Le bâtonnier de la Drôme démissionne, mais assume ses propos

Source [Le Parisien] Les commentaires virulents de Me Chauvin à l’encontre de l’auteur présumé de l’attaque au couteau qui a tué deux personnes le 4 avril à Romans-sur-Isère avaient suscité l’indignation de nombreux avocats.

Il n'a pas résisté à la polémique. Dans la semaine du 20 avril, Me Thierry Chauvin a annoncé qu'il démissionnait de son poste de bâtonnier du barreau de Valence (Drôme). Depuis la révélation sur le site du Parisien de ses propos tenus sur Facebook après l'attaque mortelle de Romans-sur-Isère, l'avocat était au centre d'une violente controverse au sein de la profession. Bon nombre de ses confrères lui reprochaient d'avoir déshonoré sa robe. Or, même s'il a annoncé sa démission, le futur ex-bâtonnier continue à s'en prendre à ses contempteurs. In fine, c'est le sens du métier d'avocat que cette affaire remet en lumière.

Retour sur les faits. Samedi 4 avril, Abdallah Ahmed-Osman, un réfugié soudanais, poignarde mortellement deux personnes et en blesse cinq autres à Romans-sur-Isère (Drôme). Cette attaque au couteau agite le groupe privé Facebook « avocats Valence » et ses 137 membres. Un participant s'en prend à ses « connards » de confrères qui souhaitent défendre un suspect qu'il qualifie de « sous-merde ».

Thierry Chauvin, bâtonnier depuis le 1er janvier, approuve la publication, laisse entendre qu'il serait réticent à lui désigner un défenseur et va même encore plus loin : « Il peut crever où il veut, rien à… » écrit-il, en faisant référence à l'auteur présumé, arrêté par la police. Contacté, l'avocat plaide alors l'ambiguïté du bouton pour l'approbation du message initial, mais assume ses propos peu amènes envers le suspect. « C'est un jugement de valeur qui n'engage que moi, et pas le bâtonnier. C'est une opinion tout à fait personnelle tenue dans un groupe privé. C'est peut-être un peu exagéré, mais cela montre le degré de bienveillance que j'éprouve envers ce genre d'individus », explique-t-il encore à notre journal.

La mise en ligne de l'article le 10 avril suscite un flot de réactions indignées parmi ses pairs. « Rendez-nous le bâtonnier Bocquillon », écrit par exemple sur Twitter le célèbre avocat-blogueur « Me Eolas ». Robert Bocquillon, ancien bâtonnier de la Haute-Marne, est resté célèbre pour s'être porté volontaire pour défendre Patrick Henry, l'assassin du petit Philippe Bertrand, en 1976.

Le 13 avril, neuf avocats lyonnais signent une tribune dans la revue spécialisée « Dalloz actualité » dans laquelle ils dénoncent un reniement de son serment d'avocat. « Cet état est une charge qui nous impose et nous contraint, mais pour la plus belle des missions. Celle de défendre, d'être en première ligne aux côtés de nos semblables », écrivent-ils. « Car cet homme que vous qualifiez de mots injurieux, cet homme dont on sent à quel point vous voulez vous tenir éloignés, à quel point il vous répugne, au point de le priver de défense et même de lui en dénier le droit, cet homme-là […] est l'un des nôtres […], poursuivent les auteurs. Il nous ressemble. Nous sommes faits de la même chair, des mêmes os et le même sang que le vôtre coule dans ses veines. C'est notre frère. »

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