En rentrant vers Paris, vendredi dernier, après une conférence dans cette bonne ville de Moulins, je pris la décision stupide de m’arrêter à La Charité-sur-Loire, ravissante petite cité ancienne, dominée par sa superbe abbaye clunisienne. Il ne fallait pas le faire : l’art contemporain avait frappé !

Entre autres choses, les rues étaient pavoisées de panneaux grotesques à connotation scatologique, et la merveilleuse église était encadrée d’un double panneau de grande taille : « PURE » (cela commençait bien) et « PUTE »... Cela finissait donc mal, et cela a d’ailleurs mal fini pour ce panneau, que je détruisis promptement. J’allais montrer mon acte meurtrier à l’Office du tourisme, qui sembla très compréhensif envers l’assassin, et n’eut aucun mot aimable pour la p…

Le lendemain, je flânais près du Grand Canal du parc du château de Versailles, lorsque je découvris, regardant vers le château, un immense tas de ferrailles et de rochers : c’était, me dit-on pompeusement, le « vagin de la reine ». Un vagin de centaines de tonnes, ce n’est pas rien ! Ma tête tourna : pute hier, vagin aujourd’hui, quoi demain ? J’étais abasourdi.

Pour bâtir cette immondice : des travaux gigantesques, et le parc défiguré. La responsable de cette horreur : Catherine Pégard, nommée par Nicolas Sarkozy parce que journaliste, et n’ayant donc aucune légitimité culturelle à s’occuper d’un des plus beaux sites historiques de France.

Vagin à sous

Côté mairie : timide protestation — les Versaillais ulcérés aimeraient ne pas être seuls dans ce nouveau combat. Côté fabriquant de l’immondice, déclaration gaullienne : « Je lutte contre l’obscurantisme, et suis scandalisé par la France qui devrait me rétribuer pour ce que je lui apporte. » En gros : après les machines à sous, le vagin à sous.

Les ingrédients du libéralisme-libertaire sont réunis dans cette vaginale affaire : fric à gogo, fonctionnaires complices de mécènes débauchés ; déconstruction culturelle à grande échelle, visant des millions de visiteurs ; obsession sexuelle boboïsée, devenue l’alpha et l’omega de vieilles élites décadentes, qui ne pensent plus qu’à ça.

L’affaire ne s’arrêtera pas là : la goutte d’eau, de la taille de l’immondice, va faire déborder le vase et peut-être le casser, n’en doutons pas.

 

François Billot de Lochner

 

 

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