Article rédigé par Boulevard Voltaire, le 29 novembre 2018
Source [Boulevard Voltaire] « Toi, tu ne changes pas, tu es comme le prix des allumettes ». Les nostalgiques des années 70 se souviennent sans doute de cette chanson de Stone et Charden. C’était en 1972, un an avant le premier choc pétrolier. En 1972, le litre d’essence valait 1,62 franc à la pompe. En 1975, il était passé à 2,16 et, en 1981, à la fin du règne de Giscard, il était carrément passé à 4 francs.
Et puis, en 1976 – c’était encore le temps du giscardisme flamboyant, comme le prix du baril – on découvrit que si en France on n’avait pas de pétrole, on avait des idées. Vint celle, lumineuse, de l’heure d’été. Le porte-parole du gouvernement de l’époque, André Rossi (un parent de Tino ?), déclara : « les gens se coucheront une heure plus tôt le soir pendant l’été et de ce seul fait, il y a une consommation électrique qui se réduit d’autant ». 1972, Stone et Charden chantaient le prix des allumettes. La même année, prenait fin – c’est amusant – un monopole d’État, vieux de plus d’un siècle, sur la fabrication et l’importation des allumettes. Je ne suis pas économiste mais est-ce parce qu’il y avait monopole d’État que le prix des allumettes ne changeait pas à cette époque ? Stone et Charden qui n’étaient pas économistes non plus, ne le disaient pas dans leur chanson. En ce temps-là, où l’on ne s’éclairait déjà plus trop à la bougie, il semble me souvenir que la production d’électricité était aussi en quelque sorte monopole d’Etat avec EDF-GDF. Se chauffer n’était plus un luxe et l’on ne grelottait plus de froid l’hiver dans les masures comme ce fut le cas, des millénaires durant pour nos ancêtres. Et c’est vrai aussi qu’on abusa un peu. Se promener en slip ou en petite culotte dans un appartement surchauffé fut à la portée de toutes les bourses et les grands-mères tricotèrent de moins en moins de grosses laines pour les soirées d’hiver devant la télé. Mais ça, c’était avant.
Tout ça pour dire que ce qui était devenu un bien de consommation courante est en train de redevenir du luxe pour les « classes laborieuses », ceux pour qui « tout va trop vite et tout change sans nous attendre » (tiré de la chanson de Stone et Charden !). Selon un article de Capital de 2016, le prix de l’électricité entre 2006 et 2016, a augmenté entre 37 et 42 % pour une famille de quatre personnes alors que, durant la même période, l’inflation n’a été que 10,3 %. Et l’on apprend que le prix de l’électricité devrait augmenter entre 2 et 4 % en 2019. Là, pour le coup, ce n’est pas la faute à Bibi. Une augmentation, pour faire court, qui nous est imposée par les règles très complexes auxquelles nous nous plions allègrement, Union européenne oblige. L’Opinion et Le Parisien évoquent, eux, une augmentation de 2, 3 % en 2019 et 3,3 %. Ce qui coûte 100 aujourd’hui, pourrait coûter 105,67 en 2020.
Ce n’est pas la faute à Bibi mais cela va s’ajouter aux hausses de taxes qui, elles, sont de sa faute. Benjamin Griveaux, propagandiste en chef du gouvernement, ou Brune Poirson qui explique pompeusement que « la lutte contre le changement climatique est une longue marche » (forcée ?), pourraient suggérer aux « classes laborieuses » de se glisser le soir à l’heure des poules sous la couette ou de se tricoter de gros gilets en laine issue, forcément, du commerce équitable. Autre idée : pourquoi ne pas revenir à ce que connurent nos ancêtres. Toute la petite famille dans la même couche ! Et puis, s’ils éteignaient leurs ordinateurs, tous ces gueux, non seulement ils ne se feraient pas endoctriner par tous ces populistes et autres anti-progressistes, mais en plus ils feraient des économies d’électricité et du bien à la planète.
En tout cas, pour l’instant, Emmanuel Macron semble rester inflexible. « Toi, tu ne bouges pas, tout passe au-dessus de ta tête », chantaient, toujours dans cette chanson, décidément plus profonde qu’on pouvait l’imaginer, Stone et Charden. Pour combien de temps encore ?