source[Salon Beige]

La démission surprise du Premier ministre libanais Saad Hariri, proche de l'Arabie saoudite et critique du Hezbollah pro-iranien, fait craindre que le Liban ne plonge dans de nouvelles violences. C'est depuis l'Arabie Saoudite, pays dont il a la nationalité, que l'annonce a été faite. En ligne de mire : l'omnipotence du Hezbollah. En démissionnant, Saad Hariri a dénoncé la "mainmise" et "l'ingérence" de l'Iran dans les affaires libanaises à travers son allié le Hezbollah. Ce parti politique armé est membre du gouvernement de Saad Hariri formé il y a moins d'un an.

Le Liban est depuis plus d'une décennie profondément divisé entre le camp emmené par M. Hariri, un sunnite soutenu par l'Arabie saoudite, et celui dirigée par le Hezbollah chiite, appuyé par le régime syrien et l'Iran. Son départ intervient dans un contexte de fortes tensions sur plusieurs dossiers entre Ryad et Téhéran.

Les analystes n'écartent pas la possibilité d'une offensive contre le Hezbollah, que ce soit de la part de l'Arabie saoudite ou, plus probable, d'Israël.

Le patriarche d’Antioche des maronites, le cardinal Boutros Bechara Raï, va se rendre ces prochains jours en Arabie saoudite et y rencontrer le roi Salmane et le prince héritier Mohammed ben Salmane. Sa visite à Riyad suit celles de Samir Geagea (Forces libanaises) et de Sami Gemayel (Kataeb) en septembre, et du Premier ministre Saad Hariri fin octobre. L’Arabie saoudite est en train de s’assurer de ses alliés libanais chrétiens et sunnites contre les chiites du Hezbollah.

D’autre part il y a le contexte interne à l’Arabie saoudite. Le régime wahhabite a annoncé que les femmes pourraient conduire une voiture sous certaines conditions, qu’elles auraient accès aux tribunes de deux stades de foot… Surtout, le roi a annoncé la création d’une Haute Autorité chargée d’élaborer une « référence scientifique solide et indiscutable qui permettra de vérifier l’authenticité des hadiths », afin de supprimer « tous les textes qui contredisent les enseignements de l’islam et justifient que des crimes, des meurtres et des actes terroristes soient commis en son nom ». Cette annonce va de pair avec la destitution, voire l’arrestation, de nombreux prédicateurs « extrémistes », et avec diverses initiatives du prince héritier Mohammed ben Salmane al Saoud (photo), et son discours choc du 24 octobre :

« L’Arabie saoudite n’était pas comme ça avant 1979 […] Nous voulons juste revenir à ce que nous avions, un islam modéré ouvert au monde, ouvert à toutes les religions. 70% de la population en Arabie saoudite a moins de 30 ans. Et franchement, nous n’allons pas perdre les 30 prochaines années à gérer des idées extrémistes. On va les détruire aujourd'hui. On veut vivre une belle vie qui traduise notre religion modérée et nos bonnes manières pour coexister et vivre avec le monde. »

Mohammed ben Salmane al-Saoud, fils de la troisième femme du roi Salmane, a 32 ans. Il a été désigné prince héritier à la surprise générale en juin dernier, et donc vice-Premier ministre. Il est aussi président du Conseil des affaires économiques, et ministre de la Défense depuis 2015. Il a ordonné l'arrestation de 11 princes et de dizaines de ministres actuels ou anciens, ainsi que le limogeage de puissants responsables militaires.