Source [Boulevard Voltaire] Au fur et à mesure que la crise qui a éclaté avec le mouvement des gilets jaunes s’aggrave, les hommes politiques de tous bords – eux-mêmes dépassés – tentent de proposer une issue institutionnelle à une crise devenue politique.
Après un nouveau samedi marqué à la fois par une recrudescence des violences parisiennes, que Christophe Castaner ne sait pas maîtriser, et une mobilisation toujours forte en province, plusieurs responsables ont fait leurs propositions. Laurent Wauquiez a lancé l’idée d’un référendum sur la transition écologique ; Jean-Luc Mélenchon veut « un vote démocratique pour sortir de la crise » ; Marine Le Pen avait déjà plaidé pour la dissolution. Pour les manifestants, c’est « Macron démission » qui fait le plus recette.
Tout ce petit monde s’emballe un petit peu et il est quasiment certain qu’Emmanuel Macron n’aura recours à aucune de ces solutions-là. Tout comme François Hollande, il est tenu par les institutions de la Ve République. Même si elles l’ont laissé, au bout de cinq ans, entièrement lessivé, à 5 %, elles l’ont tenu. Voilà au moins quelque chose de solide et de bien pensé en France : sa Constitution. Merci, grand Charles ! Quant à Emmanuel Macron, il a été élu par 20 millions de Français, quoi qu’on puisse ergoter sur les blancs, les nuls, l’affaire Fillon et l’épouvantail Marine Le Pen. Il a une véritable légitimité démocratique. Idem pour sa majorité parlementaire, quoi qu’on puisse dire, là encore, des conditions de l’élection (une abstention historique de plus de 50 %). On ne voit pas pourquoi le Président renoncerait à ces deux éléments clefs de sa légitimité. Et de stabilité pour le pays. En outre, un référendum est bien trop risqué.
En revanche, les observateurs ont oublié le levier politique le plus classique de la Ve République qui permet à un Président confronté à une crise sociale et politique de reprendre la main : le changement de Premier ministre. Tout le monde reconnaît qu’Édouard Philippe a été à la fois trop terne et trop ferme, voire fermé. C’était peut-être sa feuille de route. Mais voilà, sous la VeRépublique, le Premier ministre est là pour protéger le Président, encaisser les coups, même quand le Président a la plus grande part de responsabilité. Édouard Philippe va devoir jouer son rôle de fusible.
Certains remarquaient que les courbes de popularité d’Emmanuel Macron et de François Hollande étaient identiques. Pour tenter de se relancer, François Hollande avait dû renvoyer M. Ayrault, moins de deux ans après sa nomination. C’est un sort identique qui attend Édouard Philippe.
Mais, alors, qui pour remplacer Édouard Philippe dans le monde d’Emmanuel Macron ?
Il commettrait une lourde erreur en promouvant l’un de ses lieutenants discrédités par leur attitude durant cette crise : Castaner, Griveaux ou Darmanin. Il ferait encore fausse route en appelant l’un de ces Macron boys tellement aux antipodes de la France des gilets jaunes comme MM. Denormandie ou Guerini. Mais alors, qui ?
Un homme politique centriste, sage, provincial, qui s’est toujours rêvé en grand réconciliateur des France fracturées. Vous avez tous reconnu son panache grisonnant. Tiens, ne vient-il pas d’adresser ce conseil limpide au Président de ne pas « gouverner contre le peuple » ?
Et, comme par hasard, Le Monde publie, samedi, un article au titre et au contenu à peine subliminaux : « Philippe et Bayrou, la mésentente cordiale. » Sous-titre : « Entre le Premier ministre et le maire de Pau, piliers du dispositif macronien, les relations se sont envenimées. » Dans la panique, heureusement que Le Monde est encore là pour écrire le storytelling du quinquennat : Bayrou, le recours.
Le départ d’Édouard Philippe n’est plus, maintenant, qu’une question de temps : avant ou après Noël ?
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