Article rédigé par Cardinal Robert Sarah, le 16 octobre 2015
DOCUMENT | Intervention du cardinal Sarah, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, au synode sur la famille. L’auteur de Dieu ou rien (Fayard) propose « trois pensées » : Plus de transparence entre les participants, bien discerner les nouvelles menaces (le laïcisme athée et le fanatisme islamique) et proclamer la beauté du mariage entre l’homme et la femme.
Votre Sainteté, Éminences, Excellences, participants au Synode,
Je propose ces trois réflexions :
1/ Plus de transparence et de respect entre nous
Je ressens un grand besoin d'invoquer l'Esprit de Vérité et de l'Amour, la source de la parrhèsia dans la parole et de l'humilité dans l’écoute, qui seul est capable de créer une véritable harmonie dans la pluralité.
Je dis franchement que dans le précédent synode, sur diverses questions, on sentait la tentation de céder à la mentalité du monde sécularisé et individualiste de l'Occident. Voir dans les prétendues « réalités de la vie » un locus théologicus signifie renoncer à l'espérance dans la puissance transformatrice de la foi et de l’Évangile. L’Évangile qui a transformé les cultures est maintenant en danger d'être transformé par elles.
En outre, certaines des procédures utilisées ne semblaient pas destinées à enrichir la discussion et la communion d’autant qu'elles faisaient la promotion d’une façon de voir typique de certains groupes sociaux des Églises les plus riches. Ceci est contraire à une Église pauvre, signe de contradiction joyeusement évangélique et prophétique avec l’esprit du monde. On ne comprend pas non plus pourquoi certaines déclarations qui ne sont pas partagées par la majorité qualifiée du dernier synode se retrouvent dans la Relatio, puis dans les Lineamenta et l'Instrumentum laboris, alors que d'autres pressions et d’autres questions pressantes très actuelles (comme l'idéologie du genre) sont plutôt ignorées.
Le premier espoir est que, par conséquent, dans notre travail, il y ait plus de liberté, de transparence et d'objectivité. Pour cela, il serait utile de publier les résumés des interventions, afin de faciliter la discussion et d’éviter tout préjudice ou toute discrimination dans la réception des interventions des Pères du synode.
2/ Le discernement de l'histoire et des esprits
Un deuxième espoir : que le synode honore sa mission historique en se limitant pas à ne parler que de certaines questions pastorales (telles que la communion possible des divorcés remariés) mais aide le Saint-Père à énoncer clairement certaines vérités et à donner une direction utile au niveau mondial.
Car il y a de nouveaux défis par rapport au synode de 1980. Un discernement théologique nous permet de voir à notre époque deux menaces inattendues (comme deux « bêtes de l’Apocalypse ») sur des pôles opposés : d'une part, l'idolâtrie de la liberté de l'Occident ; de l'autre, l'intégrisme islamique, le sécularisme athée contre le fanatisme religieux. Pour utiliser un slogan, nous nous trouvons entre « l'idéologie du genre et ISIS ».
Les massacres islamiques et les exigences libertaires occupent régulièrement la une des journaux. (Rappelons-nous ce qui est arrivé 26 juin dernier !). Ces radicalisations proviennent des deux principales menaces pour la famille : sa désintégration subjectiviste dans l’Occident sécularisé par le divorce rapide et facile, l'avortement, les unions homosexuelles, l'euthanasie, etc. (cf. la théorie du genre, les Femen, le lobby LGBT, le Planning familial [IPPF]...). D'autre part, la pseudo-famille de l'islam idéologique qui légitime la polygamie, la soumission des femmes, l'esclavage sexuel, le mariage des enfants, etc. (cf. Al-Qaïda, Isis, Boko Haram...)
Plusieurs indices nous permettent de deviner la même origine démoniaque de ces deux mouvements. Contrairement à l'Esprit de Vérité qui favorise la communion dans la distinction (perichoresis), ceux-ci encouragent la confusion (homo-gamy) ou la soumission (poly-gamy). En outre, ils imposent une loi universelle et totalitaire, sont violemment intolérants, destructeurs des familles, de la société et de l'Eglise, et sont ouvertement christianophobes.
« Nous ne combattons pas contre des êtres de chair et de sang... » Nous devons être inclusifs et accueillants à tout ce qui est humain ; mais ce qui vient de l'Ennemi ne peut pas et ne doit pas être assimilé. Vous ne pouvez pas associer le Christ et Bélial ! Ce que le nazisme, le fascisme et le communisme furent au XXe siècle, les idéologies homosexuelles, l'avortement en Occident et le fanatisme islamique le sont aujourd'hui.
3/ Proclamer et servir la beauté de la monogamie et de la famille
Face à ces deux défis mortels et sans précédent (homo-gamy et poly-gamy), l'Église doit promouvoir la véritable « épiphanie de la famille ». À cette tâche, le pape (en tant que porte-parole de l'Église) peut contribuer, avec les évêques et les pasteurs du troupeau chrétien, qui est « l'Église de Dieu, qu’il a obtenue par son propre sang » (Actes, 20-28).
Nous devons proclamer la vérité sans crainte, c’est-à-dire le plan de Dieu, qui est la monogamie dans l'amour conjugal ouvert à la vie. Gardant à l'esprit la situation historique que je viens de rappeler, il est urgent que l'Église, à son sommet, déclare définitivement la volonté du Créateur sur le mariage. Combien de personnes de bonne volonté et le bon sens pourront se joindre à cet acte lumineux de courage de l'Église !
Avec une parole forte et claire du Magistère suprême, les pasteurs ont la mission d'aider nos contemporains à découvrir la beauté de la famille chrétienne. Dans ce but, il faut d'abord promouvoir tout ce qui représente une véritable initiation chrétienne des adultes, car la crise du mariage est essentiellement une crise de Dieu, mais aussi une crise de la foi, issue de l’initiation chrétienne des enfants.
Ensuite, nous devons discerner ces réalités que l'Esprit Saint suscite pour révéler la vérité de la famille comme intime communion dans la diversité (homme et femme), généreuse dans le don de la vie. Nous avons le devoir urgent, comme évêques, de reconnaître et de promouvoir les charismes, les mouvements et les réalités ecclésiales à travers lesquels la famille se révèle vraiment comme prodige d'harmonie, d'amour de la vie et d'espérance dans l'Éternité, comme berceau de la foi et école de charité. Et il y a tant de telles réalités offertes par la Providence, depuis le concile Vatican II, qui nous offrent ce miracle.
Traduction française "Liberté politique" depuis la traduction en anglais du texte original en italien, par Diane Montagna.
Source : National Catholic Register
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