Les Guides et Scouts d'Europe ont renouvelé leur équipe dirigeante. Réunie le 2 mai dernier, l'assemblée générale a approuvé le rapport moral à 67,9 % des voix. Les cadres du mouvement ont confirmé leur souhait de se recentrer sur le charisme fondateur du mouvement, un scoutisme authentique au service de la sainteté réelle de chaque personne .

Après la crise qui avait secoué le mouvement ces deux dernières années, une page s'est tournée à Château-Landon. Deux écoles s'affrontaient autour de l'évolution du mouvement, du mode de gouvernance et de la responsabilité des laïcs dans l'Église, un sujet particulièrement délicat chez le plus gros pourvoyeur de vocations sacerdotales en France.
L'interprétation du motu proprio Summorum pontificum libéralisant l'usage de la forme extraordinaire du rite romain avait conduit au changement d'équipe dirigeante, la majorité des cadres du mouvement souhaitant rester fidèles au charisme unitaire du mouvement, et en cela précurseur de la volonté de Benoît XVI.
Mais la crise était bien antérieure.
C'est une politique de normalisation réfractaire aux aspects jugés trop incommodes de la personnalité du mouvement vis-à-vis de l'extérieur, qu'il s'agisse des relations avec l'État, avec les autorités de l'Église de France ou des autres mouvements scouts qui semblait poser problème. En outre, on reprochait aux commissaires généraux leur isolement dans leur volonté de conduire le mouvement vers une orientation dont la base ne voulait pas : en clair, la démocratisation du fonctionnement diluant le contrôle des principaux responsables et l'alignement des liens avec la hiérarchie de l'Église sur le mode des Scouts de France.
Cette orientation procédait d'un renversement dans l'articulation de la vie chrétienne et de la pédagogie, la pédagogie devant primer sur la vie chrétienne (et la liturgie). Cela aurait par exemple tendu vers l'abandon de la liberté de choix des conseillers religieux qui se pratiquait pourtant toujours en accord avec l'évêque. On comprend aisément qu'une cléricalisation du fonctionnement de l'encadrement spirituel des unités aurait changé le mouvement, et dans un sens contraire à Vatican II appelant les fidèles laïcs à prendre leur responsabilité, et tel que Jean Paul II l'avait précisé dans l'exhortation Christifideles laici.
La nouvelle équipe a rappelé au contraire que la vocation du mouvement, qui se veut un mouvement populaire d'éducation chrétienne, reposait sur le caractère central de la vie chrétienne où la foi innerve et nourrit la pédagogie (Gwenaël Lhuissier), comme l'a voulu le père Sevin. Dans cette perspective, on voit mal par exemple qu'un appel du pape à vivre toute la richesse de la liturgie de l'Église soit déclaré ne pas pouvoir s'appliquer pour des raisons pédagogiques .
L'impact de la dimension européenne
Le deuxième aspect de la question se situe dans la dimension européenne du mouvement, particularité éminemment constitutive de son identité, et qui fait de l'AGSE un membre de l'Union internationale des Guides et Scouts d'Europe. L'ancienne équipe s'était résolument détachée de son association mère. Or cette filiation a une conséquence religieuse : les Guides et Scouts d'Europe ne sont pas sous la responsabilité des évêques de France, mais du dicastère romain qui a reconnu l'Union internationale, comme l'a rappelé le père Jacquinet, responsable de la Section Jeunes du Conseil pontifical pour les laïcs, dans un rectificatif demandé à La Croix (cf. infra), où il insiste sur la légitime autonomie du mouvement restant sauve naturellement la communion avec l'épiscopat.
Ce retour aux fondamentaux ne s'est pas fait sans douleur. Après l'assemblée générale 2008, les partisans de l'ancienne équipe se sont constitués en association (Mafeking 2009), appelant à voter contre le rapport moral. Du jamais vu dans un mouvement scout. Les diagnostics les plus invraisemblables se sont répandus sur la dérive identitaire de la nouvelle équipe, son refus de l'ouverture, son anti-épiscopalisme , sa prise de distance avec Vatican II (sic). Un ancien commissaire général a dénoncé le retour de l'hydre intégriste, du mythe de la chrétienté et des tristes brebis adoratrices du passé . On a cru bon dénoncer les liaisons coupables des fondateurs du mouvement avec une officine politique infréquentable (l'Office de Jean Ousset, aujourd'hui Ictus !) dans les années soixante...
Les connaisseurs du mouvement savent que cette dialectique malheureuse ne reflète en rien la réalité et son évolution. La sensibilité traditionaliste au sein du mouvement est marginale, et elle a plutôt tendance à progresser mieux dans l'unité de l'Église que si elle était ghettoisée dans ses propres institutions. On devrait plutôt se réjouir des fruits de l'unité au sein d'un mouvement catholique.
Des rumeurs de scission ont couru, accréditées par un projet de résolution qui sera présenté lors de la prochaine assemblée générale des Guides et Scouts de France. Désireux de mettre en place une véritable dynamique de croissance "externe" , les SDF souhaitent la création et le soutien de pratiques du scoutisme diverses dans le cadre de notre projet éducatif . L'avenir dira si la violente critique des minoritaires scouts d'Europe conduira ces derniers à trouver refuge chez les Scouts de France. Quelques cadres ont démissionné de leurs fonctions, d'autres ont manifesté leur volonté d'apaisement.
De leur côté, les Guides et Scouts d'Europe ont réaffirmé leur vocation éducatrice de la personne dans toute sa dimension, leur pleine communion dans l'Église , leur ouverture à la dimension européenne et leur désir de communion à nouveau avec les autres mouvements scouts. Les nouveaux commissaires généraux sont Marie-Camille Borde (renouvelée à la section guide), Benoît de Maupeou (section scoute), assisté de l'ancien commissaire général Edouard Colin, et de Frank Drouet. Gwenaël Lhuissier est confirmé comme président du Conseil d'administration, avec Franck Dubois comme adjoint au président ; secrétaire nationale : Odile Levacher (renouvelée dans ses fonctions) ; trésorier national : Richard Dumas.

