Alors que les débats éthiques se multiplient légitimement sur l'embryon et sur le handicap à la naissance, l'enfant né sans vie est le grand oublié de notre société, comme si la vie avant la naissance n'avait aucune valeur.

 

L'opération " enfants nés sans vie " lancée par le professeur Jacques Montagut, se présente comme un moyen de sensibiliser l'opinion publique et par elle le décideur politique au respect et à la sollicitude dont ils relèvent ainsi que leur environnement familial.

La mort de ces plus petits des humains est taboue, enfouie dans un secret parental que tout incite à garder en dehors de quelques espaces de parole associatifs.

Notre société ne les a que trop ignorés : depuis la circulaire ministérielle du 30 novembre dernier, l'enfant mort-né après 22 semaines d'aménorrhée peut relever d'une déclaration " d'enfant sans vie ". Si dans les dix jours qui suivent, le corps n'est pas pris en charge par la famille pour une inhumation ou une incinération, il est dans la situation de ceux de moins de 22 semaines, voué à un devenir incertain : non déclaré à l'état civil, traité collectivement par incinération avec les déchets anatomiques et placentaires des établissements de santé, non reconnus en droit civil, administratif ou social pas plus que celle qui l'a porté...

Le professeur Montagut y voit un véritable " no fœtus land juridique " : non déclarés à l'état civil, l'enfant qui meurt à la naissance peut-être " traité collectivement avec les déchets anatomiques des établissement de santé, par incinération ou enfouissement, non reconnus en droit civil, administratif ou social "...

La démarche de deuil pour les parents est alors bien difficile, particulièrement pour ceux qui, nombreux rechercheront en vain la trace de leur enfant et un lieu où se recueillir.

À l'annonce du premier congrès français, le 26 janvier dernier à Toulouse, qui va mettre en commun la réflexion et l'expérience des soignants et des accompagnants dans la prise en charge des interruptions médicales de grossesse et des décès périnataux ainsi que ses incidences sur le déroulement du deuil, l'opération " enfants nés sans vie " lance un appel :

- d'une part à toutes les maternités de France, afin que s'organise un isolement et une identification des fœtus de toute autre pièce opératoire avant leur crémation, notamment pour ceux qui ne sont pas pris en charge par les familles,

- d'autre part à toutes les communes de France, pour la mise en place spécifique d'un jardin du souvenir des enfants nés sans vie dans leur cimetière et d'un registre de déclaration pour les familles ; enfin, que puisse être allouée, comme pour les autres actes de naissance et de décès, une aide aux familles financièrement en difficulté qui demandent l'inhumation ou la crémation d'enfants nés sans vie.

À cet effet, le site www.nesansvie.org invite les maternités et les communes dont la mise en place des dispositions précédemment énoncées est effective ou en cours, à bien vouloir s'inscrire dans la rubrique correspondante. Un forum est à la libre disposition de tous ceux qui souhaitent intervenir sur le site.

Cette prise de conscience du monde médical de la relation du fœtus avec sa mère, dépourvue de statut particulier, témoigne du malaise de la société à l'égard de la vie avant la naissance. Celui-ci se manifeste aujourd'hui sur les conséquences de la fin de cette vie. L'opération " Enfants né sans vie " ne remet pas en cause le principe de l'IVG (ou l'interruption " médicale " de grossesse), mais ses conséquences, à travers le respect du corps de l'enfant, sont nettement posées. On notera que l'opération parle bien d'" enfant " et non de fœtus.