Source [Le blog de Jeannne Smits] On attendait avec anxiété de savoir si le synode des jeunes allait promouvoir l’homosexualité et l’idéologie LGBT, acronyme de combat mise en avant dans l’Instrumentum laboris qui a servi de canevas au travaux des pères synodaux. Le document final, qui a été publié samedi soir 27 octobre à 21 heures, s'est révélé sur ce plan plus subtil qu'on ne le prévoyait. Mais dans l’ensemble, c'est le document lui-même qui est un instrument au service de la révolution dans l'Eglise – révolution démocratique, liturgique, doctrinale. Son langage, très largement calqué sur les expressions familières au pape François, ouvre multitude de portes. Il donne aux éléments les plus progressistes des armes et des outils de pression affûtés d'avance par l'intégration automatique des travaux du synode dans le « magistère ordinaire » : c'est le tour de passe-passe inventé à son orée, à travers la publication d'une nouvelle constitution synodale,Episcopalis communio.
Cette arme, c'est la « synodalité », leit-motiv lancinant du texte alors que la notion n'a guère été présente pendant les débats qui ont résonné depuis début octobre. Elle occupe à elle seul un tiers du document final. Elle est l'outil de la révolution en ce qu’elle institue un pouvoir décisionnaire de la base, une participation au pouvoir vertical clairement affirmé pour les jeunes, les femmes, les laïcs… A l'ouverture du synode, le pape François avait évoqué les « rêves » des jeunes qu'il allait falloir écouter, accueillir, valoriser. Les jeunes, en exprimant leurs désirs, serviraient de fil rouge et de référence aux réflexions des évêques et cardinaux. Absurde en soi, l’idée était d’emblée aggravée par le recours à des jeunes qui, dans leur majorité, souffrent du même déficit de formation catholique que l'ensemble de leur génération et de quelques générations de jeunes qui les précèdent, depuis l'écroulement de la catéchèse doublée d'un décervelage délibérément favorisé par tant de méthodes pédagogiques néfastes employées dans un grand nombre d'écoles du monde, et notamment du monde développé. L’« écoute des jeunes » est au cœur du document : mais un jeune, comme un vieux, peut dire n’importe quoi…D'ailleurs, le document final reconnaît ce fait, comme nous allons le voir. Complaisant envers la modernité, truffé de références à la lutte environnementale au détriment du sens des fins dernières, le document final mérite certainement une analyse serrée que je veux entamer avec vous aujourd’hui. Pour cela, j'ai traduit rapidement nombre des passages les plus contestables, confus, ou tout simplement vides, sachant seul le texte italien officiel existe pour l’heure, complété d’une synthèse qui a été distribuée à la presse et à laquelle je ne ferai pas référence. Il faut savoir que les Pères synodaux eux-mêmes se sont heurtés au problème de la langue. Samedi matin, alors qu'ils devaient découvrir l'ensemble du document final à l'aide d'une traduction simultanée orale, en disposant de quelque temps de réflexion pour déterminer leur vote paragraphe par paragraphe, le temps s'est révélé court, rapporte Diane Montagna de LifeSiteNews. De ce fait, la troisième et dernière partie a été rapidement abordée dans l'après-midi, avec vote immédiat après la traduction simultanée qui était aussi le moment de la découverte du texte. Ainsi s'élabore en octobre 2018 le « magistère ordinaire ». Tous les paragraphes ont été adoptés à une majorité des deux tiers au moins, Certains avec plus de voix que d'autres. Sandro Magister détaille les paragraphes le moins bien adoptés. Mais de toute façon, mieux qu'une majorité, ce document final serait le résultat de l'action de l’Esprit Saint dans « l'espace protégé » ou Il pouvait agir, notamment parce que rien ne pouvait en sortir qui ne soit contrôlé. L'Esprit soufflant à travers la jeunesse édictant leur conduite aux membres de la hiérarchie de l’Eglise, et qu'il faut donc écouter : c'est à peu près cela, si l’on veut bien comprendre ce qu’a dit le pape François à la fin des votes. Bien sûr, il y a dans le document final des expressions heureuses, des rappels nécessaires de la beauté de la vocation chrétienne… mais ils n'en forment pas l’essentiel. De toute façon, les médias consensuels en parleront amplement. N'est-ce pas La Croix qui annonce en titre un document final « consensuel » ? en vérité, il n'est pas, ou ne le serait pas si on en analysait le détail. Je vous propose de découvrir, avec un peu de patience, ce que j'y ai décelé d’inquiétant. A noter avant de commencer : le plus gros des références dans ce document de 60 pages se trouve dans les documents de Vatican II dont on perçoit qu'il cherche à en imposer une sorte d’aboutissement. A beaucoup d’égards, on regrette que le document final ne puise pas dans la riche expérience des saints qui ont travaillé auprès des jeunes – car ni les saints ni les jeunes n'ont changé de nature – ni dans celle des environnements catholiques où la foi est effectivement transmise et où les vocations sacerdotales et religieuses éclosent. Il est vrai que les jeunes d'esprit traditionnel se plaignent de n’avoir pas été sollicités ni écoutés lorsqu'il s'agissait de choisir des représentants pour les travaux préparatoires du synode sur les jeunes.
Les textes traduits (traduction non officielle par mes soins) sont en maigre, renvoyant à chaque fois au paragraphe concerné, dont la traduction est partielle ou complète selon les cas. Mes commentaires sont en gras. – J.S.
*** 1. « Vos fils et vos filles prophétiseront. » Dès la première ligne, cette phrase tirée de l'Ecriture sainte accorde à ce qui a été exprimé par les jeunes une valeur religieuse et une sorte de garantie d’authenticité catholique née du fait qu'il serait en ligne directe avec le Saint Esprit. On ne saurait contredire le Saint Esprit. 3. Il est important de clarifier la relation entre l’Instrumentum laboris et le Document final. Le premier est le cadre de référence unitaire et synthétique produit par deux années d’écoute ; le second est le fruit du discernement réalisé et il recueille les noyaux nucléaires « engendrants » sur lesquels les Pères synodaux se sont concentrés avec une intensité et une passion particulières. Nous reconnaissons donc la différence et la complémentarité de ces deux textes. D’emblée, la portée du document final est élargie, puisque l’Instrumentum laboris, vivement critiqué pour son langage sociologisant et l'introduction de l’acronyme LGBT dans un document d’Eglise, est explicitement intégré et invoqué comme texte permettant d'éclairer la lecture du document final. C'est par cette entourloupe que ses aspects les plus controversés ont été introduits par la bande. Note : « Dans le présent document l’emploi du terme « synode » désigne tour à tour la totalité du processus synodal ou bien l’Assemblée générale qui s’est déroulée du 3 au 28 octobre 2018. Cette annonce s'accompagne d'une note tout aussi révélatrice : dans les multiples références au synode – et par conséquent à la synodalité – il faut comprendre qu'elles peuvent parfaitement renvoyer aux travaux préparatoires, au prè-synode, à l’Instrumentum laboris, et à leurs graves et multiples défauts, sans que l'on sache exactement quand c'est le cas et quand cela ne l'est pas. Comble de la confusion. 7. Les jeunes veulent être écoutés. (…) Ils sont nombreux à faire l’expérience de ce que leur voix ne soit pas reconnue comme intéressante et utile dans le contexte social et ecclésial. Dans différents contextes on remarque une faible attention pour leur cri, en particulier celui des plus pauvres et des plus défavorisés, ainsi que le manque d’adultes disponibles et capables d’écouter. Les jeunes ne se sentent-ils pas écoutés ? Mais où sont-ils, pour qu'on les écoute ? Dans de nombreux pays du monde, la pratique religieuse des jeunes catholique est voisine de zéro. Ce fait n'est nulle part mentionné dans le document final. 9. Croire à la valeur théologique et pastorale de l’écoute implique de repenser pour rénover les formes au moyen desquelles le ministère presbytéral s’exprime, et une vérification de ses priorités. En outre, le synode reconnaît la nécessité de préparer des consacrés et des laïcs, hommes et femmes, qui soient qualifiés pour l'accompagnement des jeunes. Le charisme que l'Esprit Saint fait surgir au sein de la communauté pourrait aussi recevoir une forme de reconnaissance institutionnelle pour le service ecclésial. La valeur théologique de l’écoute de ceux qui ne croient pas, de ceux qui croient mais qui sont largement ignorants de leur foi – je demande qu'on explique. De toute façon, ce paragraphe 9 sacralise avant tout le « renouveau », au sens charismatique croit-on deviner, y compris celui du ministère presbytèral. Comment ? Par la démocratie dans l'Eglise : cette idée est déjà en germe dans ce paragraphe. 