Nos coups de coeur

Notre Etat

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Notre  Etat
  • Auteur : Bernard Spitz, Roger Fauroux
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Crise de l'État, réforme de l'administration ? La question ainsi posée n'est pas un faux-fuyant.Si l'État donne forme à la société sous l'impulsion de sa tête politique, il ne le fait pas sans la médiation de ce corps propre à nos systèmes démocratiques qu'est l'administration.

Dans une livraison de Liberté politique parue en octobre 1998 (n° 6, " l'État en questions "), Pierre Manent a rappelé comment l'administration avait été l'instrument de la transformation des sociétés occidentales en permettant tout à la fois l'expression de l'autorité politique et l'égalisation des citoyens devant elle.Le volumineux ouvrage intitulé Notre État que vient de publier un collectif coordonné par Roger Fauroux et Bernard Spitz chez Robert Laffont s'inscrit dans cette même ligne de pensée. Les auteurs en sont nombreux, près de 30, choisis de façon éclectique quoique plutôt dans une mouvance de gauche : certains sont connus du grand public pour avoir exercé des responsabilités politiques ou entrepreneuriales comme Nicole Notat, Michel Rocard ou Jean Peyrelevade ; d'autres se rangent parmi les intellectuels comme Nicolas Baverez, ou Patrick Weil ; la plupart " se contentent " d'être des hauts fonctionnaires en poste et chargés d'importantes responsabilités dans les secteurs dont ils parlent ; mais l'unité de perspective n'en souffre pas pour autant.Car le principal apport de cet ensemble de réflexions réside dans l'espace intermédiaire qu'il prétend occuper, entre les slogans électoraux aussi vides que rapidement oubliés, et la réflexion politique ou philosophique qui éclaire le sens plus qu'elle n'entre dans le contenu concret de la réforme de l'État. Ce champ d'un concret qui résiste et se laisse difficilement dompter, fait de fonctionnaires de plus en plus nombreux et inquiets, d'une vie administrative qui a ses logiques propres, de rapports institutionnels complexes, les auteurs prétendent l'examiner d'un œil clinique et critique. Le constat n'étonnera personne dans sa sévérité : médiocrité croissante, pusillanimité, capitulation sous les rapports de force, le tout mal camouflé par une phraséologie essoufflée du " service public " ; mais formulé de l'intérieur il n'en est que plus alarmant.Quatre grands thèmes transversaux animent cette étude d'ensemble. Tout d'abord le besoin d'une gestion intelligente du personnel, par le recours aux techniques modernes de management, l'évaluation des performances et la préparation des reconversions à venir. Ensuite une véritable décentralisation des pouvoirs, passant par la désimbrication des compétences, afin de les rapprocher d'un citoyen plus client qu'administré. Puis la simplification des procédures, pour faire prévaloir le fond sur le formalisme et privilégier la rapidité des prises de décision. Enfin, question vitale, la remise à plat des finances publiques dans une perspective de productivité et de mesure des résultats, car un État criblé de dettes se trouve bientôt dans la main de ses créanciers et condamné à des mesures sauvages.Est-il illusoire d'attendre que l'État se réforme ainsi lui-même ? Quelques exemples y sont décrits qui en montrent la possibilité : celui des télécommunications est patent ; celui des armées, bien que moins connu, n'est pas moins intéressant. À l'inverse, l'échec de la réforme de " Bercy ", décrit avec précision, n'incite pas à l'optimisme. C'est là que l'évocation de la réforme de l'État en Italie, faite par le ministre italien de la Fonction publique, prend tout son intérêt : de ce côté-ci des Alpes, nous ne soupçonnons pas l'ampleur et le sérieux des mutations engagées, ni la volonté politique qui anime tous les partis en vue de sa réussite. À ce stade s'arrête en effet le travail des experts, indispensable et trop souvent escamoté. Certes, ils ne remettent pas fondamentalement en cause le cadre existant (faut-il d'ailleurs l'attendre d'eux ?) ; mais ils fournissent aux dirigeants politiques la matière première d'une réflexion et d'une action qui s'incarnent effectivement dans la réalité. Voilà un critère possible de choix à l'heure des prochaines échéances électorales. En effet, comme le souligne Roger Fauroux dans son introduction, " ce sont les politiciens de talent qui nous manquent, plus que les Antigone qui pullulent ".FRANÇOIS DE LACOSTE LAREYMONDIE


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