a entrepris quatre dont le bilan cumulé est de près d’un million de morts. Non seulement Trump, malgré ses rodomontades face à l’Iran n’a entrepris aucune guerre mais il en a terminé deux : Irak et Syrie que les démocrates sont prêts à relancer, au moins la seconde ; il a pris des initiatives audacieuses à l’égard de la Corée du Nord et des talibans qui ont contribué à un début de détente avec ces ennemis jurés. S’il ne s’est pas rapproché plus de la Russie, c’est qu’il en a été empêché par les démocrates qui l’ont poursuivi inlassablement pour l’en empêcher au moyen de procédures judiciaires, d’ailleurs avortées. Biden promet de durcir encore la politique américaine vis-à-vis de la Russie : jusqu’où ?
Parlons démocratie : Trump l’aurait menacée. Voilà un dictateur qui a 95 % des médias (qui appartiennent aux milliardaires évoqués plus haut) et une bonne partie de l’administration contre lui. Zuckerberg a bloqué les comptes du président Trump, entièrement privé de moyens d’expression en pleine campagne électorale. Le même s’est vanté que ce serait lui, l’homme le plus riche d’Amérique et personne d’autre, qui déciderait qui sera le prochain président. On ne sait pas encore si son effet aura été décisif sur le résultat final mais pratiquement personne ne nie aujourd’hui l’existence de fraudes massives et seul le camp démocrate en est accusé. Quelle que soit l’issue finale du scrutin, la démocratie américaine en sortira terriblement affaiblie. Cela n’empêche pas Biden de dire qu’avec lui les Etats-Unis défendront plus fermement le « monde libre » et la démocratie : on croit rêver.
Ils n’ont rien compris !
Il est clair que la gauche française n’a rien compris de ce qui se passe dans le monde depuis trente ans ; elle n’a pas compris que l’abolition des frontières dont elle a fait son cheval de bataille, était le champ ouvert aux très riches au détriment des plus pauvres que seuls les Etats peuvent protéger. Elle n’a pas compris que c’était elle qui était devenue totalitaire et non les régimes prétendus extrémistes qu’elle dénonce. Pas davantage qu’en ayant abandonné sa dimension sociale, au bénéfice du sociétal, elle n’est plus qu’un immense faux-semblant destiné à tromper les peuples au bénéfice des puissants, que la haine du populisme sur laquelle elle fonde désormais sa légitimité, est en réalité la haine du peuple.
Si les gens de gauche sincères (il y en a encore), attachés à la paix, à la démocratie, à une plus juste répartition des richesses, n’opèrent pas une totale révolution intellectuelle, s’ils ne se mettent pas à regarder la réalité telle qu’elle est, ils seront les complices d’une des plus grandes impostures de tous les temps.
Roland HUREAUX