10. Evoquant « la question œcuménique et interreligieuse », affirme ce paragraphe, « le synode reconnaît et accueille la richesse de la diversité des cultures et se met au service de la communion de l’Esprit ». A garder en mémoire pour la suite. 13. On ne peut pas oublier la différence entre les hommes et les femmes avec leur dons particuliers, leur sensibilité spécifique leur expérience du monde. Cette différence peut créer un contexte où naissent des formes de domination, d'exclusion et des discrimination dont toute la société et l’Eglise elle-même ont besoin de se libérer. La Bible présente l'homme et la femme comme des « partners » (sic) égaux devant Dieu ; toute domination et discrimination fondée sur le sexe est une offense à la dignité humaine. Celle-ci présente la différence entre les sexes elle-même comme un mystère tout aussi constitutif de l'être humain qu'elle est irréductible à des stéréotypes. La relation entre l'homme et la femme est donc comprise selon les termes d'une vocation à vivre ensemble dans la réciprocité et le dialogue, dans la communion et dans la fécondité dans tous les cadres de l'expérience humaine : vie de couple, travail, éducation et d'autres encore. C'est à leur alliance que Dieu a confié la terre. Domination, exclusion, discrimination, stéréotypes : c'est le langage du féminisme de l'idéologie du genre. Il est toujours dangereux d’adopter les mots de l’adversaire. Faut-il vraiment, par ailleurs, qu’hommes et femmes vivent ensemble dans tous les cadres de l'expérience humaine ? Pris littéralement, ce paragraphe dévalorise l'éducation non mixte, les environnements proprement masculins ou féminins. C'est pour le moins une rédaction imprudente ; au pire, elle pourrait être comprise comme une dénonciation des congrégations religieuses où les hommes sont d'un côté, les femmes de l’autre, Ce qu'elle n'est probablement pas. 14. De nombreux Pères synodaux provenant de contextes non occidentaux signalent comment dans leur pays la globalisation apporte avec elle d'authentiques formes de colonisation culturelle, qui déracinent les jeunes par rapport à leur appartenance culturelle et religieuse. Un engagement de l’Eglise pour les accompagner dans ce passage sans que disparaissent les traits les plus précieux de leur propre identité est nécessaire. L’appréciation du processus de sécularisation se révèle diverse. Alors qu'elle est vue par certains comme une occasion précieuse de se purifier d'une religiosité de l'habitude ou bien fondée sur l'identité ethnique et nationale, elle représente pour d’autres un obstacle à la transmission de la foi. Mais dans les sociétés sécularisées nous assistons aussi à une redécouverte de Dieu et de la spiritualité. Cela constitue pour les un encouragements à retrouver l'importance des dynamismes propres de la foi, de l’annonce et de l'accompagnement pastoral. On notera que l'appartenance religieuse peut ici être comprise comme l'appartenance à n'importe quelle religion traditionnelle. On parle aussi d’une redécouverte de Dieu et de la spiritualité sans les définir. Certes, on devine une volonté d’évangélisation en même temps qu'une dénonciation de la foi transmise de génération en génération et donnée aux tout-petits par le baptême dans les pays catholiques et chrétiens. 15. (…) Les institutions éducatives de l'Eglise cherchent à accueillir tous les jeunes, indépendamment de leur choix religieux, de leur provenance culturelle et de leur situation personnelle, familiale ou sociale… Lorsqu'elle est inspirée par le dialogue interculturel et interreligieux, l'action éducative de l’Eglise est appréciée également par les non chrétiens comme une forme d'authentique promotion humaine. Encore une dévalorisation de l'école catholique en tant que telle, qui doit pouvoir protéger son identité suffisamment pour pouvoir être aussi missionnaire. 18. [Situation des paroisses.] Tout en restant la première est la principale forme de l’être-Eglise dans le territoire, plusieurs voix se sont élevées pour montrer comment la paroisse peine à être un lieu significatif pour les jeunes et comment il est nécessaire de repenser la vocation missionnaire. Leur peu de signification dans les espaces urbains, le dynamisme peu important des propositions, ainsi que les changements spatio-temporels des styles de vie exigent un renouveau. Alors que les tentatives d'innovation sont diverses, souvent le fleuve de la vie juvénile court aux marges de la communauté, sans la rencontrer. Je vous laisse méditer sur ce jargon jargonnant. Notez qu’on dénonce une situation sans proposer des formes concrètes d'appel aux jeunes qui se sont éloignés de l’Eglise. On ne se demande surtout pas pourquoi certaines paroisses (ou prieurés ou chapelles) attirent, et attirent même des jeunes non chrétiens. 19. Nombreux sont ceux qui notent que les parcours d'initiation chrétienne ne réussissent pas toujours à faire connaître aux enfants, aux adolescents et aux jeunes la beauté de l'expérience de la foi. Lorsque la communauté se constitue comme lieu de communion et comme vraie famille des enfants de Dieu, elle exprime une force génératrice qui transmet la foi ; là ou au contraire elle cède à la logique de la délégation, là où prévaut l'organisation bureaucratique, l'initiation chrétienne est mal interprétée et devient un cours d'instruction religieuse qui d'habitude s'achève avec le sacrement de la confirmation. Il est donc urgent de repenser à fond d'enseignement de la catéchèse et le lien entre la transmission familiale et communautaire de la foi, en se servant des processus d’accompagnement personnel comme d’un levier. C'est donc mal, le cours d'instruction religieuse ? Il n'a pas été question de la pauvreté des « catéchèses », du manque de connaissance précise de la doctrine, mais qu’importe, puisqu'on demande du « communautaire » en même temps que de l'accompagnement personnel. Comprenne qui pourra. 20 . Séminaires : « Parfois ils ne tiennent pas convenablement compte des expériences précédentes des candidats, en sous-évaluant leur importance. Cela bloque la croissance de la personne… » Un peu plus loin, il sera question de la « relecture de la vie » des candidats dans les séminaires. On ne s'interroge guère sur le manque cruel de candidats ni sur le vieillissement du clergé. 24 . [Sur le monde digital, dénonciation de] « la prolifération des fake news…beaucoup de plateformes favorisent la rencontre entre personnes qui pensent de la même manière, empêchant la confrontation entre les différences ». Bien vu. Mais la référence aux fake news vise aussi ceux qui émettent des doutes sur les innovations dans l'Eglise. 25. « Les phénomènes migratoires constituent au niveau mondial un phénomène structurel et non une urgence transitoire. (…) En général ils sont à la recherche d’opportunités pour eux-mêmes et pour leurs propres familles. (…) De nombreux Pères synodaux ont souligné que les migrants sont un paradigme capable d'illuminer notre temps et en particulier la condition des jeunes ; il nous rappellent la condition originelle de la foi, c’est-à-dire d’être « des étrangers et des pèlerins sur la terre ». Le mot paradigme est décidément employé à toutes les sauces. Ici il faut le comprendre comme l'annonce d'un changement culturel mondial et une remise en cause de l’identité propre de chaque nation, pourtant affirmée ailleurs. Le document final n'est pas à une contradiction près. La recherche du migrant – paix, fuite de la misère, prospérité – n'est de toute façon comparable que de très loin au voyage vers l’Eternité, qui n'abolit pas les patries charnelles. 26. Dans certains pays d’arrivée, les phénomènes migratoires suscitent la crainte et la peur, souvent fomentées et exploitées à des fins politiques. Se diffuse ainsi une mentalité xénophobe, de fermeture et de repli sur soi, face à laquelle il convient de réagir avec détermination. Voir plus haut. Le document final, tout comme l'ensemble des dispositifs antiracistes, considère l'accueil des migrants comme un devoir qui ne souffre pas de contradiction, même lorsque les « peurs » sont fondées face à l'arrivée massive d'une population jeune et étrangère à la foi et à la culture d’origine du pays vers lequel ils émigrent. 