Source [Atlantico] Les étudiants de terminale de toute la France ont planché sur des questions philosophiques telles que : "La morale est-elle la meilleure des politiques ?" ou bien encore "Reconnaître ses devoirs est-ce renoncer à sa liberté ?".
Atlantico : Dans le même esprit philosophique quelles sont les questions que nous aurions grandement intérêt à nus poser en France aujourd’hui ?
Bertrand Vergely
La France est aujourd’hui confrontée à trois questions essentielles. La première concerne le bonheur, la seconde la tolérance et la troisième la pensée. Quand on interroge les Français à propos du sens qu’ils entendent donner à leur vie, à une écrasante majorité ceux-ci répondent : « être heureux et rendre son entourage heureux ». Cette réponse devrait réjouir. Or, elle n’est pas aussi réjouissante que cela. Le bonheur, c’est bien, a-t-on envie de dire, mais après ? Constatons le : après, il n’y a rien. La pensée reste non seulement figée mais muette. Aussi convient-il que l’on revisite cette notion de bonheur en se posant cette question : « Le bonheur est-il le but de la vie ? ». Kant offre des éléments de réponse quand il rappelle que le bonheur est inséparable de la vertu. Il faut être digne d’être heureux c’est-à-dire vertueusement heureux, explique-t-il. Le bonheur est heureux quand, étant, un combat contre l’inertie, il est une œuvre et un art. .
La deuxième question qu’il importe de se poser renvoie à la tolérance. Que veut dire être tolérant ? Que veut dire l’acceptation de l’autre ? Être tolérant est-ce tout accepter, tout tolérer ? Et ne pas tout accepter ni tout tolérer est-ce être intolérant ? « Quand est-on vraiment tolérant ? » Kant, là encore, apporte des éléments utiles en invitant à faire de la tolérance une affaire de règle et non de rapport à autrui. Plaçons-nous avec autrui dans le cadre de la loi. On est dans la tolérance, la personne d’autrui n’étant pas mise en cause quand il s’agit d’exprimer un désaccord.
Enfin, dernière question. Elle concerne la pensée philosophique. La vraie pensée est une pensée que l’on vit. Or, souvent, trop souvent, la pensée ne vit pas. Elle n’est pas vécue. D’où une apparence de philosophie et, du fait de cette apparence, la justesse de Pascal quand il lance que « la vraie philosophie se moque de la philosophie ». Dans cette perspective, il importe de s’interroger : « À quoi reconnaît-on un philosophe ? »
Yves Michaud :
Pour avoir souvent présidé des commissions de choix de sujets de philosophie au baccalauréat, je sais que les consignes sont impératives : rien d’actualité, rien qui fasse polémique !
Ce ne serait pourtant pas plus mal si la réflexion philosophique portait sur des sujets non pas d’actualité - « l’actu », on en a par dessus la tête - mais par rapport auxquels nous avons à nous orienter.
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