[Bruxelles] - La pétition européenne en faveur de la mention de l'héritage chrétien dans le projet de traité européen a été officiellement enregistrée par la commission des Pétitions du Parlement européen, sous le n° 404/2004.

Présentée le 22 novembre par Élizabeth Montfort, porte-parole des organisations de la société civile à l'origine de la pétition, la pétition a été déclarée recevable par 6 voix contre 3. Le 25 novembre, Élizabeth Montfort intervenait à nouveau devant la commission des Affaires constitutionnelles, compétente sur le fond, afin que l'objet de la demande de la pétition soit intégré dans le rapport du Parlement européen sur le projet de traité constitutionnel. Voici le texte intégral de son intervention.

"LA PETITION sur la référence de notre héritage chrétien est une initiative unique en Europe. Elle a recueilli plus de 1 170 000 signatures à ce jour, et a été soutenue par une cinquantaine d'ONG représentant 55 millions d'adhérents.

C'est au nom de ces signataires que je m'exprime.

C'est la première fois qu'en Europe un telle initiative obtient l'adhésion d'un si grand nombre de citoyens, anticipant d'une certaine manière la mise en œuvre du futur Traité qui reconnaît le droit d'initiative populaire (art. 47-1) à condition de recueillir sur une question plus d'un million de signatures.

Enfin, cette pétition a été enregistrée en juin 2004 par la commission des Pétition qui l'a déclarée recevable. Cette commission, réunie le 22 novembre, a adopté, à une forte majorité, la proposition d'inclure cette référence dans les lois nationales de ratification pour les États qui le souhaitent.

En effet, le nombre de pays favorables n'a cessé d'augmenter : au sommet européen de Thessalonique, lorsque le président Giscard d'Estaing a remis aux chefs d'État le projet de Traité, cinq États se déclaraient favorables. Ils sont aujourd'hui vingt et un. Une véritable prise de conscience s'est affirmée : notre héritage religieux est en effet l'héritage chrétien.

Cependant, je voudrais exprimer un regret et une satisfaction.

Un regret

Malgré un élan populaire sans précédent, et sans qu'il y ait eu de réactions négatives significatives — sauf en France — nous n'avons pas été écoutés. La mention de notre héritage chrétien n'a pas été retenue.

Il est vrai que le préambule d'un traité n'est ni juridique, ni obligatoire. Dès lors que les membres de la Convention en décidaient la rédaction, approuvée par la CIG, il était normal d'en attendre une rédaction fidèle à la vérité de notre histoire.

Le préambule est un texte explicatif qui définit l'identité de l'Europe, c'est-à-dire notre histoire d'où découlent nos valeurs communes pour préparer un avenir commun. Omettre délibérément l'héritage chrétien parmi les héritages religieux est regrettable, car c'est occulter une partie essentielle de notre civilisation. C'est prendre le risque de construire l'Europe sur le sable.

Une satisfaction

Dans le texte du projet du Traité lui-même, nous notons avec satisfaction l'article 52 et l'article 10 de la Charte européenne des droits fondamentaux.

Le premier reconnaît aux Églises et aux communautés de croyants le statut tel qu'il existe dans les États membres ainsi qu'un dialogue régulier avec elles, pour leur contribution spécifique.

Le second concerne la liberté de conscience et religieuse et l'exercice du culte d'une manière publique ou privée.

C'est la première fois qu'un traité européen inclut, dans sa partie juridique, cette reconnaissance : elle est capitale. De ce point de vue, le nouveau traité est plus satisfaisant que le traité de Nice. Cela mérite d'être souligné.

Incontestablement, cette mobilisation et cet élan populaire auront marqué l'intérêt de ces citoyens d'Europe centrale et orientale et d'Europe occidentale, pour la construction européenne. La réunification de l'Europe, le 1er mai 2004, nous oblige à passer d'un espace économique et administratif à une communauté de valeurs, ces valeurs telles qu'elles sont exprimées dans l'article 2 : " respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d'égalité, de l'Etat de droit, ainsi que le respect des droits de l'homme "...

Ces valeurs reconnues et partagées par tous les États membres concernent tous les Européens, sans exception. Elles portent l'empreinte de notre héritage chrétien. Ces valeurs sont les principes fondateurs de l'Europe réunifiée : la nouvelle Europe !

Nous demandons, aujourd'hui, au Parlement européen, à la Commission et au Conseil de veiller à ce que ces valeurs ne soient jamais oubliées dans les futurs textes européens et qu'elles soient la référence de leur rédaction.

Le président de la Convention, M. Giscard d'Estaing, n'a-t-il pas dit lui-même que par héritage religieux, il fallait entendre héritage chrétien ? Cela aurait été si simple de l'exprimer clairement !

* Élizabeth Montfort, ancien député européen, est porte-parole de la pétition "Héritage chrétien".

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