39. [Education sexuelle et affective] L’Eglise a une riche tradition sur laquelle construire et à partir de laquelle proposer son propre enseignement dans cette matière : par exemple le Catéchisme de l'église catholique, la théologie du corps développée par Saint Jean-Paul II, l’encyclique Deus caritas est de Benoît XVI, l'exhortation apostolique Amoris laetitia de François. Mais les jeunes, même ceux qui connaissent et qui vivent un tel enseignement, expriment le désir de recevoir de l'Eglise une parole claire, humaine et empathique. Souvent, en effet, la morale sexuelle est cause d’incompréhension et d'éloignement par rapport à l'Eglise, dans la mesure où elle est perçue comme un espace de jugement et de condamnation. Face aux changements sociaux et des modes de vivre l’affectivité, et la multiplicité des perspectives éthiques, les jeunes se montrent sensibles aux valeurs de l'authenticité et de l’engagement, mais ils sont souvent désorientés. Ceux-ci expriment plus particulièrement un désir explicite de confrontation à propos des questions relatives à la différence entre l'identité masculine et féminine, à la réciprocité entre hommes et femmes, à l’homosexualité. Bref, il faut discuter de tout cela et rencontrer leur désorientation avec « empathie ». Cette notion revient souvent dans le document final, et elle est à double tranchant. Car elle peut renvoyer aussi bien à une bienveillance qui doit accompagner la transmission du vrai, qu'à une complicité. Hélas, cette deuxième acception se révèle dans de nombreuses déclarations actuelles d'évêques et même de cardinaux ouverts à l’homosexualité et à la « jeunesse LGBT ». 45. Les jeunes générations sont porteuses d'une approche de la réalité qui présente traits spécifiques. Les jeunes demandent à être accueillis et respectés dans leur originalité. Parmi les traits spécifiques les plus évidents de la culture des jeunes on a signalé la préférence accordée à l'image par rapport aux autres langages de communication, l'importance des sensations et des émotions comme voie d'approche de la réalité et la priorité de la dimension concrète de l’action par rapport à l'analyse théorique. Les rapports d'amitié et l’appartenance au groupe du même âge revêtent une grande importance, cultivée grâce au réseaux sociaux. Les jeunes sont généralement porteurs d'une ouverture spontanée lorsqu'ils sont confrontés aux différences, ce qui les rend attentifs aux thématiques de la paix, de l'inclusion et du dialogue entre les cultures et les religions. De nombreuses expériences dans de nombreuses parties du monde témoignent de ce que les jeunes savent être pionniers dans la rencontre et le dialogue interculturel et interreligieux, dans la perspective de la cohabitation pacifique. Paragraphe très important. D'une part, il prend acte du « changement anthropologique » (comme l'appelait Benoît XVI) en cours chez les jeunes qui n'ont pas appris à raisonner, à verbaliser, et qui préfèrent l’image à la parole. En ôtant qu'ils se réfèrent aux sensations et aux émotions, ce paragraphe confirme que les jeunes ne savent plus analyser ni juger, mais réagissent avec leur « cerveau émotionnel » » ce qu'on appelle le « cerveau droit » qui les rend surtout sensibles à leur ressenti. C'est ce qui explique d'ailleurs leur ouverture aux autres cultures et religions qui ne s'autorisent pas à analyser parce qu'il faut accueillir l’autre. C'est en gros ce que reconnaît ce paragraphe, mais ce sont les derniers mots qui en sont les plus importants : la perspective de la cohabitation pacifique. C'est tout le sens du mondialisme qui, comme le montrent tant de documents des institutions internationales, juge la religion conçue comme vraie et exclusive de toutes les autres comme menace pour la paix et fauteuse de guerres et autres troubles. Des jeunes bloqués dans les sensations et les émotions sont les cibles idéales de ce discours et le démontre par le fait qu'ils « savent être pionniers dans la rencontre et le dialogue interculturel et interreligieux ». CQFD. 46 : Sensibilité à l'égard des thèmes de l’écologie et du développement durable que l’encyclique Laudato si’ a su catalyser. C'est un peu la même chose que dans le paragraphe précédent. Manipulables par l’émotion, les jeunes sens singulièrement ouverts au langage sur le changement climatique qui mène droit vers une certaine divinisation de la nature à laquelle il faut sacrifier l’homme, son principal ennemi dans le langage de l'écologie profonde. 47. Le synode reconnaît et apprécie l'importance que les jeunes donnent à l'expression artistique sous toutes ses formes : nombreux sont les jeunes qui utilisent dans ce domaine des talents qu'ils ont reçus, promouvant la beauté, la vérité et la bonté, grandissant en humanité et dans leurs rapports avec Dieu. Pour beaucoup l'expression artistique est aussi une authentique vocation professionnelle. Nous ne pouvons oublier qu'à travers les siècles la « voie de la beauté » a été un des moyens privilégiés de l'expression de la foi et de l’évangélisation. D’une particulière importance est la musique, qui représente un environnement véritable en soi où les jeunes sont constamment immergés, en même temps qu'il s'agit d'une culture et d'un langage capable de susciter des émotions et de façonner l’identité. Le langage musical représente aussi une ressource pastorale, qui interpelle en particulier la liturgie et et son renouveau. La standardisation des goûts dans le contexte commercial risque parfois de compromettre le lien avec les formes traditionnelles d’expression musicale et liturgique. On sent ici la résistance de certains pères synodaux devant les formes modernes que prennent l’art et la musique. Mais elle n'est qu’évoquée. Est-il bon que les jeunes soient « constamment immergés » dans la musique ? La question n'est même pas posée, alors que l'absence de silence est certainement l'un des fléaux les plus dramatiques dont ils sont victimes, et le moyen le plus sûr pour anéantir la vie intérieure. Si quelqu'un peut me retrouver la vidéo complète du concert d’ouverture du synode, malicieusement citée ici par Michael Matt de The Remnant, je suis preneuse. Les quelques extraits que vous y verrez disent tout. 49. En général les jeunes déclarent être à la recherche du sens de la vie et font preuve d'intérêt pour la spiritualité. Mais cette attention devient parfois une recherche du bien-être psychologique plus qu'une ouverture à la rencontre avec le mystère du Dieu vivant. En particulier, dans certaines cultures, nombreux sont ceux qui font de la religion une question privée et qui choisissent au sein des diverses traditions spirituelles les éléments dans lesquels ils retrouvent leur propre conviction. se diffuse ainsi un certain syncrétisme, qui se développe sur le présupposé relativiste selon lequel toutes les religions sont égales. L'adhésion à une communauté de foi n’est pas vue du tout comme la voie d'accès privilégié au sens de la vie, et elle est assortie et parfois remplacée par l’idéologie ou par la recherche du succès sur le plan professionnel et économique, dans la logique d'une autoréalisation matérielle. Un petit miracle : dénonciation du syncrétisme et du relativisme. Sans doute de nombreux pères synodaux n'ont-ils pas vu que ceux-ci n'étaient pas véritablement absents d'autres parties du document… 52. Face aux contradictions de la société, de nombreux jeunes désirent faire fructifier leurs propres talents, compétence et créativité, et ils sont disposés à assumer des responsabilités. Parmi les thèmes qui leur tiennent le plus à cœur on note la durabilité sociale et environnementale, les discriminations et le racisme. On revient aux mots-clefs de notre époque. 55. Se fait jour aussi parmi les jeunes la demande de voir une plus grande reconnaissance et valorisation des femmes dans la société et dans l’Eglise. De nombreuses femmes jouent un rôle irremplaçable dans les communautés chrétiennes, mais dans de nombreux lieux on peine à leur donner une place dans les processus décisionnels, même lorsque ceux-ci n’exigent pas des responsabilités ministérielles spécifiques. L'absence de la voix et du regard féminin appauvrit le débat et le chemin de l'Eglise, ôtant au discernement une contribution précieuse. Le synode recommande que tous soient plus conscients de l'urgence d'un changement inéluctable, et c'est à partir d'une réflexion anthropologique et théologique sur la réciprocité entre les hommes et les femmes. Cette exigence sera mise en évidence plus loin dans les paragraphes sur la synodalité. 57. Parmi les attentes des jeunes se détache en particulier le désir que dans l'Eglise on adopte un style de dialogue moins paternaliste et plus direct. Ben oui, ici comme ailleurs, le « patriarcat » est l’ennemi. Dieu le Père, le Saint-Père, les pères abbés et tous les autres pères n’ont qu'à bien se tenir… 64. Les jeunes sont l'un des lieux théologiques dans lesquels le Seigneur nous fait connaître quelques-unes de ses attentes et de ses défis pour construire demain. Les jeunes, un « lieu théologique » ? Cela renvoie au premier paragraphe où ils sont désignés comme prophètes par le simple fait qu'ils sont jeunes. 