Nicolas Dupont-Aignan

Le candidat à l’élection présidentielle de 2012, fondateur de Debout la République, député de l’Essonne et maire de Yerres, votera contre le pacte budgétaire et propose une dissolution de la zone euro pour sortir de la crise. 

Vous êtes opposé au pacte budgétaire. Pour quelles raisons ?

Parce que je suis un démocrate et que ce pacte budgétaire dépossède les élus de la Nation et le peuple français du pouvoir central d’un parlement qui est de contrôler la dépense publique et de voter la loi. Ce pacte va transférer ce pouvoir à la Commission de Bruxelles qui n’est pas élue et à la Cour de justice du Luxembourg qui n’est pas élue. C’est très choquant.

Deuxième point. Non seulement on casse les démocraties nationales mais en plus pour transférer des pouvoirs à des gens qui ont tout échoué. Si ces gens avaient réussi ce serait choquant sur le plan démocratique mais on pourrait dire qu’ « on fait une bonne action ». Et en plus ils ont vraiment tout échoué. Ils ont précipité l’Europe dans la ruine, ils ont créé une monnaie unique qui ne marche pas, ils ont accepté un libre-échange déloyal qui ruine nos industries, ils ont ouvert toutes les frontières qui suscitent des mouvements migratoires incontrôlés, immaîtrisables. Et on va transférer tout le pouvoir à ces gens là ? C’est extrêmement grave ce qui se produit et tout ça dans l’indifférence générale.

Parlons de vos solutions pour sortir de la crise. Vous proposez une dissolution de la zone euro. Une telle dissolution est-elle politiquement possible ? Dans le cas contraire, êtes-vous favorable à une sortie unilatérale de la monnaie unique ?

Première chose. Il faut démonter la zone euro et il faut le faire si possible tous ensemble. Pourquoi ? Parce que c’est la raison. Ce qui est déraisonnable c’est de rester dans la zone euro, de voir les pays les plus riches gagner toujours plus et les pays les plus pauvres sombrer dans le chaos social et politique. C’est ce que nous prépare l’euro si on continue encore cinq ans. Mais je suis raisonnablement optimiste dans la mesure où je pense que les faits vont s’imposer naturellement, même si les dirigeants européens veulent nier les faits économiques. Il y a un moment où on ne peut pas nier l’économie ! Si, par malheur, les chefs d’État continuent à s’arc-bouter sur ce système fou, il est clair qu’il faudrait que la France sorte unilatéralement de l’euro. Très vite, les marchés financiers comprendront que c’est une chance puisque c’est le seul moyen d’avoir une monnaie moins chère, de relancer l’économie productive et la création de richesses. On présente la sortie de l’euro comme un paysage apocalyptique, ce serait apocalyptique pour les marchés financiers qui verraient la banque de France financer à 0% l’État. Elle serait apocalyptique pour ceux qui en profitent à mort, qui sont certaines multinationales et les banques. La sortie de l’euro sera une délivrance pour les peuples et elle s’organisera très naturellement.

L’idéal, c’est une sortie coordonnée de manière à maintenir un système européen monétaire qui permette des parités fixes entre des monnaies réévaluables ou dévaluables tous les ans avec un fond d’organisation. Il y a la solution parfaite qui est le démontage organisé de l’euro et puis il y a la solution plus difficile, inéluctable si les dirigeants ne changent pas qui est de sortir au plus vite.

Je ne vous dis pas que ce sera facile. Il est évident que ça devra être accompagné de mesures de rigueur, d’un protectionnisme européen minimum. A court terme, comme toute dévaluation, ça renforcera le prix des produits importés mais ça incitera aussi les Français à consommer des produits de chez eux. C’est un civisme imposé. Mais les difficultés de la sortie de l’euro seront toujours inférieures aux difficultés du maintien de l’euro.

Le protectionnisme que vous avez évoqué, comment vous le mettez en place concrètement ? 

Le premier protectionnisme, il est monétaire, c’est la sortie de l’euro. Il est beaucoup plus simple. D’ailleurs pourquoi les pays font du protectionnisme monétaire ? Parce qu’il est beaucoup plus difficile de faire du protectionnisme tarifaire. Quand la Grande-Bretagne dévalue sa monnaie, quand la Chine sous-évalue sa monnaie, c’est du protectionnisme monétaire.

Deuxième point : il y a du protectionnisme intelligent qui peut être fait tout de suite. C’est l’étiquette, un label. Que les Français en consommant les produits sachent quelle est la part de produit importé dans le produit. Ça fait appel au civisme. Deuxième protectionnisme intelligent qui peut être fait tout de suite, c’est de faire respecter les règles de l’OMC. Il n’est quand même pas normal que la Chine, la Corée, tant de pays, ne respectent pas les règles de l’OMC sur la contrefaçon. La Chine est rentrée dans l’OMC il y a 10 ans, elle n’en respecte toujours pas les règles. Donc, déjà, faisons respecter les règles de l’OMC.

La troisième solution, c’est de mettre en place une taxe aux importations sur les produits fabriqués à partir de l’esclavage humain ou du saccage environnemental. Si on le fait raisonnablement, ciblé, produit par produit, on peut tout à fait le faire. Jean-Luc Gréau l’a très bien expliqué. D’ailleurs, c’est ce que fait le Congrès américain régulièrement. Donc ce que je propose ce n’est pas un protectionnisme bête et méchant qui fasse de la France une zone autarcique. Ce que je demande, c’est que la France puisse utiliser les armes que les autres pays utilisent.

Abordons aussi la question du coût du travail. Comment vous le baissez pour les PME et les TPE ?

Je me méfie beaucoup de la séparation entre petites entreprises et grandes entreprises. Si nos grands groupes s’effondrent, nos PME ne marcheront pas non plus. Ce qui est vrai, c’est qu’on a mené une politique à Bercy pour les multinationales et jamais pour les PME. Donc, la proposition que je fais, c’est la diminution de moitié de l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis sur le sol français. C’est ce qui se passe aux Etats-Unis et ça se passe très bien. Ça donnerait un coup de fouet à l’investissement productif en France. Deuxième point : il faudrait baisser les charges qui pèsent sur les salaires pour les transférer sur une assiette plus large. Mais n’attendons pas de miracle de cette politique, car si on transférait sur la TVA ça casserait la consommation, si on transférait sur la CSG ça assassinerait les retraités. Donc ça ne peut être fait qu’à la marge. 

La vraie issue, c’est la sortie de l’euro pour faire baisser la monnaie de 20%, le protectionnisme sélectif pour empêcher la concurrence déloyale et la baisse de l’impôt sur les sociétés pour les bénéfices réinvestis et le transfert de charges sociales sur la TVA ou la CSG de manière minime. Si vous faites ça, vous donnez un choc de compétitivité colossal à la France et en trois, quatre ans vous verrez les entreprises revenir en France. Les chefs d’entreprise ne partent pas par bonheur –il y a des voyous partout. Aujourd’hui, la part de l’emploi dans la valeur ajoutée est faible, ce qui fait que si vous avez un effet de compétitivité de l’ordre de 30% vous pouvez relocaliser beaucoup d’activités.

Propos recueillis par Laurent Ottavi.