 

Rome, les Scouts d'Europe et les évêques de France

Le père Éric Jacquinet, responsable de la Section Jeunes au sein du Conseil pontifical pour les Laïcs, a demandé à La Croix de publier le rectificatif suivant sur les relations entre les Guides et Scouts d'Europe (GSE) et les évêques de France (La Croix, 4 mai 2009).

Dans l'article publié le 30 avril 2009, il a été écrit, à tort, que le Conseil pontifical pour les laïcs rappelait que "les GSE sont sous la responsabilité des évêques de France". Nous nous devons d'apporter les précisions suivantes. L'Association française des Guides et Scouts d'Europe (AGSE) fait partie de l'Union internationale des Guides et Scouts d'Europe-Fédération du scoutisme européen (UIGSE-FSE), association internationale de fidèles, reconnue par le Conseil pontifical pour les laïcs en 2003.
À ce titre, l'AGSE n'est pas sous la responsabilité des évêques de France, mais relève de ce dicastère romain, en tant que membre de l'UIGSE-FSE. De plus, le droit de l'Église confère une légitime autonomie aux mouvements et associations de fidèles dans l'Église, tout en leur demandant une juste soumission aux évêques, lesquels ont un devoir de sollicitude et de vigilance envers ces associations et mouvements. Nous nous réjouissons donc que les évêques de France accompagnent ce mouvement avec bienveillance, tout en exerçant leur vigilance à son égard, comme ils le font pour tant d'autres mouvements et associations d'Église, promouvant et accompagnant leurs charismes, et respectant leur juste autonomie. En outre, le mode de relation entre les GSE et les évêques de France est, pour une part, défini par le protocole entre le Comité épiscopal Enfance-Jeunesse et l'AGSE du 30 mai 2001. Les repères pratiques donnés par ce protocole, qui s'avèrent très utiles et opérationnels, définissent le cadre concret de cette nécessaire collaboration. Dans cet esprit, nous ne pouvons qu'encourager un travail de communion entre les responsables du mouvement, à quelque niveau que ce soit, et tous les évêques concernés – travail de communion sans lequel aucun mouvement ne peut dépasser les inévitables difficultés rencontrées au cours de son histoire, ni porter tout son fruit pour le bien des jeunes et de l'Église.

 

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