69. Le don de soi, « seul chemin qui permette d’atteindre un bonheur authentique et durable ! ». C'est la petite respiration que je vous offre… 73. L'Eglise finit souvent par apparaître à de nombreux jeunes comme une institution qui impose des règles, des devoirs et des obligations. Le Christ au contraire « nous a libérés pour la liberté » (Gal 5,1), en faisant passer du régime de la Loi à celui de l’Esprit. A la lumière de l’Evangile, il est aujourd'hui opportun de reconnaître plus clairement que la liberté est de par sa constitution relationnelle et montrer que les passions et les émotions sont importantes dans la mesure où elles orientent vers l'authentique rencontre avec l’autre. Une telle perspective atteste clairement que la vraie liberté est compréhensible et possible seulement dans sa relation à la vérité et surtout à la charité : la liberté, c'est être soi-même dans le cœur d'un autre. Le rappel que la liberté se définit par rapport à la vérité est bienvenu. Mais on a de nouveau cette importance donnée aux passions et aux émotions sans rappeler que celles-ci doivent être avant tout gouvernées par la raison. C'est en mettant les émotions et les passions d'abord qu'on en arrive à la promotion et à la reconnaissance d'états de vie incompatibles avec la loi, que Notre Seigneur est venu non pas abolir mais accomplir, en demandant à l’homme de l’observer par amour et non de l'écarter au nom de l'amour. 74. A travers la fraternité et la solidarité vécues, spécialement avec les plus petits, les jeunes découvrent que l'authentique liberté naît du fait de se sentir accueilli et grandi en faisant de l’espace à l’autre. Ils font une expérience analogue quand ils s'engagent à cultiver la sobriété ou le respect de l’environnement. L'expérience de la reconnaissance réciproque et de l’engagement partagé les conduits à découvrir que leur cœur est habité par un appel silencieux à l'amour qui provient de Dieu. Et il devient ainsi plus facile de reconnaître la dimension transcendante que la liberté porte originellement en soi et qui se révèle le plus clairement lors des expériences les plus intenses de la vie – la naissance et la mort, l'amitié et l’amour, la faute et le pardon. Ce sont précisément ces expériences qui ajoutent à reconnaître que la nature de la liberté est radicalement « responsoriale » (sic). L’intrusion du « respect de l’environnement » qui répond à un projet politique mondial bien précis dans ce paragraphe est intéressante à noter : la terre est sur un plan d'analogie sinon d’égalité avec les autres hommes. 75. Il y a plus de 50 ans, saint Paul VI a introduit l'expression « dialogue du salut » en interprétant la mission du Fils dans le monde comme expression d'une « formidable demande d'amour ». Mais il ajoutait que nous sommes « libres d'y répondre ou de la rejeter » (Ecclesiam suam 77). Dans cette perspective, l'acte de foi personnel apparaît comme libre et libérant : ce sera le point de départ pour une appropriation graduelle des contenus de la foi. La foi ne constitue donc pas un élément qui s'ajoute comme depuis l'extérieur à la liberté, elle comble l'aspiration de la conscience à la vérité, ou bien et à la beauté, en la retrouvant pleinement en Jésus. Le témoignage de tant de jeunes martyrs du passé et du présent, qui a résonné avec force au synode, est la preuve la plus convaincante de ce que la foi rend libre dans la confrontation avec les puissances du monde, de ses injustices et enfin face à la mort. « Formidable demande d’amour », certainement, et on ne regrettera pas ses références aux jeunes martyrs ni au fait que la foi en Dieu comble l'aspiration à la vérité. Mais la nature sacrificielle de la venue du Christ qui dans un acte propitiatoire, obtient pour les hommes le pardon de leurs péchés n'est pas très présente dans ce document final, alors qu'elle est au cœur de notre foi. 85. Le concile Vatican II, et le magistère depuis lors, offre des indications précieuses pour élaborer une théologie correcte des charismes et des ministères dans l'Eglise, de manière à accueillir avec reconnaissance et à valoriser avec sagesse les dons de la grâce que l'Esprit fait continuellement surgir dans l’Eglise pour la rajeunir. C'est une nouveauté depuis Vatican II ? Avant, on ne savait donc pas accueillir les charismes ? Il semblerait plutôt qu'il s'agisse d'accueillir de nouvelles formes de charismes qui jadis n’eussent pas passé la barre… 88. Le don de la vie consacrée, que ce soit dans sa forme contemplative ou active, que l'Esprit suscite dans l’Eglise, a une valeur prophétique particulière dans la mesure où elle est témoignage joyeux de la gratuité de l'amour. Lorsque les communautés religieuses et les nouvelles fondations vivent authentiquement la fraternité, celles-ci deviennent écoles de communion, centres de prière et de contemplation, lieu de témoignages des dialogues intergénérationnels et interculturels et des espaces pour l'évangélisation et la charité. La mission de nombreux consacrés et consacrées qui prennent soin des plus petits aux périphéries du monde manifestent concrètement le dévouement d'une Eglise en sortie. Si dans certaines régions on constate la réduction numérique et la fatigue du vieillissement, la vie consacrée continue d'être féconde et créative, y compris à travers la coresponsabilité avec tant de laïcs qui partagent l'esprit et la mission de divers charismes. On évoque bien la vie contemplative mais en passant seulement, l'essentiel étant les périphéries et l'Eglise en sortie. 89. L'Eglise a toujours eu le souci particulier du ministère ordonné, consciente que ce dernier est un élément constitutif de son identité et qu'il est nécessaire à la vie chrétienne. C'est pour cette raison que celle-ci a toujours cultivé une attention spécifique à la formation et à l'accompagnement des candidats à la prêtrise. La préoccupation de nombreuses églises face à leur chute numérique rend nécessaire une réflexion rénovée sur la vocation au ministère ordonné et sur une pastorale des vocations qui sachent faire sentir la fascination de la personne de Jésus et de son appel à devenir pasteur de son troupeau. La vocation au diaconat permanent exige elle aussi davantage d'attention, parce qu'elle constitue une ressource dont toutes les potentialités ne se sont pas encore développées. A propos des prêtres, comme des paroisses, le mot-clef est ici le renouveau (« réflexion rénovée »). Ne croyons pas que cela soit fortuit. 94. L'accompagnement ne peut pas se limiter au parcours de croissance spirituelle et à la pratique de la vie chrétienne. Bien plus fructueux est l’accompagnement tout au long du parcours progressif de prise de responsabilité au sein de la société, par exemple dans l'environnement professionnel ou dans l'engagement socio-politique. En ce sens l'assemblée synodale recommande la valorisation de la doctrine sociale de l’église. A l'intérieur des sociétés et des communautés ecclésiales toujours plus interculturelles et multireligieuses, il faut un accompagnement spécifique quant aux rapports avec la diversité, qui sache la valoriser comme enrichissement réciproque et possibilité de communion fraternelle, contre la double tentation du repli identitaire et du relativisme. Revoici le repli identitaire et l'idée de l'enrichissement au contact des autres religions. C'est aussi une constante du document synodal, constante inquiétante dans la mesure où la pratique du dialogue interreligieux a largement démontré ses limites et ses dangers, qui se manifestent précisément dans l'ouverture des jeunes évoquée au paragraphe 45. 118.[Synodalité] « Nous pouvons décrire ce processus en parlant de synodalité pour la mission, ou encore de synodalité missionnaire : “La mise en acte d’une Eglise synodale est un présupposé indispensable pour un nouvel élan missionnaire qui implique l'ensemble du peuple de Dieu” (Commission théologique internationale, La synodalité dans la vie et dans la mission de l’Eglise, 2 mars 2018) [en fait, « la dimension collégiale relative à l'exercice du ministère épiscopal et le ministère primatial de l'évêque de Rome »]. Il s'agit de la prophétie du concile Vatican II, que nous n'avons pas encore assumée dans toute sa profondeur ni développée dans ses implications quotidiennes, à laquelle s'est référé le pape François en affirmant : « Le chemin de la synodalité est le chemin que Dieu attend de l’Eglise du troisième millénaire » (Discours pour la commémoration du 50e anniversaire de l'institution du synode des évêques, 17 octobre 2015). Nous somme convaincus que ce choix, fruit de la prière et de la confrontation apportera à l'Eglise, par la grâce de Dieu, d’être et d'apparaître plus clairement comme la « jeunesse du monde ». Voici donc le cœur du document, qui nous parle explicitement d'accomplissement de la « prophétie » de Vatican II. 119. (…) Dans ce synode, nous avons fait l'expérience de ce que la collégialité qui unit les évêques cum Petro et sub Petro dans la sollicitude pour le Peuple de Dieu est appelée à s’articuler et à s'enrichir à travers la pratique de la synodalité à tous les niveaux. Synodalité renforcée à tous les étages : il est là, le passage à une Eglise démocratique, illustrée par le synode pour les jeunes qui a donné la parole à ces derniers et qui en a fait une parole prophétique. 