Article rédigé par Guy Milliere, le 22 juin 2017
Qui aurait imaginé, voici deux ans, que la France serait dans la situation qui est la sienne aujourd’hui ?
François Hollande était un Président impopulaire et discrédité.
Une alternance semblait inéluctable.
Le candidat de droite, quel qu’il soit, semblait susceptible de gagner l’élection présidentielle.
Quand la candidature Macron a pris forme, nombre de commentateurs pensaient que ce ne serait qu’un feu de paille.
Je n’en faisais pas partie, car je voyais la fabrication d’un produit de grande consommation prendre forme.
On voit ce qui est advenu.
François Fillon, piètre candidat, a été éliminé, pour partie par des méthodes dignes d’un pays totalitaire, pour partie par sa propre médiocrité.
Marine Le Pen n’a jamais eu aucune chance.
Emmanuel Macron a été élu par défaut, parce qu’il était le dernier candidat encore debout, face à une femme utilisée pour jouer le rôle d’épouvantail.
Il est porté, depuis, par des médias idolâtres qui se comportent comme la presse d’un pays d’Europe centrale se comportait, voici trente ans, vis-à-vis du dictateur choisi par le parti unique pour occuper le fauteuil de Président.
Les résultats prévus par la presse et les sondages pour le mouvement macronien ont conduit un très grand nombre d’électeurs découragés à ne pas même se rendre aux urnes pour les élections législatives et à choisir un mélange d’acceptation et de résignation.
Le résultat est une assemblée nationale aux mains d’une sorte de parti unique, flanqué des vestiges de partis à l’agonie et en voie de disparition.
Les nouveaux députés sont, pour partie, des hommes et des femmes d’appareil venus du parti socialiste défunt, des mouvements centristes ou des Républicains.
Ils sont accompagnés d’une quantité consternante de gens médiocres qui n’ont aucun passé politique et aucune conviction vraiment précise.
Comme certains l’ont dit, La République en marche aurait présenté des ânes ou des vaches dans plusieurs circonscriptions, les ânes et les vaches auraient été élus triomphalement.
Ce qui s’est passé n’a pas été un renouvellement de la vie et du personnel politique, mais une éviction de l’essentiel de ceux qui avaient structuré la vie politique française et leur remplacement, non pas par de nouveaux venus, mais par des gens aux ordres ou infiniment malléables.
Ce résultat est un effondrement de la démocratie, sans précédent depuis longtemps dans un pays occidental.
C’est le fruit d’années de sclérose et de lavage de cerveau.
C’est un processus qui montre qu’en s’appuyant sur une hégémonie médiatique et culturelle, on peut aussi mettre en place une hégémonie politique.
Emmanuel Macron et son gouvernement vont avoir les mains libres et pouvoir prendre les décisions qu’ils entendent prendre en disposant d’un parlement qui sera une simple chambre d’enregistrement, et au sein duquel il n’y aura quasiment plus aucune voix d’opposition.
Si le mélange d’acceptation et de résignation tient dans la durée, la France ressemblera à une sorte de « meilleur des mondes » façon Aldous Huxley.
Il y aura toujours des pauvres, des chômeurs et des zones de non-droit, mais les médias et les dirigeants du pays feront comme si tout cela n’existait pas.
Il y aura peut-être des attentats, mais il suffira de fleurs, de pleurs et de bougies pour que ceux-ci soient vite oubliés.
Il y aura un changement de population et une islamisation du pays qui sera censée rendre les choses irréversibles.
Les discours ressembleront à celui tenu par Emmanuel Macron à Oradour-sur-Glane le 10 juin : le choix sera entre l’anesthésie façon Macron ou des cataclysmes flous décrits comme menaçants.
Ce qui se produira sera une euthanasie en pente douce.
Si le mélange d’acceptation et de résignation se fissure – et il peut tout à fait se fissurer, dès lors que plus de la moitié des électeurs ont renoncé à voter –, d’autres scénarios, plus sombres et plus violents, peuvent se dessiner.
Quand l’alternance démocratique n’existe plus, il reste l’émeute comme seul recours, et le chaos peut aisément suivre.
En analysant l’hégémonie, il y a quelques années, je disais qu’elle conduisait souvent à l’anomie. Je continue à penser que l’anomie, perte de tous les repères permettant à une société de fonctionner, est très envisageable.
Source : Les 4 vérités