Birthe Lejeune : mort d’une infatigable militante

Source [Valeurs actuelles] Birthe Lejeune est décédée ce 6 mai 2020, 26 ans après son mari le professeur Jerôme Lejeune dont elle avait partagé et poursuivi l’infatigable combat pour les malades atteints de trisomie 21.

« Nous n’abandonnerons jamais. » C’est ce qu’avait promis le professeur Jérôme Lejeune et c’étaient les derniers mots du dernier billet d’humeur que son épouse rédigeait régulièrement dans la lettre de la Fondation qu’elle avait fondé deux ans après sa mort. Birthe Lejeune a rendu l’âme ce mercredi 6 mai 2020, au terme d’une vie incroyablement militante. La fondation dont elle était encore vice-prédisente a aujourd’hui confié sa tristesse, précisant qu’elle « devait tout » à celle qui était son « âme » et son « être le plus cher ».

Compagne d’un chercheur devenu incontournable

Danoise de naissance, Birthe Bringsted arrive à Paris comme jeune fille au pair, à l’âge de 21 ans, et rencontre Jérôme Lejeune lors d’une visite à la bibliothèque Sainte Geneviève. Deux ans plus tard, elle devient catholique et épouse le jeune homme. Dans les années qui suivent, Birthe Lejeune porte et élève leurs cinq enfants tandis que Jérôme Lejeune gravit un à un les échellons de sa brillante carrière scientifique. En quelques années, il est recruté dans le service du professeur Turpin à l’hôpital Saint Louis, nommé expert français sur les radiations aux Nations Unies et participe à la découverte de la trisomie 21, en janvier 1959. Les Américains lui proposent alors la nouvelle chaire de génétique à la Columbia university, mais Birthe et Jérôme refusent le salaire mirobolant pour rester en France. Trois ans plus tard, il devient expert en génétique à l’Organisation Mondiale pour la Santé, reçoit le prix Kennedy, devient professeur de la nouvelle chaire de génétique fondamentale à la Faculté de médecine de Paris et chef de l'unité de cytogénétique à l'Hôpital Necker-Enfants-Malades. Il est devenu incontournable.

Jusqu’au 3 octobre 1969, lorsque Jérôme Lejeune reçoit le prestigieux William Allen Memorial Award à San Francisco. Il prononce alors le discours qui fera basculer sa carrière, avec l’indéfectible soutien de sa femme Birthe. Il se déclare très fermement contre l’avortement qui pourrait être utilisé avec sa découverte pour éliminer les malades atteints de trisomie 21. Ce qu’il avait prévu, avec sa femme, arrive : sa carrière est brisée. Une autre s’entame, au service de ses « petits patients ».

Militante infatigable

Tandis que Jérôme Lejeune est un scientifique très universitaire, son épouse Birthe est une infatigable militante dans l’âme : tous deux forment un couple aussi étonnant que productif dans le combat. En 1973 par exemple, lorsqu’elle organise, avec lui, la déclaration des médecins de France contre l’avortement. Jérôme Lejeune est évidemment d’accord sur le fond, mais c’est elle qui contacte, reçoit, compte et recompte les 18 000 signatures ! En 1974, Jérôme Lejeune est nommé membre de l’Académie Pontificale des Sciences par Paul VI, le début d’une longue histoire d’amitié avec Rome et le Vatican, que Birthe Lejeune aura poursuivi jusqu’aux dernières années de sa vie, bien au-delà de l’incroyable amitié que le couple — et la famille toute entière — a noué avec le pape Jean-Paul II.

Les enfants sont désormais grands, et Birthe Lejeune accompagne son mari dans tous ses voyages internationaux. Malgré les déboires scientifiques dus à son engagement, Birthe Lejeune le soutient inconditionnellement sur le fond comme sur la forme. Elle se réjouit de son statut de membre de l’Académie des Sciences morales et politiques, mais ne baisse pas les bras lorsque le CNRS lui supprime ses financements de recherche. Leur combat est commun.

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