120. La fin des travaux en assemblée et le document qui en recueille les fruits ne ferment pas le processus synodal, ils en constituent une étape. Puisque les conditions concrètes, les possibilités réelles et les besoins urgents des jeunes sont très différents d’un pays et d'un continent à l'autre, même si c'est dans la communauté de la foi unique, nous invitons les conférences épiscopales et les églises particulières à poursuivre ce parcours, en s'engageant dans des processus de discernement communautaire qui inclut aussi ceux qui ne sont pas évêques dans les délibérations, comme l'a fait ce synode. Le style de ces parcours ecclésiaux devra comprendre l'écoute fraternelle et le dialogue intergénérationnel, avec l'objectif d'élaborer des orientations pastorales particulièrement attentives aux jeunes marginalisés et à ceux qui n’ont que peu, voire aucun contact avec les communautés ecclésiales. Nous souhaitons qu'à ses parcours participent des familles, des instituts religieux, des associations, des mouvements et les jeunes eux-mêmes, de telle sorte que la « flamme » de ce que nous avons vécu au cours de ces journées se diffuse. Et voici l'extension de la synodalité à tous les pays et à tous les niveaux de la société catholique, la multiplicité des intervenants étant supposée de provoquer le « discernement », ce jugement qui en l'occurrence naît de la multiplicité des intervenants. 121. L'expérience vécue a rendu les participants au synode conscients de l’importance d'une forme synodale de l'église pour l'annonce et la transmission de la foi. La participation des jeunes à contribuer à « réveiller » la synodalité, qui est une « dimension constitutive de l’Eglise. Comme le dit saint Jean Chrysostome, “Eglise et Synode sont synonymes” – parce que l'Eglise n'est pas autre chose que le “cheminer ensemble” du troupeau de Dieu sur les sentiers de l’histoire à la rencontre du Christ Seigneur » (François, discours du 17 octobre 2015). La synodalité caractérise aussi bien la vie que la mission de l'Eglise, qui est le Peuple de Dieu, formé de jeunes et d'anciens, d'hommes et de femmes de toutes cultures et de tout horizon, et le Corps du Christ, dans lequel nous sommes membres les uns des autres, à commencer par ceux qui sont marginalisés et piétinés. Au cours des échanges et à travers les témoignages, le synode a fait émerger certains traits fondamentaux d'un style synodal, auxquels nous sommes appelés à nous convertir. Il n'est pas sûr que la synodalité selon saint Jean Chrysostome corresponde à celle qui est actuellement promue. Jadis, les synodes rassemblaient les évêques chargés de fixer un point de doctrine sous la primauté du pape. Si l'Eglise « n'est pas autre chose » qu'un « cheminer ensemble » on s'éloigne tout de même beaucoup du Corps mystique du Christ qui est Lui-même la Vérité, vérité qui n’évolue pas, fût-ce sur des chemins. La synodalité selon François « commence » avec les marginalisés. Elle n'a rien à voir avec la doctrine mais elle aboutit à la doctrine, en l'occurrence au « magistère ordinaire ». Et nous sommes appelés à nous convertir à elle – plutôt qu’à Dieu ? 122. C'est dans la relation – avec le Christ, avec les autres, dans la communauté – que se transmet la foi. (… Eglise de l’écoute…) Ainsi l'Eglise se présente comme « tente de l’alliance » dans laquelle est conservée l'arche d’Alliance : une Eglise dynamique et en mouvement, qui accompagne en cheminant, renforcée par tant de charismes et de ministères. C'est ainsi que Dieu se fait présent dans ce monde. On retrouve ici en filigrane une idée fondamentale des synodes sur la famille : l'idée que l'Eglise doit bouger dans sa manière de faire et de présenter les choses, l'idée d'un Dieu de l’histoire qui doit évoluer pour être acceptable par l’homme au lieu d'un Dieu qui impose des dogmes rigides. C'est en effet sous couleur d’accompagnement que l'on justifie l'ouverture aux situations « dites irrégulières » : là est l'efficacité du mécanisme. 123. Un trait caractéristique de ce style d’Eglise est la valorisation du charisme que l'Esprit donne selon la vocation et le rôle de chacun de ses membres, à travers un dynamisme de coresponsabilité. (…) Animés de cet esprit, nous pourrons aller vers une église participative et coresponsable capable de valoriser la richesse de la variété de ses composantes, accueillant avec gratitude même l'apport des fidèles laïcs, parmi lesquels les jeunes et les femmes… personne ne doit être mis ou pouvoir se mettre à l’écart. C'est de cette manière que l'on peut éviter aussi bien le cléricalisme, qui exclut un grand nombre des processus décisionnaires, que la cléricalisation des laïcs, qui les empêche en même temps de à se lancer dans la tâche missionnaire au sein du monde. Le synode demande de rendre effective et habituelle la participation active des jeunes dans les lieux de coresponsabilité des Eglises particulières, ainsi que dans les organismes des conférences épiscopales et de l'Eglise universelle. Il demande en outre que soit renforcée l'activité de l’Office des jeunes du Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, notamment à travers la constitution d'un organisme de représentation des jeunes au niveau international. Nous y voilà, c’est une explication de la synodalité qui insiste sur le rôle des laïcs, des jeunes, des femmes qui doivent pouvoir intervenir dans les « processus décisionnels ». Cela va jusqu'à créer des sortes d’assemblées pour peser sur ces processus : ici, ce sont les jeunes qui doivent être représentés au niveau international du seul fait qu'ils sont jeunes.
124. L'expérience du « cheminer ensemble » comme peuple de Dieu aide à comprendre toujours mieux le sens de l’autorité dans l’optique du service. Au pasteur il est demandé la capacité de faire croître la collaboration dans le témoignage et dans la mission, et d'accompagner des processus de discernement communautaire pour interpréter les signes des temps à la lumière de la foi et sous la conduite de l’Esprit, avec la contribution de tous les membres de la communauté, à partir de ceux qui se trouve aux marges. Les responsables ecclésiaux ayant cette capacité ont besoin d'une formation spécifique à la synodalité. Semble prometteur de ce point de vue de structurer des parcours de formation commun entre jeunes laïcs, jeunes religieux et séminaristes, en particulier pour tout ce qui concerne les thématiques comme l'exercice de l'autorité ou du travail en équipe. (en français dans le texte). Toujours dans le domaine de la synodalité, et partant toujours de ceux qui sont « aux marges » de l’Eglise, la recherche de la vérité de la voie d’action est présentée ici comme le résultat d'un travail en équipe qu'il faut promouvoir. Il n'y a plus d'enseignement transmis du haut vers le bas, mais une élaboration faite selon des mécanismes à mettre en place au moyen d'une formation continue. Rappelons que cette question de la synodalité n’a guère été présente au cours des discussions qui se sont déroulées à Rome depuis le 3 octobre : elle est imposée au père synodaux malgré eux, comble d’ironie. Ils ont pu parler tant qu'ils ont voulu, ce qui est pris en compte semble être une volonté de départ imposée par le haut. 125. La vie synodale de l'Eglise est essentiellement orientée vers la mission : c’est là le « signe et l’instrument de l'union ultime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain » (Lumen gentium) , jusqu'au jour où Dieu sera « tout en tous » (1 Cor 15,28). Les jeunes, ouvert à l'Esprit, peuvent aider l’Eglise à accomplir le passage pascal de la sortie « du “je” compris de manière individualiste au “nous” ecclésial, où chaque “je”,, étant revêtu du Christ, vit et chemine avec les frères et les sœurs comme sujet responsable et actif dans l'unique mission du Peuple de Dieu » (Commission théologique internationale, déjà citée). Le même passage, sous l'impulsion de l’esprit et la conduite des pasteurs, doit advenir pour la communauté chrétienne, appelé à sortir de l’autoréférentialité du « je » de sa propre autoconservation pour aller vers le service de la construction d’un « nous » inclusif aux confins de toute la famille humaine et de la création tout entière. A l'heure où beaucoup de jeunes n'ont pas la conscience d’eux-mêmes ce paragraphe est véritablement tragique, écrasant quelque peu la dimension individuelle du salut et aboutissant à une perspective d’inclusion universelle. On notera que dans le « nous » chrétien souhaité par le document final, la création elle-même est comprise : c'est la dernière ligne, extrêmement révélatrice, de ce paragraphe. Il s'agit là d'une ouverture nette au grand tout, à la conscience collective des religions orientales où sujet et objet se confondent, où la spiritualité s’étend à toute la matérialité de l'univers confondue avec l’esprit. 126. Cette dynamique fondamentale a des conséquences précises sur la manière d'accomplir la mission ensemble avec les jeunes ; elle exige d'avoir, avec franchise et sans compromis, un dialogue avec tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté. Comme l'a affirmé saint Paul VI, « L’Eglise se fait parole, l'Eglise se fait message, l'Eglise se fait dialogue » (Ecclesiam suam 67). dans un monde marqué par la diversité des peuples et la variété des cultures, « cheminer ensemble » est fondamental pour donner de la crédibilité et de l'efficacité aux initiatives de solidarité, d'intégration, de promotion de la justice, et pour montrer en quoi consiste une culture de la rencontre et de la gratuité. Les jeunes eux-mêmes, qui vivent quotidiennement au contact des gens de leur âge d’autres confessions chrétiennes, religions, convictions et cultures, stimulent la communauté chrétienne tout entière à vivre l'œcuménisme et le dialogue interreligieux. Cela requiert le courage de la parresia dans l’expression, et celui de l'humilité dans l’écoute, assumant l’ascèse – et parfois le martyre – que cela implique. Beaucoup de mots à la mode, et toujours ce « cheminer ensemble » qui est supposé à la racine de tout bien en diluant de fait la notion de vérité. 127. La pratique du dialogue et la recherche de solutions partagées représente une priorité claire en un temps où les systèmes démocratiques souffrent de la défiance et d’un bas niveau de participation et d'une influence disproportionnée de petits groupes d’intérêts qui ne rencontrent pas une ample résonance avec la population, avec le danger de dérive réductionniste, technocratique et autoritariste. La fidélité à l'Évangile orientera ce dialogue vers la recherche de la manière de répondre aux doubles cris des pauvres et de la terre (Laudato si’) à l'égard desquels les jeunes montrent une sensibilité particulière, en insérant dans les processus sociaux l’inspiration des principes de la doctrine sociale : la dignité de la personne, la destination universelle des biens, l'option préférentielle pour les pauvres, le primat de la solidarité, l'attention à la subsidiarité, le soin de la maison commune. Aucune vocation à l'intérieur de l’Eglise ne peut se placer en dehors de cet dynamisme communautaire de sortie et de dialogue, et pour cette raison, tout effort d’accompagnement est appelé à ce mesurer à l'aune de cet horizon, en réservant une attention privilégiée aux plus pauvres et aux plus vulnérables. On devine ici un écho à l'intérêt du pape François pour les peuples et en particulier les peuples indigènes, et bien sûr l’écologie de la « maison commune » promue par tous les grands de ce monde. Le plus inquiétant est cette assertion : « Aucune vocation à l'intérieur de l’Eglise ne peut se placer en dehors de cet dynamisme communautaire de sortie et de dialogue. » Quelle place reste-t-il pour les communautés purement contemplatives dont les membres sont orientés sur Dieu seul dans la prière et l'adoration ? 128. (…) Nous vivons dans une culture « sans frontières », marquée par une nouvelle relation spatio-temporelle, notamment en raison des communications numériques, et caractérisée par une mobilité continuelle. Dans un tel contexte, une vision de l'action paroissiale limitée aux seuls confins territoriaux est incapable de s'adresser aux fidèles avec des propositions diversifiées, et en particulier les jeunes ; elle emprisonne la paroisse dans un immobilisme inacceptable et dans une préoccupante répétitivité pastorale. Il faut donc repenser pastoralement la paroisse, dans une logique de coresponsabilité ecclésiale et d'élan missionnaire, en développant des synergies sur le territoire. C'est seulement ainsi que pourra apparaître un environnement significatif qui puisse intercepter la vie des jeunes. Veut-on détruire le maillage paroissial – qui s'autodétruit d'ailleurs très largement lui-même, en tout cas dans les pays développés qui semblent ici les premiers visés, à la fois par manque de prêtres et de catholiques pratiquants ? Au-delà du jargon, il n'y a cependant pas de proposition concrète, seulement une dénonciation d’une « répétitivité » qui est tout simplement et avant tout celle de la liturgie et des sacrements, du moins lorsque la paroisse les dispense. Pourtant, tant des paroisses que des monastères que les sanctuaires et que les pèlerinages, tous dans l'expression traditionnelle de l'organisation de l’Eglise, sont encore capables de toucher les jeunes. A l'occasion, ils se trouvent même dans le collimateur de la hiérarchie : pensons aux Franciscains de l’Immaculée. 131. Une Eglise synodale et missionnaire se manifeste à travers des communautés locales habitées de multiples façons. Depuis le début l’Eglise n'a pas eu une forme rigide et homologante (sic), mais elle s'est au contraire développée comme un polyèdre de personnes ayant des sensibilités, des origines et des cultures diverses. C’est précisément de cette manière que s’est manifesté le trésor incomparable de la vie trinitaire portée dans les vases d'argile de la fragilité humaine. L'harmonie qui est don de l’Esprit n'abolit pas les différences, mais les accorde en engendrant une richesse symphonique. Cette rencontre dans la foi unique à travers des personnes diverses constitue la condition fondamentale pour la rénovation pastorale de notre communauté. Cela a une incidence sur l'annonce, sur la célébration et sur le service, c'est-à-dire sur les domaines fondamentaux de la pastorale ordinaire.. La sagesse populaire dit que « pour éduquer un enfant il faut un village » : ce principe vaut aujourd’hui pour tous les domaines de la pastorale. Jargon toujours, mais qui a pour particularité de placer sur le même plan prêtres et laïcs. Il faudrait interroger des prêtres confrontés aux bonnes dames des équipes liturgiques pour en parler davantage… 132. (…) Seule une communauté unie et plurielle sait se proposer en en mode ouvert et porter la lumière de l'Evangile dans les domaines de la vie sociale qui aujourd’hui nous lancent un défi : la question écologique, travail, soutien à la famille, la marginalisation, le renouveau de la politique, le pluralisme culturel et religieux, le chemin vers la justice et vers la paix, l'environnement numérique. Cela se produit déjà dans les associations et les mouvements ecclésiaux. Les jeunes nous demandent de ne pas affronter ces défis seuls et de dialoguer avec tous, non pour accaparer une tranche de pouvoir, mais pour contribuer au bien commun. Là encore, on ne dit pas grand-chose en réalité, il faut simplement noter les mots-clefs comme « plurielle », « mode ouvert », « question écologique », « marginalisation ». Pour ce qui est du travail auprès des plus pauvres, l'Eglise a déjà une très longue histoire de charité derrière elle, à travers les saints qui ne se sentaient pas obligés d'être pluriels et en mode ouvert ! 134. [liturgie] On réaffirme avec clarté que la charge de célébrer avec une noble simplicité et avec l'implication de divers ministres laïcs constituent un moment essentiel de la conversion missionnaire de l’Eglise. Les jeunes ont montré qu'ils savent apprécier et vivre avec intensité les célébrations authentiques ou la beauté des signes, le soin dans la prédication et la participation communautaire parlent réellement de Dieu. Il est donc nécessaire de favoriser leur participation active, tout en gardant intact l’émerveillement devant le mystère, venir à la rencontre de leur sensibilité musicale et artistique, tout en aidant à faire comprendre que la liturgie n'est pas simplement expression de soi, mais action du Christ et de l’Eglise. Et voici la sacralisation de la participation de « divers ministres laïcs » dans la liturgie comme une sorte de condition de la liturgie réussie à travers la « conversion missionnaire de l’Eglise » qui passe par une adaptation aux participants et à leurs codes culturels, quelles que soient leur valeur et leur esthétique. Il y a certains un petit bémol à la fin. Mais quand on sait que la « sensibilité » traditionnelle a été tenue à l'écart de ce synode, on comprend encore mieux le sens de ce paragraphe. 143. (…) Dans le dynamisme d'une Eglise en sortie il est cependant nécessaire de penser un renouveau créatif et flexible de cette réalité, passant de l'idée de centres statiques, où les jeunes peuvent venir, à l'idée de sujets pastoraux en mouvement avec et en direction des jeunes, c'est-à-dire capables de les rencontrer dans leur lieu de vie ordinaire – l’école et l'environnement numérique, les périphéries existentielles, le monde rural et celui du travail, l'expression musicale et artistique, etc. – engendrant un nouveau type d'apostolat plus dynamique et actif. Aller rencontrer les jeunes là où ils sont ? C’est sans doute nécessaire. Mais pour que l'affaire fonctionne, il faut sans doute d’abord que l'Eglise accepte d'être nettoyée des scandales qui aujourd'hui la souillent – le plus souvent, les affaires de prédation homosexuelle –, qu'elle ne se laisse pas dénaturer par une adaptation au siècle, qu'elle pratique moins l’empathie que l'annonce de la Vérité. L’impression générale du document final est précisément que l’Eglise devrait mieux se faire comprendre des jeunes en adoptant leur langage et en acceptant leur jugement. Mauvais début. 144. La synodalité et les méthodes avec laquelle l’Eglise peut confronter des défis anciens et nouveaux, en recueillant et en faisant dialoguer des dons de tous ses membres, à partir des jeunes. Et c'est reparti : énième appel au dialogue synodal, cette synodalité qui naît cette fois non de l’écoute des marginalisés, mais des jeunes. Le paragraphe 147 est précédé d’un titre ; « Migrants : abattre des murs et construire des ponts », on avait déjà vu ça quelque part. 147. Beaucoup de migrants sont jeunes. La diffusion universelle de l'Eglise lui offre la grande possibilité de faire dialoguer la communauté de ceux qui partent et celle de ceux qui arrivent, contribuant à dépasser les peurs et la défiance, et à renforcer les liens que les migrants risquent de perdre. « Accueillir, protéger, promouvoir et intégrer », les quatre verbes avec lesquels le pape François synthétise les lignes d’action en faveur des migrants, sont des verbes synodaux. Mettre cela en a exige l'action de l'Eglise à tous les niveaux et implique tous les membres de la communauté chrétienne. De leur côté, les migrants, opportunément accompagnés, pourront offrir des ressources spirituelles, pastorales et missionnaires aux communautés qui les accueillent. D’une particulière importance est l'engagement culturel et politique d’aller de l’avant à travers des structures adéquates, pour lutter contre la diffusion de la xénophobie, du racisme et du refus des migrants. Verbes synodaux, si, si. Politiquement, on parlerait de l’accueil et du refus de la préférence nationale, notions eomplétées comme elles le sont ici par des dispositifs de lutte contre la xénophobie, racisme, le refus des migrants. C'est un même combat politique auquel l'Eglise est donc censée participer. Et si la synodalité, démocratie dans l’Eglise, était tout simplement l'ouverture aux idées du monde ? 148. Une Eglise qui cherche à vivre de manière synodale ne pourra se passer d'une réflexion sur la condition et le rôle des femmes en son sein, et de leurs conséquences dans la société. Les jeunes, garçons et filles, demandent cela avec une grande force. Les réflexions développées exigent de trouver une réalisation à travers une œuvre de courageuse conversion culturelle et de changement dans la pratique pastorale quotidienne. Un domaine de particulière importance à cet égard est celui de la présence féminine dans les organes ecclésiaux à tous les niveaux, y compris à des postes de responsabilité, et de la participation des femmes au processus de décision ecclésiaux par rapport au rôle du ministère ordonné. Il s'agit d'un devoir de justice, qui trouve son inspiration aussi bien dans la manière dont Jésus a été en relation avec les hommes et les femmes de son temps, que dans l’importance du rôle de certaines figures féminines dans la Bible, dans l'histoire du salut est dans la vie de l’Eglise. On est toujours dans une logique démocratique avec, cette fois, la femme en première ligne des « processus de décision ». Saint Paul peut aller se coucher, l'Eglise doit courageusement se convertir. Et même s'il n'est pas question du sacerdoce des femmes, il y a ici un début d’adhésion à la révolution féministe puisque la logique adoptée est celle des jeunes réclamant l’égalité. On se demande bien pourquoi la Vierge Marie n'a pas alors participé aux prises de décisions des apôtres investis du pouvoir sur l'Eglise par le Christ lui-même… Quant au rôle des femmes dans l'Eglise, il a toujours été important. En cet instant précis, on pense à sainte Catherine de Sienne qui aurait sans doute eu son mot à dire sur la crise de l'autorité que prépare, fomente et assure cette promotion débridée de la « synodalité ». Sexualité : une parole claire, libre, authentique Ces paragraphes très attendus dans le contexte actuel brillent par l’absence d’un élément essentiel : la finalité de la différence sexuelle qui est à la racine de la seule « orientation » (le texte a préféré le mot « inclination » qui apparaît comme un… cache-sexe) acceptable, celle qui porte l'homme vers la femme et la femme vers l’homme pour que de leur union féconde puissent naître de nouvelles vies. Cette dimension essentielle est totalement escamotée au profit d'une présentation de la sexualité comme le simple désir que l'on peut, ou que l'on peut ne pas, ou que l'on ne peut pas satisfaire. Certes il est question de la « juste valeur de la chasteté », mais dans une dimension curieusement individualiste. Voyez plutôt : 149. Dans l'actuel contexte culturel l'Eglise peine à transmettre la beauté de la vision chrétienne de la corporéité et de la sexualité, telle qu'elle surgit de l’Ecriture sainte, de la tradition et du magistère des derniers papes. Il apparaît donc urgent de rechercher des modalités plus adéquates, qui se traduisent concrètement dans l'élaboration de chemins de formation renouvelée. Il est opportun de proposer aux jeunes une anthropologie de l'affectivité et de la sexualité qui soit également capable de donner une juste valeur à la chasteté, leur montrant avec sagesse pédagogique la signification la plus authentique pour la croissance de la personne, dans tous les états de la vie. Il s'agit de mettre l'accent sur l'écoute empathique, l'accompagnement et le discernement, selon les lignes indiquées par le magistère récent. C'est pour cela qu’il est opportun de soigner la formation d’opérateurs pastoraux qui sachent se montrer crédibles, à partir de la maturation de leur propre dimension affective et sexuelle. Ce magistère récent, l’empathie et le discernement renvoient de manière à peine voilée à Amoris laetitia. Former les jeunes ? Oui, c'est nécessaire. Mais on notera que dans ces paragraphes sur la sexualité, pas plus que dans l'ensemble du document final, il n'est fait mention du fait que la plupart des jeunes sont a priori appelés à devenir eux-mêmes, dans un avenir relativement proche, parents : tout au plus parle-t-on d'une préparation améliorée au mariage. Les enfants semblent ne pas exister. Il est vrai que si tout le monde est occupé à donner de la voix synodale dans l’Eglise, il ne reste pas beaucoup de temps pour la marmaille… Pour ce qui est des « modalités plus adéquates », le passé récent a hélas montré que l’Eglise elle aussi est capable de proposer des parcours de formation qui manquent de décence. On notera aussi que ce paragraphe passe totalement sous silence la responsabilité des parents dans le domaine de la formation de l’affectivité et de l'éducation à la pureté, autres mot absent.150. Il existe des questions relatives au corps, à l'affectivité et à la sexualité qui nécessitent un développement anthropologique, théologique et pastoral approfondie, qui doit être réalisé selon les modalités et les niveaux qui conviennent le mieux, depuis le niveau local jusqu’à l’universel. A ce propos surgissent en particulier des questions relatives à la différence et à l’harmonie entre l'identité masculine et féminine et aux inclinations sexuelles. A cet égard le synode a rappelle que Dieu aime chaque personne et c’est ainsi que fait l’Eglise, renouvelant son engagement contre toute discrimination et violence sur la base du sexe. Il rappelle également la pertinence anthropologique déterminante de la différence et de la réciprocité entre l'homme et la femme et considère comme réducteur de définir l'identité des personnes uniquement à partir de leur « orientation sexuelle » (Congrégation pour la doctrine de la foi, Lettre aux évêques de l'Eglise catholique sur le soin pastoral des personnes homosexuelles, 1er octobre 1986, numéro 16). Il existe déjà dans de nombreuses communautés chrétiennes des chemins d’accompagnement dans la foi pour les personnes homosexuelles : le synode recommande de favoriser de tels parcours. Dans ces chemins les personnes sont aidées à lire leur propre histoire ; à adhérer avec liberté et responsabilité à leur propre appel baptismal ; à reconnaître le désir d’appartenir et de contribuer à la vie de la communauté ; à discerner les meilleures formes pour ce faire. De cette manière on aide tous les jeunes, sans en exclure aucun, à intégrer toujours davantage la dimension sexuelle de leur propre personnalité, grandissant dans la qualité des relations et cheminant vers le don de soi. Ce paragraphe 150, plus long que celui consacré à la sexualité normale, s'intéresse de fait avant tout aux autres « inclinations », comme ils disent, sans le moindre rappel moral, enterrant des réalités souvent sordides sous un lisse langage d'accueil et de refus de « toute discrimination » là où le Catéchisme de l'Eglise catholique parle de « discrimination injuste ». C'est un glissement notable. Ayant dit qu'il fallait éviter de réduire les personnes à leur orientation sexuelle, le même paragraphe propose un accompagnement spécifique dans la foi pour les personnes homosexuelles. Mais sans discernement. Certains d'entre eux proposent d'aider à sortir d'une situation dont on souffre. D'autres accompagnements valorisent au contraire ces choix de vie radicalement opposée au plan de Dieu pour l’homme. Tel qu'il est rédigé, le paragraphe ne donne pas la moindre garantie de rectitude. 153. La promotion de la justice interpelle aussi la gestion des biens de l'Eglise. Les jeunes se sentent chez eux dans une Eglise où l'économie et la finance sont vécues dans la transparence et dans la cohérence. Des choix courageux dans la perspective de la durabilité, comme ceux indiqués par l’encyclique Laudato si’, sont nécessaires, dans la mesure où le défaut de respect de l'environnement engendre de nouvelles pauvretés, dont les jeunes sont les premières victimes. Les systèmes se changent aussi en montrant qu'il est possible de vivre différemment la dimension économique et financière. Les jeunes encouragent l'Eglise à être prophétique dans ce domaine, en paroles mais surtout à travers des choix qui montrent qu’une économie amie de la personne et de l'environnement est possible. Ensemble avec eux nous pouvons le faire. Yes we can ! En filigrane, voici l'Eglise pauvre pour les pauvres, celle du serment des catacombes de Don Helder Camara, celle qui s’engouffre dans l'idéologie du développement durable qui est si fondamentalement hostile à l'empreinte de l'homme sur la terre. C'est toute la différence entre l'utopie et la radicalité d'un saint François qui renonce à ses richesses, mais pour Dieu, et qui n'a jamais rejeté la beauté de l’architecture, la richesse des ornements liturgiques comme le fait l'Eglise de l'ère polyester. 154. En ce qui concerne les questions écologiques, il sera important d'offrir des lignes directrices pour la réalisation concrète de Laudato si’ dans les pratiques ecclésiales. De nombreuses interventions ont souligné l'importance d'offrir aux jeunes une formation à l'engagement socio-politique et la ressource représente à cet égard la doctrine sociale de l’Eglise. Les jeunes engagés en politique sont soutenus et encouragés à œuvrer pour un réel changement des structures sociales injustes. Revoici la doctrine sociale adaptée à la mise en œuvre de Laudato si’ qui repose sur le postulat que la terre se réchauffe – elle dont la température est stable depuis bientôt 20 ans et qui a été bien plus chaude dans un passé relativement récent et sans industrie, l'optimum médiéval – et que l'homme en est responsable. Cette doctrine nouvelle exige des sacrifices pour la terre, au lieu de proposer ouvertement et clairement la loi morale de l’Eglise pour la conduite de chacun, toujours présentée comme rigide alors qu'elle est maintes fois moins tyrannique que celle du « développement durable ». 155. Le pluralisme culturel et religieux est une réalité croissante dans la vie sociale des jeunes. Les jeunes chrétiens offrent un beau témoignage de l’Evangile lorsqu'ils vivent leur foi d’une manière qui transforme leurs vies et leurs actions quotidiennes. Ils sont appelés à s’ouvrir à des jeunes d'autres traditions religieuses et spirituelles, à maintenir avec des rapports authentiques qui favorisent la connaissance réciproque et préserve des préjugés et des stéréotypes. Ils sont ainsi les pionniers d'une nouvelle forme de dialogue interreligieux et interculturel, qui puisse contribuer à libérer nos sociétés de l'exclusion, de l'extrémisme, du fondamentalisme et aussi des manipulations de la religion à des fins sectaires ou populistes. Témoins de l'Evangile, ces jeunes, avec ceux de leur âge, deviennent les promoteurs d'une citoyenneté inclusive de la diversité et d'un engagement religieux socialement responsable et capable de construire le lien social et la paix. Récemment, précisément sur proposition des jeunes, on a lancé des initiatives pour offrir l’occasion d’expérimenter la coexistence entre des personnes appartenant à des religions et à des cultures diverses, afin que tous dans un climat de convivialité et dans le respect des fois respectives soient acteurs d'un engagement commun et partagé dans la société. On aurait presque envie de ne plus rien dire, tant s'accumulent ici les tartes à la crème de l’antiracisme. L'expérience dont il est question est probablement du genre de celle de Loppiano, ville des Focolari où tout le monde est tellement bienvenu qu'il n'y a plus de périphéries du tout… En attendant, la référence à la « citoyenneté inclusive de la diversité » met en lumière la réalité profondément politique de ce document final et donc de ce synode qui exalte davantage les différences horizontales que la vérité de notre appel au salut éternel obtenu au prix du Sang de Jésus-Christ. Il est vrai que de nombreux paragraphes de ce document auraient pu figurer n'importe où, et non dans un document d’Eglise. 156. En ce qui concerne le chemin de réconciliation entre tous les chrétiens, le synode des reconnaissants pour le désir de nombreux jeunes de faire croître l'unité entre les communautés chrétiennes séparées. S’engageant dans cette ligne, assez souvent les jeunes approfondissent les racines de leur propre foi et ils font l'expérience d'une réelle ouverture à tout ce que les autres peuvent donner. Ils ont l’intuition que le Christ nous unit déjà, même si quelques différences demeurent. Comme l'a affirmé le pape François a l'occasion de la visite du patriarche Bartholomé en 2014, ce sont les jeunes « qui aujourd'hui invitent à faire des pas en avant vers la pleine communion. Et ce n'est pas parce qu’ils ignorent la signification des différences qui nous séparent encore, mais parce qu'ils savent regarder plus loin, ils sont capables de saisir l'essentiel qui déjà nous unit » (François, intervention à l'occasion de la divine liturgie, église patriarcale de Saint-George, Istanbul, 30 novembre 2014). Arrivé à la fin de ce document, on a l’impression que les jeunes ont été manipulés et instrumentalisés pour faire avancer le projet politique et religieux du pape François. C'est en leur nom que sont demandés des changements qui vont jusqu'à la révolution opérée dans la hiérarchie de l’Eglise. En gommant les différences avec les autres confessions chrétiennes, on justifie en effet le rapprochement tellement plus facile à opérer dans un cadre « synodal » où les différentes régions du monde et les différents pays sont dotés de leurs propres organes représentatifs et appelé à une écoute de la diversité, avec forcément des « processus décisionnaires » qui n'aboutiront pas aux mêmes solutions. 157. Tout est lié (…), la défense de l'embryon et celle du migrant. Entre empêcher qu'un embryon soit tué et autoriser et promouvoir l’entrée massive de populations étrangères dans un pays à travers un accueil quasi inconditionnel, il y a pourtant une petite différence, non ? Mais il ne faut pas s'étonner des incohérences dans un document qui dans son ensemble, est une manifestation de volonté de changement Pour cela, les jeunes ont bon dos.
Jeanne Smits